Univers impitoyable !
Débarrassée de son aspect caricatural à la "Dallas", cette formule situe bien le cinéma d'Oliver Stone.
Comme le montre le rapprochement, évident, entre ces deux films successifs. Après la jungle vietnamienne de "Platoon", il a fait évoluer sa caméra dans celle que constitue - au figuré - une place boursière très influente telle que "Wall Street". Avec, dans un cas comme dans l'autre, un jeune héros au coeur de situations symptomatiques, synonymes de prise de conscience, d'ailleurs interprété par le même comédien très prometteur, alors : Charlie Sheen.
Il faut visionner "Wall Street" avec, en mémoire, les effarantes péripéties de la crise boursière internationale de la fin de l'année 87. Témoin, en quelques deux heures de projection, de l'ascension, puis de la chute d'un jeune loup de la Finance (golden boy dit-on Outre-Atlantique), le spectateur cède autant au fatalisme qu'à la stupeur. Conscient que cette fiction cinématographique transpose, sans vraiment d'exagération, une réalité vécue à New York, Paris ou Tokyo.
Il n'est question que de :
- Spéculations plus ou moins douteuses autour des bilans annuels de grandes entreprises ;
- Manipulations plus ou moins scandaleuses de données économiques, ou alors d'individus jouant un rôle stratégique ;
- D'ambitions personnelles plus ou moins dangereuses pour quiconque s'avise de les contrarier.
Autrement dit, la vie de ceux qui ne la voient que sous un seul et vampirisant angle : "la couleur de l'argent" roi !
Courtier désireux de monter haut et vite dans la hiérarchie sociale, le jeune héros finit par être sous la coupe de celui dont la réussite apparente, insolente, le fascine. un certain Gekko, personnalisation de cette nouvelle catégories d'aventuriers qui rachètent des sociétés non pour les renflouer, mais pour les liquider ! Ce qu'on appelle un raider. Il faudra une situation insupportable pour que le Rastignac américain comprenne qu'il est en train de perdre son âme au contact de son machiavélique modèle. Quand celui-ci devient une menace pour la compagnie aérienne où travaille son père, l'exemple même du désintéressement et de l'honnêteté morale. Cela donne des scènes toutes en émotions retenues entre les Sheen père et fils : Charlie et Martin.
Au contraire, en impitoyable requin des affaires, Michael Douglas donne libre cours à des excès d'interprétation qui servent l'un des personnages les plus marquants de sa filmographie.
Les autres comédiens en vedette, notamment Terence Stamp et Darryl Hannah, sont parfaitement dirigés.
Cela dit, il est dommage que ce film d'immersion dans les milieux de la haute finance ne soit qu'une succession de face à face et donc, manque singulièrement... d'action !
Mais c'est presqu'une "obligation" de le voir, au regard de la morale qu'il véhicule quand le jeune héros doit enfin choisir entre la Bourse ou la vie !