War Machine
5.5
War Machine

Film de David Michôd (2017)

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Je dois vous l'avouer, j'ai baissé ma note d'un point en voyant la moyenne de mes éclaireurs, j'ai pas assumé...
avec le temps je note de plus en plus haut, et sincèrement en plus,
j'ai peur de passer pour un inconséquent, ou un naïf je sais pas...


Parfaite transition :


Glen McMahon (Brad Pitt) est le général qu'il faut pour une guerre. Moi-même qui n'aime pas spécialement ni la guerre ni les militaires
(sans cracher dans la soupe non plus)
si j'avais à gérer un problème d'ordre diplomatique armé, une guerre sur les bras autrement dit, je ferai appel à lui, Glen McMahon, sincère, solide, intellectuel, sportif, discipliné, intègre, expérimenté, impliqué, courageux,
humble,
d'une humilité qui disait : « mon humilité me rend meilleur que vous »,
subversif à quelques égards : il a tenté d'enfiler un pétard dans le cul de son sergent-instructeur endormi...
c'est logique : sincérité et intégrité à l'armée mènent à la subversion,
regardez Tom Cruise dans Top Gun,
Ben Affleck dans Pearl Harbor,
Baleine dans Full Metal Jacket...


(quoique Glen McMahon est aussi carriériste, en quête de reconnaissance nationale,
subversif et carriériste... ça colle pas, on voit venir la douille...
faudra choisir si tu veux la reconnaissance nationale,
vendu ou subversif, entre les deux tu passes pas à la télé).


Un parcours exemplaire donc, excellent, intelligent et audacieux, atypique et sympathique, il a maintenant les cheveux blancs, les planètes se sont alignées, le poste de chef des forces armées des États-Unis d'Amérique de la coalition en Afghanistan s'est libéré,
il prend le poste, c'est son heure de gloire,
et derrière cette gloire se cache encore davantage, c'est la consécration d'une raison de vivre, d'un engagement, celui du militaire,
car notez bien que Glen McMahon, s'il n'est pas tout à fait Born to kill mais pas loin, il est à n'en pas douter Born to win war.


La première partie du film alors pose les bases de la folie douce qui ne peut que gagner au fur et à mesure le personnage, en ce qu'elle plonge ce Born to win war dans une war où il n'y a rien à gagner,
autrefois on faisait la guerre contre l'armée d'un État-nation. Des mecs en uniforme, comme les nazis ou des trucs comme ça. Mais quand on envahit un pays de façon inconsidérée, on combat des gens sans uniforme. Ce sont eux qu'on appelle des insurgés. Ils prennent les armes comme vous le feriez si on envahissait votre pays. Curieusement, il est quasi impossible de venir à bout d'une rébellion.
et au contraire tout à perdre puisque la simple présence de l'armée des États-Unis en Afghanistan plonge ce pays dans un chaos chaque jour plus loin des idéaux américains de liberté de sécurité et de confort...


Je croyais qu'on se faisait des cheveux blancs à cause du stress et des décisions difficiles. Maintenant, je crois que ça vient quand on sent dans ses os que les grands moments de sa vie ne sont pas aussi grands qu'on l'espérait. Quand la réalité pointe le bout de son nez. Ce qui sépare les croyants comme Glen des autres, c'est leur capacité à empêcher les intrusions de la réalité. Certains appellent ça la folie.


J'ai trouvé cette folie parfaitement bien glissée dans le film, en sourdine partout, dans l'écriture déjà,
Il était le symbole d'un autre temps. Sa main était figée, telle une serre, comme s'il tenait un cigare de la deuxième guerre mondiale que son ego obsédé par le fitness l'empêchait de fumer,
les dialogues sont drôles,
les personnages secondaires tiennent l'intrigue et tiennent le personnage principal, parce qu'en quelque sorte ils l'aiment, et il les aime en retour, sincèrement,
en fait ce sont des gars qui s'aiment, et le tragique de leur situation les rend d'autant plus touchants,
les personnages secondaires dans leur naïveté sont source d'humour, à l'image de Pete, responsable des renseignements, qui ne sait rien et a besoin des autres pour réaliser qu'il a pris du poids,
- Pourquoi tu mets un uniforme ?
- Aujourd'hui je dois rencontrer un chef d'État.
- Ah cool, je dois venir ?
- Oui Pete, c'est ton job... et pourquoi t'es gros ?
- Je suis pas gros ?!

et le jeu de Brad Pitt, un poil guignol, est en fait plutôt juste. Cette espèce de visage américain plus qu'américain, poseur, avec les yeux toujours en mouvements de sourcils interrogateurs quand il n'y a finalement jamais aucune question à poser, si ce n'est celle de l'absurdité, et cette bouche devenue un peu trop folle pour ne plus exprimer quoique ce soit qui ressemble à une émotion humaine...


Le personnage de Glen McMahon, sportif et intelligent fait pour l'armée et la réussite professionnelle, porte comme une Miss en bandoulière la tragédie des États-Unis d'Amérique, un pays magnifique, aux ressources aussi riches que ses paysages, qui ne pouvait que grandir trop vite et trop bien et perdre les pédales,
et lorsque sa femme au restaurant lui reproche de ne le voir que trente jours par an, il a son joker :
Si on n'était pas en guerre, si le 11 septembre n'avait pas eu lieu, si on n'était pas en guerre à cause de ça, je serai devant un barbecue dans le jardin. Mais le 11 septembre a eu lieu.


CITATION BONUS :
Glen a le temps d'écrire un livre en parallèle pendant son temps en Afghanistan, c'est qu'il est prolifique,
livre dans lequel notamment il dit : l'homme est une créature imparfaite. Livré à lui-même, il veut juste se tripoter la bite et manger du poulet. Si c'est pas un bel exemple de sagesse, de sincérité, d'intégrité, de subversion, et de folie...

Vernon79
8
Écrit par

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le 11 août 2018

Critique lue 1.2K fois

8 j'aime

Vernon79

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