Ce matin, chien crevé sur mon écran.
Au moment où les geeks du monde entier étaient encore nombreux à avoir des ampoules aux mains après s'être astiqué la nouille devant le Batman über troublé "qu'on-avait-jamais-vu-ça-dans-un-Batman-hein-quoi-comment-ça-Batman-Returns?" et que les geekettes aient failli se noyer dans leurs propres sécrétions en admirant la prestation "trop dark" de Ledger dans The Dark Knight (oh ben ça alors), sans oublier Hollywood qui poussait le vice jusqu'à lui offrir un Oscar posthume pour ses douze minutes cinquante-quatre de présence dans le film de Nolan, débarquait Watchmen dans toutes les salles obscures.
Autant dire que c'était la fête chez les fabricants de pommades.
Watchmen est une série de comic books (non, je n'utiliserai pas le terme "graphic novel", ça me les broutes) paru en 1986 sous la plume de Alan Moore et Dave Gibbons. Le bouzin deviendra rapidement culte tant auprès du geek lambda que de la critique.
Watchmen dépeint un univers dans lequel nos amis en lycra ont vraiment existé jusqu'à l'émergence du Docteur Manhattan, surhomme qui changea la face du monde. Grâce à lui la guerre du Vietnam fut gagnée par les États-Unis ce qui permit à Nixon de briguer de nouveaux mandats et une loi fut votée, rendant les héros masqués hors la loi. En 1985, le monde est au bord de l'explosion et le Comédien, ancien membre des Minutemen et soldat d'élite du gouvernement, vient d'être assassiné. Rorschach, dernier héros encore en activité, en est sur, quelqu'un a décidé de tuer les anciens porteurs de masque.
De nombreux réalisateurs ont tenté d'adapter l'inadaptable (j'aime beaucoup, ça fait très dramatique) de Paul Greengrass à Darren Aronofsky en passant par Terry Gilliam et Guillermo DelToro, tous s'y sont cassé les dents ou ont, tout simplement, estimé qu'il était impossible de retranscrire le boulot de Moore et Gibbons en un seul film (Gilliam allant même jusqu'à évoquer une mini-série de six épisodes avant que des mecs avec de gros cigares lui rient au nez)
Au final, le projet termina dans les pattes de ce gros benêt de Zack Snyder.
Youpi.
Alors que DelToro, Raimi ou encore Burton (pour ne citer que les plus talentueux) se cassaient un minimum le cul pour adapter des comic books sur grand écran, Snyder, lui, nous refait le même coup qu'avec 300. A savoir "je prends le comics sur mes genoux et je filme exactement la même chose, comme ça au moins, on pourra pas dire que je suis pas fidèle à l'œuvre originale lol" oubliant au passage que BD et cinéma, eh ben c'est pas la même chose (si, si, je vous jure, les codes ne sont pas les même et tenter de faire un copier/coller, ça revient à faire un enfant à sa sœur, en gros: donner vie à un gros truc difforme et franchement bête)
C'est ainsi qu'on se retrouve avec des acteurs transparents (sauf pour Crudup et Haley, plutôt bons) qui débitent leur texte comme s'ils nous lisaient l'horoscope de la veille, qu'on assiste à une succession de scènes qui vont du ridicule absolu (le Hibou et le Spectre Soyeux qui se frottent sur le Hallelujah de Leonard Cohen, un grand moment) au WTF le plus total (le Hibou et le Spectre Soyeux, encore eux, qui se retrouvent au restaurant sur fond de 99 Luftbaloons... je cherche encore à comprendre) ou qu'on assiste, au final, à un film aussi chiant à regarder qu'un combat de cailloux, Snyder faisant bien attention à ne pas insuffler de rythme à son film, à ne pas impliquer le spectateur face aux événements qui se déroulent devant ses yeux (alors qu'il est juste question de l'Apocalypse, hein, rien de plus) et encore moins à donner une quelconque profondeur à ses personnages "parce que bon, oh, merde, hein, ce sont des super-héros, du moment qu'ils se battent au ralenti et que ça claque, le reste on s'en branle un peu lol."
Bref, dans la forme le Watchmen de Snyder est certes fidèle au Watchmen de Moore et Gibbons (et il est fort probable que ceux qui avaient déjà hurlé au génie devant 300 trouvent ça "trop génial, c'est la BD mais en live xD") mais dans le fond, on ne peut s'empêcher de penser que tout ceci ressemble plus à une grosse branlette pour geek qu'à un film...
Et puis à quoi bon ?
A quoi bon s'infliger ce truc sans âme et totalement vain quand on peut se rendre chez son libraire et (re)découvrir l'un des bouquins les plus marquants de ces trente dernières années ?
Hein, je vous le demande ?