Pile un an après l’élection de Donald Trump, Jean-Baptiste Thoret sort en salle un documentaire pour le moins particulier, sur forme de road-movie partant sur les routes de la contre-culture américaine, avec pour dessein d’exposer une filiation entre les 60’s et l’ère Trump, tout en parlant cinéma. Plongée dans les profondeurs des Etats-Unis, « We blew it » va filmer l’Amérique profonde, sans circonlocution, et n’hésite pas à mesurer le véritable fossé séparant la classe moyenne des élites côtières. Quitte à rendre son film inutilement long, Thoret écoute et prend le temps de présenter chacun de ses interlocuteurs, donnant à chacun la même valeur, qu’il s’agisse de Bob Makoff, Larry le modeste fermier de Texas, ou Michael Mann. Si le film est frappant de nostalgie, il fait preuve aussi d’une intense mélancolie, et met en exergue une grande variété d’opinions différentes. Affluent les témoignages, les moments de vie, et les anecdotes sur l’histoire américaine et Hollywood. Cependant, il est difficile de saisir la problématique du documentaire, qui parle de tout, mais en restant muet. Thoret cherche à obtenir tous les points de vue tout en offrant des éléments de compréhension sur la situation présente de l’Amérique, posant la question de l’héritage des années 1960 et 1970. Analyser le passé pour comprendre notre monde. Que demande le peuple ? Un peu plus d’opium.
Ce que l’on pourrait reprocher à « We blew it », c’est qu’il semble inadapté à son propre sujet. S’accumulent les longueurs intempestives, la redondance ainsi que l’ambiguïté générale du propos. En contre partie, certains autres témoignages sont plus expéditifs, et notamment ceux des cinéastes, dont Peter Bogdanovich, Jerry Schatzberg, où Tobe Hooper, sans oublier l’impression de déjà-vu revenant souventefois. Nombreux sont les témoignages que l’on pourrait aisément contredire, comme celui de Paul Schrader. Oui, le 7ème art a perdu de sa magie d’autrefois, mais rien qu’en 2017, nombreuses ont été les œuvres qui ont dérangé, provoqué, qu’elles soient qualitative ou pas. Reste que « We blew it » s’avère comme étant un document qui a pour mérite de mettre sur une même ligne tous les points de vue, sans en discriminer ni en juger aucun. Thoret a cette intelligence de penser plutôt que d’accuser, et n’a jamais un ton cynique. C’est peut-être des hommes comme lui qui manquent notre époque. Ce qui mène forcément à une question : Jean-Baptiste Thoret pourrait t-il se présenter à notre prochaine élection présidentielle ? Le valeureux Emmanuel doit-il craindre le preux critique de films qui a réhabilité « Miami Vice » ?
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