Wheels
6.3
Wheels

Film de Tim Gagliardo et Donavon Warren (2014)

J’aime bien me lancer des défis. Et aujourd’hui, je me suis dit « Tiens, si je me matais coup sur coup mon film le mieux noté sur IMDB et mon film le moins bien noté sur IMDB… ». Petit coup d’œil à mon logiciel de filmothèque et quelques instants plus tard les résultats sont là. Mon film le plus mal noté est l’adaptation cinématographique du phénomène des années 80 « Les Crados » (mais ça, on y reviendra dans une prochaine chronique), et le mieux noté est Wheels, un film de 2014 (qui a tourné dans les festivals) mais sorti un peu partout dans le monde en 2017 en VOD. 9.3/10 de moyenne pour un peu plus de 17250 votes, oui, ça claque, même si on sait que les moyennes sur IMDB peuvent parfois s’avérer fantaisistes. Wheels, c’est quoi ? Wheels, c’est l’histoire de deux personnes brisées qui cherchent une raison de vivre, ou de mourir. Mais surtout Wheels, c’était vachement bien.


« Je me suis toujours demandé à quoi la mort ressemblait. Mon nom est Mickey, et je vais vous raconter mon histoire ». C’est avec ses paroles qui déjà donnent le ton que commence Wheels. Mickey est un jeune homme en fauteuil roulant qui tente désespérément de se tuer mais qui n’y arrive pas, soit car quelqu’un est là pour l’en empêcher, soit car le sort en a décidé autrement, et qui cumule les séjours en hôpital psy. Il se dit que si lui n’y arrive pas, quelqu’un le pourra pour lui. C’est ainsi qu’au détour d’un bar, il fait la rencontre de Drake, un sans-abri sans scrupule, arnaqueur, cherche merde, lui aussi en fauteuil roulant. Il y voit l’homme parfait pour l’aider à mettre fin à ses jours en échange de 500$. Une fois de plus, le sort en voudra autrement et ça ne marchera pas. Il cherchait une raison de se suicider, il y aura trouvé une raison de vivre. Une vie certes faite de débauche, alcool, drogue, prostitués, arnaques, larcins, désillusions, qui va l’aider à atténuer son mal-être, l’aider à faire le point sur sa vie, l’aider rebondir.
Wheels est un drame social assez sombre, mâtiné de comédie noire. L’histoire de deux destins détruits mais surtout de deux personnages très touchants. Tantôt attachants, tantôt énervants, Mickey et Drake ont un train de vie autodestructeur, sans doute pour se sentir plus vivants dans une vie où tout va mal. L’histoire de deux gars capables de tout pour se procurer de l’argent et s’évader dans la drogue qui atténue, même temporairement, leurs souffrances, et qui nous est contée de manière parfois cinglante, parfois coup de poing, souvent étonnante et peu commune.


Donavon Warren (quelques courts à son actif) et Tim Gagliardo (dont c’est le premier film) ont cru à leur film jusqu’au bout. Donavon Warren a mis 14 ans à écrire le scénario, s’inspirant de sa propre dépression. 14 ans à essayer donner de son énergie pour le mettre en boite, n’hésitant pas à perdre, façon Christian Bale dans The Machinist, 23 kilos pour les besoins de la 2ème partie du film, à tester des médicaments pour des laboratoires pharmaceutiques afin d’avoir un peu plus de budget. L’autre acteur principal, Patrick Hume (des apparitions dans pas mal de séries TV) a lui aussi donné de sa personne, allant même jusqu’à s’arracher réellement deux ongles et entretenir sa saleté pour jouer son rôle de sans abri. Tous les deux ont passé énormément de temps dans les rues et les basfonds de Hollywood Boulevard afin de s’imprégner de cette ambiance parfois crasseuse. Patrick Hume a même été arrêté et questionné par la Police lors du tournage tellement il était convaincant dans son rôle de drogué. Il crève d’ailleurs l’écran à chacune de ses scènes et de manière générale, la direction d’acteur est une réussite totale.


Les deux réalisateurs arrivent avec leur petit budget à pondre une œuvre assez unique. La mise en scène est sobre, pure, et assure un cadrage et des plans exemplaires. Le côté sombre du scénario est accentué par des couleurs et des filtres ternes qui nous envoient directement dans le désespoir des protagonistes. Les flashbacks très présents sont bien amenés et appuient encore plus le « présent » déjà bien triste en soi. Pas « triste » dans le sens où on essaie de nous tirer une larmichette, mais « triste » plutôt dans le destin tragique de nos deux héros. Wheels est un film sombre, nihiliste, avec des moments très durs (la scène du bain), mais qui pourtant ne tombe jamais dans le pathos larmoyant grâce à un humour qui fait souvent mouche. Oui, il est possible de rire devant cette histoire d’handicapés moteurs alcooliques, drogués et sans abri, ce film nous le prouve. On est dans le cynisme, l’humour noir, voire l’ironie, dans des scènes souvent surréalistes, mais ô combien réjouissantes qui permettent à ce drame de dégager une aura très particulière et surtout une grande puissance. Celle des grands films tout simplement.


A la fois drame nihiliste, comédie noire, thriller et même film social, Wheels est une œuvre unique. Superbement écrit, magnifiquement interprété, il nous fait passer par toutes les émotions. Un film d’une rare justesse à voir absolument.


Critique originale : ICI

cherycok
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le 21 mars 2019

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