Le marcheur prend le contre-pied de nos modes de vie hâtifs en se déplaçant extrêmement lentement. Autour de lui tout le monde marche vite, trop vite, mais le marcheur s'en moque. Lui, il marche à deux à l'heure pieds nus au milieu de la foule, dans son kāṣāya rouge. Seule sa quête compte, ce qui l'entour n'est que superflu. Tsai Ming-Liang nous incite ainsi à prendre notre temps et à nous recentrer sur l'essentiel mais utilise aussi ce procédé pour affirmer sa démarche qui tranche radicalement avec cette tendance du surdécoupage trop répandue dans le cinéma actuel.
Comme toujours chez Tsai Ming-Liang, la caméra se trouve exactement au meilleur emplacement possible. De sorte que chaque plan se contemple comme une toile de maître.
On s'amusera également à observer les réactions parfois surprenantes des passants. Beaucoup de gens poursuivent leur route, parfois sans même le voir, mais certains s'arrêtent et sourient en croisant le chemin du marcheur. Pour ma part, j'éprouve beaucoup de sympathie pour ces derniers car ils possèdent encore cette belle capacité de s'émerveiller du réel, de prendre ce qui vient à eux plutôt que d'aller chercher ce qui est lointain.
Les 91 minutes du film m'ont semblé durer seulement 20 minutes. Il ne s'est pas passé grand chose mais ce que j'ai ressenti était fort.
Merci Tsai Ming-Liang.