À peine avoir monté un court-montage, le jeune et talentueux cinéaste Damien Chazelle se lance directement à la réalisation d’un long-métrage pour son deuxième projet cinématographique, avec exactement le même scénario que celui de son court-métrage, celui qui anime une sorte de faux face-à-face entre un étudiant ambitieux et pratiquant la batterie et un enseignant extrêmement sévère. Ce n’est pas une histoire qu’il a choisie au hasard, il ne fait que raconter ce qu’il a vécu réellement pendant une partie de sa jeunesse, en se basant sur l’enseignement qu’il a reçu lorsqu’il faisait partie d’un groupe de jazz, avec justement un enseignant qui le motivait à aller le plus loin possible de ses capacités.
Raconter une expérience vécue lors de la réalisation d’une première production est une idée audacieuse et maligne, on maîtrise son scénario et on sait quels sont les moments les plus intenses à intégrer dans une production et les choses inutiles à ne pas mettre dans un film. J’imagine que le réalisateur n’avait pas trop de mal à raconter son histoire avec netteté et professionnalisme, il savait sans doute qu’une relation impensable entre un étudiant et un enseignant serait un sujet qui allait capter l’attention d'un bon lot de cinéphiles dans un film, comme cela a dû être le moment ou la chose la plus marquante de son enseignement musical.
Dans ce long-métrage, tout est centré sur le duo des acteurs Miles Teller et J.K Simmons. Le premier, ancien pratiquant de la batterie, se débrouille bien pour exprimer la volonté de réussir et les terribles souffrances que son personnage éprouve. Quant au deuxième, son interprétation est tout simplement et à la fois incroyable et magistrale. J.K Simmons exhibe une vraie gueule de terreur et incarne avec folie un personnage similaire à celui du sergent instructeur Hartman du film Full Metal Jacket mais dans le domaine de la musique. Rien qu’avec ces deux derniers dans le film, on peut trouver un vif intérêt à visionner ce court-métrage, comme on peut voir ce genre de relation et évolution des personnages dans toutes sortes de film ayant le même contexte scénaristique.
Bien que les deux acteurs soient très présents dans le film, je trouve que l’évolution de leurs personnages est un peu tirée par les cheveux, on passe d’une scène à l’autre à une vitesse exagérée, en négligeant tout ce qui constitue une vie d’étudiant comme la famille et l’amour. On voit clairement que le réalisateur voulait tout miser sur les efforts et le travail acharné de l’étudiant, c’est visiblement bien mis en évidence avec les gros plans de saignement, de la transpiration dégoulinant abondamment sur le visage et de la durée des séances d'entraînement.
De plus, le cinéaste ne cesse pas de répéter la même scène d’entraînement en solo, c’est comme si on n’avait pas compris que le personnage souffre pendant la première scène et à force de passer presque les mêmes images pendant le visionnage, cela devient un tantinet répétitif. Je ne sais pas si c’est voulu ou si le réalisateur manquait d’expérience mais c’est un peu maladroit dans l’ensemble ou trop centré sur un élément parmi d’autres qui auraient dû être plus abordés. Cela dit ! Le film n’est pas raté pour autant, on voit que le cinéaste sait tourner ses scènes avec beaucoup d’intensité, il sait rendre fluide chaque mouvement ou action des personnages, en soignant et enchaînant ses plans sans que cela nous gêne.
Étant donné que je ne suis pas un grand fan de la musique jazz, je dois dire que j’ai éprouvé un certain plaisir d’en écouter, c’est rythmé, c’est motivant et ça a du punch. Pas le chef d’œuvre comme je l’ai souvent entendu mais je reconnais que ce film mérite bien ses récompenses. Son côté physiologique et son atmosphère jouissive sont deux éléments qui m’ont bien suffi pour apprécier ce long-métrage et les exigences surhumaines qui sont traitées dans cette production. 7/10
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