Pour son deuxième long-métrage, le réalisateur américain Damien Chazelle a fait très fort ! Totalement méconnu et n’ayant que peu de projets à son actif (le film Guy and Madeline on a Park Bench et les scénarii de Grand Piano et du Dernier Exorcisme 2), le bonhomme a réussi à se faire connaître du milieu et du grand public en cumulant de manière insatiable les passages dans les festivals et autres cérémonies prestigieuses du septième art (dont les Golden Globes et les Oscars). En adaptant sur grand écran son court-métrage Whiplash, le cinéaste aura su se faire un nom, et vu le film dont il est question, c’est tout à fait normal !


Pour ceux qui aimeraient savoir ce qu’est Whiplash avant de le visionner, je leur répondrai qu’il s’agit ni plus ni moins d’un face-à-face sur fond de jazz. Un duel des plus intenses entre un jeune élève au conservatoire de musique désirant plus que tout devenir le meilleur batteur du monde, de l’autre un professeur despotique qui n’hésite pas à malmener ses étudiants pour les pousser jusqu’à leurs derniers retranchements et y trouver la perle rare. Même Black Swan, qui parlait également d’obsession maladive et de combat entre deux personnes, ne lui parvient pas à la cheville sur bien des points et ce malgré une ambiance grandement maîtrisée. Whiplash le doit notamment à un travail d’écriture hors pairs qui parvient à surmonter l’aspect classique, en dressant deux portraits des plus attrayants. Celui de ce jeune adulte prêt à sacrifier sa vie pour son art au point de devenir un véritable petit con prétentieux (la façon dont il se sépare de sa copine donne envie de le baffer sans retenue). Celui de cet enseignant tyrannique prêt à lancer des vannes et des insultes gratuitement si ce n’est par moment des chaises pour motiver ses élèves, jusqu’à leur faire pleurer des litres de sueur et de sang. On en obtient du coup un face-à-face si intense et viscéral que nous ne pouvons que nous extasier devant ce spectacle aussi jouissif (les répliques et actions du professeur) que tendu au possible. Un véritable régal qui captive notre attention de seconde en seconde.


Un constat qui se voit renforcer par la prestation de ses deux têtes d’affiche. Ces dernières n’avaient pourtant pas grand-chose à prouver, étant donné qu’elles ont déjà fait leur preuve ailleurs et que le casting de Whiplash n’est pas vraiment marquant question seconds rôles (le film ne se concentrent que sur eux deux). Mais même là, elles se surpassent. Rien que Miles Teller, découvert dans The Spectacular Now, montre que des blockbusters tels que Footloose (le remake), Divergente et Les 4 Fantastiques (de Josh Trank) sont indignes de son talent de comédien. Ici, il se démène corps et âme (c’est le cas de le dire !) au point de nous faire croire qu’il est le meilleur batteur du moment et de nous faire partager la souffrance physique et morale qu’éprouve son personnage. La palme revenant tout de même à J.K. Simmons, acteur jusque-là habitué aux seconds rôles (J. Jonah Jameson dans la trilogie Spider-Man de Sam Raimi) qui trouve enfin l’occasion d’affirmer à quel point il est talentueux. Autant dire que son Oscar du Meilleur acteur dans un second rôle, il ne l’a pas volé, piquant sans mal la vedette à Miles Teller ! Il est délectable à souhait, devenant presque l’argument principal pour vous lancer dans le visionnage de Whiplash alors que le film possède bien des qualités.


D’ailleurs, l’autre détail marquant du long-métrage qui en fait – n’ayons pas peur des mots – une œuvre inoubliable, c’est également la mise en scène de Damien Chazelle. Alors que d’autres ce seraient contenter de filmer leurs personnages en jouant à fond la carte de la bande originale juste histoire d’accompagner le face-à-face, lui épouse la musicalité à merveille. D’une part, cela renforce le côté viscérale de l’ensemble (jeux de lumière, gros plans sur la sueur et les blessures du personnage principal), de l’autre, cela donne au long-métrage une énergie de tous les diables ainsi que l’envie d’écouter du jazz après l’avoir vu (les musiques du film sont tout simplement géniales). Un dynamisme du feu de Dieu qui nous emporte dans sa spirale infernale sans jamais nous lâcher jusqu’au générique de fin.


Inoubliable. Tout simplement. Un chef-d’œuvre de très grande ampleur. L’un des meilleurs films de ces dernières années. Difficile de faire une autre conclusion que cela alors que le long-métrage en question frôle la perfection même. Si ce n’est de vous ordonner de regarder Whiplash dès que vous avez un moment pour le faire. De vous conseiller de suivre les futurs projets de Damien Chazelle dont La La Land, autre film musical qui réunira Ryan Gosling et Emma Stone. Rien que pour cela, ce dernier vaut déjà le détour !

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le 18 nov. 2015

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