Will Hunting par pierrick_D_

Gerald Lambeau est un prestigieux professeur de mathématiques du MI.T.,le Massachusetts Institute of Technology,situé dans l'université d'Harvard à Cambridge,une banlieue de Boston.Un jour,il s'amuse à soumettre à ses étudiants une équation de haut niveau quasiment impossible à résoudre.C'est affiché dans le couloir de la fac et effectivement personne parmi les élèves ne parvient à en venir à bout.Sauf que pendant la soirée Will Hunting,l'homme de ménage qui nettoie les locaux,règle le problème avec une déconcertante facilité.Le prof découvre l'identité du mystérieux "mathémagicien" et,ahuri par le génie du jeune homme,décide de le prendre en main pour le pousser à évoluer dans le domaine des maths.Ce qui s'avère difficile vu que Will,petit voyou du quartier misérable de Boston Sud,se fout de tout ça et préfère traîner dans les bars avec son inséparable trio de potes et se bastonner avec des bandes rivales.Mais il participe à la bagarre de trop et se voit condamné à de la prison ferme.Lambeau le sort de là mais le garçon est obligé de travailler les maths et de voir régulièrement un psy.La décennie 90 fut pauvre en très bons films mais "Will Hunting" est une franche réussite.Techniquement,c'est correct sans plus,avec une réalisation fonctionnelle de Gus Van Sant,une image moche ,typique du ciné ricain de l'époque,signée du Français Jean-Yves Escoffier,une bonne musique de Danny Elfman et un montage très efficace de l'Italien Pietro Scalia.C'est produit par Miramax,la boîte des frères Bob et Harvey Weinstein,et le scénario est l'oeuvre de deux jeunes acteurs pas encore très connus,Ben Affleck et Matt Damon,qui obtiendront l'Oscar pour ce script et qui tiennent deux des principaux rôles du film.A ce propos,leur partenaire Robin Williams sera lui récompensé de la statuette du meilleur second rôle.Pas étonnant donc que ça se situe à Boston,dont sont originaires Damon et Affleck.L'histoire est celle du parcours initiatique d'un jeune type que tout le monde aime et veut aider alors que lui n'aime personne et rejette les autres.Will va progressivement apprendre à s'ouvrir et accepter les mains qu'on lui tend sous l'influence d'un psychologue aux méthodes atypiques qui conviennent à ce patient rétif.Le gars,sous ses airs bravaches et sa brillance intellectuelle, est au fond resté ce gamin terrifié,cet orphelin maltraité,qui se méfie de tout et de tous,et redoute par-dessus tout d'être de nouveau abandonné.Le processus sera long et compliqué mais la solution viendra au bout du chemin.Car il ne s'agit pas d'un drame plombant,même si c'est souvent sombre,mais plutôt d'un feel good movie,une chose que les Américains maîtrisent parfaitement.Oscillant entre scènes tendues,émouvantes ou dramatiques,le film décrit la dure sortie de traumatisme d'un jeune surdoué mal parti dans la vie qui va petit à petit fendre l'armure pour devenir celui qu'il doit être et surtout découvrir l'amour,celui qu'il doit accepter de donner et encore plus de recevoir.Will est le pivot du film et ses interactions avec les autres personnages sont finement ciselées et font exister chacun avec force.Il y a Gerry,le prof installé et célébré,qui est fasciné par ce don divin que possède Will et que lui,en dépit de son statut et de sa Médaille Fields,n'aura jamais.Il se sent à la fois humilié et admiratif devant ce zonard désinvolte sorti de nulle part et capable de manier les théorèmes les plus ardus sans aucun effort.Pour Gerry les maths c'est sa vie,et il est révolté de voir ce génie gaspiller ses immenses possibilités.Il y a Sean,le psy désespéré depuis la mort de sa femme,un homme à terre mais à l'humanisme bouleversant qui,stimulé par ce patient difficile et se reconnaissant en lui,parviendra à briser ses résistances et apprendra finalement autant de lui qu'il lui aura appris.Il y a encore Skylar,la jolie étudiante qui tombe follement amoureuse d'un Will épris lui aussi mais si effrayé par ses sentiments qu'il rendra l'idylle chaotique.Et puis il y a les trois potes de toujours,Billy,Morgan et surtout Chuck,qui est comme un frère,des compagnons de galère inséparables et sincères qui n'hésiteront pas à encourager leur ami à partir pour accomplir son destin,absolument pas jaloux mais au contraire fiers et heureux de le voir s'extraire de leur environnement minable.La conversation d'après-chantier entre Chuck et Will est à cet égard purement magnifique.Les comédiens sont à la hauteur et portent brillamment leurs personnages,avec en tête un Matt Damon qu'on ne reverra jamais aussi bon.Solaire et lugubre,animal et sophistiqué,il occupe tous les registres et balance avec aisance des dialogues extraordinaires qu'il a lui-même écrits.Son co-auteur Ben Affleck n'est pas en reste dans l'emploi secondaire mais crucial du meilleur ami fidèle,promenant avec classe sa dégaine de beau gosse désabusé.Robin Williams fait le grand show en praticien au bout du rouleau qui retrouve la niaque au contact de son patient,et il n'a pas volé son Oscar.Terriblement humain,alliant extrême vulnérabilité et force tranquille,il fait face de manière poignante aux provocations de cet extra-terrestre de Will.Minnie Driver,à fleur de peau,incarne fantastiquement une petite amie dévouée prête à se mettre en danger pour sauver une relation qu'elle sait évidente mais contrainte de se battre pour deux afin de la préserver.Stellan Skarsgard est d'une imparable justesse en matheux d'élite à la fois excité et vexé d'avoir découvert son maître.Il est surnommé Gerry et son assistant s'appelle Tom.Tom et Gerry,oui.Cole Hauser et Casey Affleck,le frère de Ben,ont des rôles plus modestes mais qu'ils tiennent avec brio,complétant idéalement la bande de copains du héros.Note et critique de films de Gus Van Sant publiées précédemment:"Even cowgirls get the blues"-1.Moyenne:4,5.