Blanc comme le décor, ces longues plaines immaculées de poudreuse, ces étangs recouverts d'une couche de glace trompeuse, ces versants abrupts menant aux neiges dites éternelles. Blanc comme ce paysage dépeuplé - aux deux sens du terme - ces contrées du nord-ouest des États-Unis (Utah, Wyoming) où survivent les derniers représentants de quelques tribus indiennes réduites à l'état de fantômes.
Blancs, comme les "vainqueurs", les dominants loin desquels survivent Arapahos, Cheyennes et autres Shoshones. La réserve de Wind River, où sont toujours regroupés les derniers Indiens de ce coin des Etats-Unis, offre un cadre propice aux histoires criminelles comme d'ailleurs de nombreux polars contemporains - ceux de Tony Hillerman par exemple ou de Graig Johnson. Et de fait, le film s'apparente à un thriller dont il adopte les codes (scène d'ouverture, enquête difficile...) et les personnages. Hélas pour les amateurs du genre, Wind River ne réussit jamais à remplir complètement le cahier des charges. Si l'isolement et l'atmosphère de secret est assez bien rendue, on n’atteint en revanche jamais le niveau de tension espéré. Comme si le réalisateur avait finalement décidé de placer les enjeux ailleurs, justement sur ce constat de la discrimination entre Blancs et peuples autochtones. Il n'y a pas seulement dans ce film le(s) criminel(s) de quelque bord qu'ils soient et la victime mais la cohabitation difficile de deux peuples qui s'ignorent. La fusillade générale entre les fédéraux et les employés de la compagnie pétrolière est ainsi très peu lisible : qui est qui dans cette affaire ? Où sont les bons et qui sont les méchants ? Comme si Taylor Sheridan mettait tous ces Blancs dans le même sac. Et le réalisateur de procéder à cet instant à un petit tour de passe-passe nous permettant de découvrir l'envers du décor : il n'y aura pas de suspense final ni de meurtrier "charismatique".
Blanc enfin comme la pureté. Celle de l'enfance, d'un bonheur non encore endeuillé, celle de la virginité. Le film évoque largement la question de la souffrance, de l'oubli et de la résilience. Face à la pureté, l'abrutissement des hommes, la concupiscence et l'adoration des armes. Là encore, Sheridan semble davantage d'intéresser au fond qu'à la forme et au travers de son histoire instruit une forme de procès. Jusqu'à l’ambiguïté qui caractérise son personnage principal, joué par un Jéremy Renner qui fait le taf mais sans plus, un chasseur qui ne quitte jamais son fusil et qui préfèrera sa propre justice - certes critiquable mais n'est ce pas justement ce que veut montrer Sheridan ? - à celle des tribunaux.
Un tableau particulièrement noir.
Personnages / interprétation : 7/10
Histoire / Scénario : 7/10
Réalisation / Mise en scène : 8/10
7.5/10