Winnie L'Ourson 2 - Le grand voyage
5.7
Winnie L'Ourson 2 - Le grand voyage

Long-métrage d'animation de Karl Geurs (1997)

Le Retour de Jafar et Aladdin et le Roi des Voleurs ayant été des investissements largement rentables, l'avenir de Disney sur le marché vidéo se dessine avec plusieurs vidéofilms commandés et produits à moindre frais tels qu'un Special Christmas pour La Belle et la Bête, des suites à Pocahontas, Une Légende Indienne et Le Roi Lion et un nouveau long-métrage Winnie l'Ourson, 20 ans après la sortie en salles de ses premières aventures.


Pas si surprenant de voir l'ours en peluche être autant désiré par Walt Disney Television Animation, sa sympathique série à succès, Les Nouvelles Aventures de Winnie l'Ourson, s'étant arrêtée en 1991 et ses vidéocassettes continuant à cartonner auprès du jeune public. Le personnage affiche une longévité impressionnante qui n'a pas à rougir face à un certain Mickey Mouse et, à défaut de le faire revenir au cinéma, il pourra poursuivre durablement sa carrière sur le petit écran.


Plus étonnante par contre est la direction prise par Winnie l'Ourson 2 : Le Grand Voyage qui tranche radicalement avec ce à quoi la licence nous avait habitué. S'il se rapproche visuellement et rythmiquement de la série télé de 1988, il casse bon nombre de codes narratifs et est encore à ce jour la seule suite DTV Disney plus sombre que le film d'origine.


À partir d'une seule histoire quasi-entièrement originale s'étendant sur 70 minutes et ne comptant aucune intrigue secondaire, ce deuxième opus va aimer se connecter à la scène finale de son aîné en s'ouvrant et en se finissant sur un échange entre Winnie et Jean-Christophe, le lien entre le petit garçon et son meilleur ami devenant le coeur du récit. Ces discussions reprendront les dernières paroles entendues en 1977 et ajouteront le célèbre texte d'Alan Alexander Milne "You're braver than you believe and stronger than you seem and smarter than you think.", comme une façon d'affirmer sa légitimité à la fois en tant qu'adaptation et en tant que suite.


Si le narrateur (joué par David Warner) est conservé, le visionnage qui, à l'origine, se veut fidèle à la lecture d'un livre en tournant les pages est abandonné et remplacé par des cuts brusques suivis d'un écran noir, il est interdit de briser le quatrième mur dans ce scénario qui va se prendre plus au sérieux. Même le Winnie The Pooh (Song) écrit par les Frères Sherman est absent. Même constat pour des personnages comme Maman et Petit Gourou ou Grignotin. La mélancolie englobe les habitants de la Forêt des Rêves Bleus, la photographie opte adéquatement pour le gris et l'orange comme teintes dominantes pour faire ressentir le caractère maussade de la période et les couleurs sont assombries.


On s'éloigne donc de la formule classique d'un Winnie l'Ourson avec des personnages régulièrement perdus ou déprimés, un décor menaçant et aucun renfort qui soit externe à l'histoire. Le parti-pris est si inattendu qu'il rend curieux le spectateur quant à la tournure du script. Le film parvient à être neuf sans trahir son matériau de base, reprenant un style humoristique similaire (le twist qui n'en est pas un, uniquement en VO; une carte qui mène à la fois partout et nulle part) et réutilisant le concept de l'ennemi imaginaire et des faux-semblants avec une excellente idée de mise en scène, les environnements visités par notre groupe qui sont en fait les mêmes paysages que lors de l'introduction, mais vus et transformés par le regard effrayé de la bande (le grand arbre mettant la puce à l'oreille).


La réalisation est malheureusement plus limitée, déjà à cause d'un montage trop télévisuel comme évoqué plus haut mais aussi par la faute d'un étrange aplatissement des personnages, les rendant plus petits et légèrement plus enflés sur la majorité des plans. La bande-originale n'est pas non plus à la hauteur de la franchise. Si le boulot de Carl Johnson est convenable, les chansons de Michael Abbott et Sarah Weeks ont bien du mal à nous maintenir éveillés, manquant d'airs à retenir et d'énergie alors qu'elles auraient pu contrebalancer la linéarité du périple. À l'inverse, le voice acting est excellent et nous fait profiter une dernière fois de Paul Winchell en Tigrou avant son remplacement définitif par Jim Cummings.


Mais quelque chose retient l'attention dans ce dessin animé, cette solitude apparente des animaux en peluche, leur incompréhension face à leur destination, le fait de les suivre pour la première fois pendant tout un voyage sans pouvoir leur apporter notre aide, et cette volonté d'appuyer le message des Aventures de Winnie l'Ourson sur l'enfant qui commence lentement à dire au revoir à ses compagnons de jeunesse dans un monde de rêves qui perd de son éclat.


Cas à part parmi les suites Disney, Winnie l'Ourson 2 : Le Grand Voyage est une proposition déroutante pour son public-cible, faisant tout le contraire de ce qu'on attend de lui, mais étant intéressant dans la manière dont il se démarque de son prédécesseur. Sa petite prise de risques divisera la critique en 1997 pour ensuite trouver de nombreux défenseurs, prêts à faire reconnaître ses qualités pour un simple Disney Video Premiere.

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le 10 avr. 2019

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Walter-Mouse

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