Avec Wodaabe, Herzog réalise sûrement à la fois l'un de ses films mimant le plus une forme de classicisme, et en même temps l'un de ses films les plus conceptuels.
Wodaabe est un documentaire tel qu'on l'entend souvent : voix-off, immersion, descriptions, entretiens.
Cependant Herzog ajoute quelque chose du cinéma : la musique classique européenne. Le fait de voir ces peuples sur de la musique baroque en choquera sûrement quelques uns.
Pourtant si l'on prête attention, et que l'on se rend compte qu'Herzog ne s'en sert que quand la caméra se met à rêver de loin du peuple, le voyant dans des mirages flous sur l'horizon, ou à la fin tentant de le suivre mais se réduisant à un spectacle de bouts de bois, le propos en est bien plus beau et humble, et relève justement d'une sorte de dialogue tenté.
Cette musique classique c'est l'image qu'il reste d'eux pour nous, et pour Herzog bien sûr qui transmet ainsi ici un beau témoignage d'humilité (en sachant tout à fait s'immerger parmi eux et laisser leurs silences parler, mais aussi en sachant que cette culture lui échappera).
Véritable constat simple d'anthropologue mais sublimé par l'art de bien placer les musiques sur les bons plans, Herzog crée quelque chose d'aussi mélancolique que ces femmes de la tribu qui doivent choisir les hommes les plus expressifs et en quelque sorte faux, car beau par leur culture dit des le début Herzog.
À la fin on s'approche du regard d'une femme, elle nous regarde : nous étions, en tant qu'oeuvre, bien plus artificiel que ces hommes, mais elle ne nous a pas choisi.
Cette femme semblera l'artiste qui choisit ses plans de cinéma.
Le beau est déjà parmi eux. Ce sens de ritualiser de manière sacrée le beau, c'est là me semble t il toute la mélancolie dont Herzog se souvient, et qu'il aurait aimé vivre jusqu'au bout.