Il n'y a pas que les griffes qui comptent.
Il faut bien le dire, Wolverine, l’un des mutants les plus populaires de la saga X-Men (si ce n’est pas LE plus populaire), avait subi les exigences des studios pour faire de l’argent. Après un X-Men : l’Affrontement Final, certes spectaculaire, mais peu travaillé, 20th Century Fox nous servait un X-Men Origins : Wolverine encore plus décevant, car surfant sur le passé du personnage pour ne livrer qu’un divertissement à fric sans aucun intérêt ni atout. Dur donc de faire oublier ce cuisant échec avec un second spin-of ! Et pourtant (pour garder les droits, sans doute), les studios s’attèlent ici à un nouvel opus, indépendant (et non une suite) histoire de redonner à Wolverine ses lettres de noblesse et de nous faire patienter jusqu’au prochain X-Men, qui sortira l’année prochaine.
Si le film s’intitule The Wolverine (ne prenons pas le sous-titre de la version française…), c’est bien pour montrer que celui-ci s’intéresse au personnage et à rien d’autre. Que le film n’a pas grand-chose à voir avec la saga X-Men (sauf pour la relation entre Logan et Jean Grey et une séquence post-générique qui prépare le terrain à X-Men : Days of the Future Past). Et au lieu de ressasser encore une fois le passé (trop) connu de Wolverine, le scénariste Christophe McQuarrie (à qui l’on doit le script d’Usual Suspects et le film Jack Reacher, ainsi qu’une participation scénaristique sur le 1er X-Men) a eu l’excellente idée de situer l’histoire après les événements du 3ème opus de la saga principale, en adaptant à sa sauce le « voyage » de Logan au Japon (l’un des passages les plus célèbres des comics du personnage) pour mieux travailler ce dernier. Ainsi, nous nous retrouvons avec un Wolverine (qui veut d’ailleurs laisser derrière lui ce pseudo) reclus dans la nature, à l’âme obscurcie par la mort de Jean et son don de guérison qui le rend quasi immortel (le fait de voir mourir les gens qu’il aime alors que lui ne peut ni vieillir ni trépasser). Et qui va partir malgré lui au Japon, « séjour » forcé qui peut lui apporter cette mortalité qu’il désire (par le biais de la demande d’un ancien soldat japonais dont il sauva la vie jadis) mais aussi des notions de respect et de responsabilité liées à la culture des samouraïs, qui lui ouvriront l’esprit. Je n’en dis pas plus (même si c’est déjà fait) pour dire à quel point le personnage de Logan / Wolverine n’a jamais été autant travaillé que dans ce film, tout comme l’ambiance, qui se montre plus sombre et violente malgré une bonne dose d’humour à la Clint Eastwood (certaines réparties).
De plus, le film ne fait pas l’erreur de ses prédécesseurs, à savoir imposer à l’image une surdose de mutants cultes des comics qui n’apparaissent que quelques minutes, juste pour assouvir une promo et un quota de personnages connus. Ce fut le cas d’Angel dans X-Men : l’Affrontement Final, de Gambit, de Deadpool et (inutilement) de Cyclope dans X-Men Origins : Wolverine, et d’Havok dans X-Men : le Commencement (même si ce film reste pour moi le meilleur de toute la saga à l’heure actuelle). Non, ici, il n’y a que Logan qui se met en avant, face à Vipère (dont les pouvoirs venimeux ont été modifiés pour le film), et le côté médium de Yukio. C’est tout ! De quoi se concentrer un peu plus sur Wolverine lui-même !
Et contrairement au 1er spin-of, The Wolverine se montre être très bien interprété ! Au lieu de prendre des acteurs mondialement connus via d’autres productions hollywoodiennes (Liev Schreiber, Taylor Kitsch et Ryan Reynolds), de séries télévisées (Lynn Collins et Dominic Monaghan) et de la musique (will.i.am), le film prend le risque de ne prendre que des acteurs japonais (vu le sujet du film aussi) qui s’en sortent comme il se doit ! Sans oublier Hugh Jackman, qui incarne ici ce cher Wolverine avec conviction pour la 6ème fois (comptons son caméo dans X-Men : le Commencement) en 13 ans (X-Men de Bryan Singer date de 2000, déjà…). Avec la participation de Famke Janssen qui réendosse (ici) la nuisette de Jean Grey et 2 autres « invités » dont je tairai les noms. Pour avoir la réponse, regardez la scène post-générique !
Pourtant, malgré tous ces éloges, The Wolverine se montre frustrant. Donnant l’impression que le film ne sait pas où aller. Est-ce une faute de McQuarrie ou du second scénariste, Mark Bomback (responsable de Die Hard 4, Unstoppable, le remake de Total Recall), engagé pour une réécriture du script (cette hypothèse étant la plus plausible !) ? Quoiqu’il en soit, The Wolverine part sur d’excellentes idées (la première partie est vraiment réussie) pour finalement se perdre dans des scènes d’action ajoutées à l’histoire seulement pour justifier le côté divertissement du projet. Du coup, les bases scénaristiques et enjeux dramatiques (l’histoire et les relations des personnages secondaires) semblent par moment abandonnés en cours de route (comme l’envie de Logan de devenir mortel ou encore les ambitions de Vipère, carrément inexistantes) pour finir par un combat en désaccord avec l’ambiance du film tout entier. Même chose pour la culture japonaise (le hara kiri, les lumières de Tokyo, l’arrière-pays, les coutumes…), importante dans l’histoire et pourtant survolée.
Et puis, troquer Darren Aronofsky (le réalisateur de Requiem for a Dream et de Black Swan ayant quitté le tournage pour des raisons de production) par James Mangold (Walk the Line, le remake 3h10 pour Yuma et… Night and Day…) y est aussi pour quelque chose. Le réalisateur n’ayant pas vraiment de style à lui, notamment lors des séquences d’action. Si l’on éprouve une certaine énergie à les regarder, elles ne se montrent pourtant pas très palpitantes. Sans compter que, même s’ils se montrent meilleurs que pour X-Men Origins : Wolverine, les effets spéciaux ne brillent pas spécialement. Surtout lors de la séquence du train, invraisemblable, avec des décors en cartons de pâtes.
Malgré ces dernières remarques plutôt cinglantes, je reste sur une note plutôt positive envers ce The Wolverine. Car le mutant trouve là un film qui le met en valeur. Non par ses attaques mais pour le personnage qu’il est. Un long-métrage qui montre que l’on peut être un blockbuster, avec un studio hollywoodien à sa tête mais avoir tout de même une histoire à raconter. Au final, je vois The Wolverine comme Equilibrium : un film qui présente un univers (dans notre cas, un personnage) hautement travaillé et intéressant mais qui aurait dû supprimer son statut de divertissement (ses scènes d’actions, en gros !) pour être meilleur que son rendu final.