Composé d'une longue discussion, comme son nom l'indique, de presque deux heures, le film gagne à être relativement court et à ne pas trop se perdre dans ses revendications. Même s'il semble toujours garder un point d'ancrage sur les motivations des femmes et leur choix décisif, un certain égarement est parfois dommageable, et revient à déplacer la conversation sur des sujets moins pertinents à l'avancement de l'intrigue.
Dès le départ, le film surprend par son ton choquant et son rythme particulier. C'est aussi ce qui permet d'arriver à faire douter le spectateur sur beaucoup des certitudes qui déterminent ce type d'histoire. Premièrement, à quelle époque se passe le film? Même si l'on s'en rend compte progressivement, il reste difficile d'assimiler réellement l'époque à laquelle se déroule l'intrigue, tant les crimes commis nous semblent appartenir à un temps désormais révolu. C'est ici que la subtilité du message prend de l'ampleur, l'époque étant très récente, et bien trop par ailleurs, ce drame étant perpétré dans les années 2010...
La mise en scène va dans ce sens, avec une photographie particulière, teintée de gris pour mimer le sombre destin qui va s'abattre quoi qu'il arrive sur ces femmes. Peu importe leur choix, la route sera longue, et leur action ne résoudra pas forcément les choses. C'est ici aussi qu'on retrouve cette pertinence, dans le choix de les faire partir et fuir le danger que représentent les hommes. Ici est pointée du doigt la dure réalité qui subsiste, rien ne semble possible pour remédier à ces problèmes. La corrélation entre mise en scène et intrigue est également retrouvable dans la situation d'enfermement dans laquelle les femmes semblent constamment se trouver, et certains plans utilisés pour entrecouper et rythmer la discussion sont indispensables pour éviter de tomber dans la redondance.
Cependant, à partir du milieu du film, on observe l'apparition de premières failles, pas tellement dans la discussion qui en elle même est pertinente et intéressante, mais davantage dans la répétition d'arguments déjà présentés. Partir, il le faudrait pour certaines raisons. Ne rien faire, pour d'autres. Et se battre, pour mélanger les deux revendications mais aller à l'encontre de leur foi. Finalement, les deux ou trois mêmes femmes s'opposent, et répètent incessamment les mêmes justifications pendant près d'une heure et demie. Le procès décisionnaire semble tourner en rond et trouve paradoxalement une conclusion rapide et finalement peu discutée.
Inspiré d'une histoire vraie, le film gagne en crédibilité, bien que l'on retrouve des caractéristiques bien trop exploitées dans les films désormais estampillés "féministes". Montrer la force et le courage de ces femmes dans ce combat par des phrases symboliques est intéressant, mais tout le monde le savait déjà. De même pour la présence masculine constamment rejetée bien que foncièrement proche des revendications du genre opposé. Parfois, les silences pèsent plus que les mots. Malgré cela, l'argumentaire possède une simplicité qui permet au spectateur de ne pas être trop perdu, et reste encore une fois relativement bien rythmé dans son ensemble.
Women Talking est donc un film pertinent et intéressant, au point de vue évidemment partagé de tous et à la force indéniable. La distribution bien dirigée permet également de donner l'impression d'une discussion prenante et toujours bien construite. Même s'il perd parfois en efficacité par quelques choix répétitifs, il s'agit là d'un film intelligent mais qui aurait certainement gagné à être plus ambitieux...