Posons le dès à présent: Wrong est bien évidemment comique.
Si on y retrouve un recyclage de David Lynch (transparent mais non évident), il se confronte à l'autre grande référence du film en la personne des Monty Python qui y laisse leurs empreintes sur une bonne poignée de gags du film.
Il faut reconnaitre toutefois un humour éclectique comme dans cette scène de la vue subjective.
La surface est agréable, mais elle n'est que surface.
Concevoir Wrong comme un simple "OVNI cinématographique" neuneu et extravagant, est, malgré tout le bien que l'on peut penser de ce niveau de lecture, une erreur dramatique.
Certes, on en savait déjà quelque chose devant Rubber qui mettait en exergue le rapport vicieux du créateur et sa création face aux yeux de l'autre, en piochant chez Beckett et Ionesco.
Mais le discours de Rubber y était clamé à voix haute. Moins évident, celui de Wrong n'en est pourtant que plus ambitieux.
Dupieux sort du cadre cinématographique et raconte la nature humaine.
Plus précisément, l'aliénation.
Aliénation qui fait sourire quand on découvre le personnage de Dolph Springer en quête de son chien Paul, disparu. Son amour, son lien indéfectible pour lui en parait ridicule, quand une livreuse de pizza hystérique se met en tête d'envahir sa maison et son coeur, alors que Dolph ne cherche qu'à communiquer avec son chien.
Aliénation de Dolph avec son travail. Brutalement licencié, il continue pourtant d'y aller chaque jour. Un lieu de travail ou chaque employé téléphone et écrit sous la pluie; à l'exception de la patronne de Dolph, bien entendu.
Doit on s'en sentir prisonnier et tenter de s'en échapper pour devenir libre, comme son voisin Mike qui en vient à renier ce qui le caractérise ?
Master Chang lui vient raviver le lien entre Dolph et son chien. Son passe-temps ? Kidnapper les chiens pour que leurs maitres réalisent leurs importances.
Ce qu'il a en effet, effectué pour Paul, avant que par un accident, celui ci s'échappe.
Venant réparer son erreur en lui livrant les services d'un détective, Chang finit par apprendre a Dolph bien plus.
D'abord, le dialogue. L'écoute de l'autre, sans laquelle Victor et Emma finissent dans la tombe. En apprenant la télépathie, Dolph devient plus proche de son chien qu'il n'a jamais été, alors que paradoxalement, ils n'ont jamais été aussi distants l'un de l'autre.
Enfin, que l'on doit choisir son aliénation. En imposant à Dolph d'avoir en remplacement de son chien, un enfant, Chang lui donne l'occasion de réaliser que c'est de son chien dont il a besoin et non pas d'un humain, ou de son travail pour le remplacer.
Le vrai message de Wrong, il est la: il y'a des choses, des êtres auxquels nous sommes attachés par un lien certainement risible et honteux. Et on se doit de ne pas les mépriser et au contraire de cultiver l'amour et la compréhension que l'on peut avoir pour elles.
Sans cela, à force de se détacher de tout, on finit comme Mike, dans ce final qui évoque par le fond le Brazil de Terry Gilliam: perdu, à avancer sans cesse dans le désert.
Dupieux finit de jouer au bouffon du roi sur cette note étrange, bercée par un ultime morceau de sa bande originale destinée à devenir culte.
On en sort, en se disant que peut être finalement le film manquait de substance.
Qu'importe, ce qu'il dit n'a été que plus brillamment diffusé.