De bonnes idées et de belles images dans ce film australien.
Le fait de prendre comme protagonistes deux prostituées, l'une débutante et l'autre sur le point d'arrêter, donne l'impression d'une réinterprétation en plus d'une féminisation du couple cliché "vieux flic et jeune recrue"... Ce point de départ est plutôt intéressant (mais il se révélera aussi le point faible du message final).
Deuxième qualité du film, liée à la première : la plongée dans le milieu interlope de Sydney. Son quartier rouge semble filmé en caméra caché, comme pour rester au plus près de la réalité, en utilisant la rue et sa population plutôt que des figurants. Certaines images sont crues, les recoins sont glauques, le lieu est parfait pour un thriller. Mais finalement, ce décor sera aussi, paradoxalement, l'un des points faibles du film.
Pour ce qui est du scénario, rien de très original : les deux prostituées sont témoins d'un meurtre et se retrouvent poursuivies par le tueur. Mais il pouvait donner lieu à un survival palpitant, surtout du fait de la nature des héroïnes. Pour une fois, la prostituée n'est pas le personnage secondaire !
Ainsi, certaines scènes sont surprenantes, séduisantes, plutôt bien maîtrisées. Mais l'immense défaut du scénario se trouve dans le manque de liant entre ces scènes.
Le film ne tient que grâce à d'énormes raccourcis qui sont parfois tellement improbables qu'on pourrait avoir le sentiment d'être dans du Benny Hill. Peu importe où l'on tourne, on tombe sur les mêmes personnes. Retrouver quelqu'un dans Sydney, sans aucune adresse, ne semble pas plus dur, dans ce film, que de retrouver quelqu'un dans un 4 pièces parmi une cinquantaine de personnes. Il faut peut-être quelques minutes, mais guère plus.
Bien entendu, tout le monde se connaît.
Ces énormes facilités scénaristiques pourraient énerver. Surtout lorsque l'on prend deux minutes pour réfléchir et que l'on se dit : mais pourquoi ne décident-elles pas de prendre le métro (par exemple), et de descendre tout simplement 10 arrêts plus loin... Et voilà, le film est réglé en 30 minutes...
La sensation que le film avance sur des rails est donc assez désagréable, surtout en comparaison de l'atmosphère originale de l'ensemble. Le fait que l'arc scénaristique des deux personnages serve en plus à valider un cliché moralisateur éculé n'arrange pas les choses, avec rédemption d'une part et leçon de vie d'autre part. Point de salut pour méchants et gens de petite vertu.
Enfin... on nous annonce quelque chose de sombre, sans doute sans concession, mais on nous offre le méchant le plus comique malgré lui de ses dernières années. Le gars est un poissard pas possible, il se fait tabasser, briser les couilles (littéralement), enfoncer le crâne par une valise de manière répétée, écraser par une voiture, tirer dessus... et il s'en sort presque à chaque fois. Et à chaque fois, son visage est un peu plus abîmé et son costume un peu plus déchiré. Mais il revient et il en veut. On aurait envie de rire si les deux héroïnes ne restaient pas sérieuses comme des papesses durant tout ce temps.
Faux-spoiler dessous sur le destin du méchant :
Bon, que l'on se rassure, il meurt quand même à la fin... ouf !
Je ne pense pas que ce soit un spoiler puisque si l'on prend un minimum de recul pendant le film, on se rend compte qu'il a lui-même déclenché le compte à rebours en déclamant face caméra qu'il déteste les femmes... on ne peut pas survivre après de telles déclarations.
Au final, c'est un film qui se laisse voir. La photo est plutôt correcte, les lieux sont inspirants, les actrices relativement convaincantes, mais il ne faut surtout pas s'attendre à quelque chose d'excellent. Il fut une époque où on aurait pu le regarder en deuxième partie de soirée le dimanche soir sur TF1, lors de ces fameuses "Hollywood Nights".