Fausses divinités
Avec Apocalypse, Singer décide d’invoquer Apocalypse (tout simplement), de retour dans notre monde après plusieurs siècles d’hibernation, et prêt à en découdre avec l’aide de ses cavaliers, qu’il...
le 18 mai 2016
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X-Men Apocalypse, où comment perdre le muscle au profit du gras!
Nous voilà en mai 2016 et le 4 éme Opus de la licence X-Men réalisé par Bryan Singer arrive sur nos écrans! On apprends donc dans ce film qu’un mutant à existé il y a 40 siècles en Égypte et que celui ci était considéré comme un dieu. Le film parle ( essaie ?) de son retour dans les années 80 et de l’impact ( ou pas ? ) qu’il aura sur cette société. Seuls une Mystique ( Jennifer Lawrence) ayant perdu ses illusions, un Magnéto ( Michael Fassbender ) rangé des voitures, un Xavier ( James Mac Avoy ) plus prof que jamais et de jeunes mutants ont le pouvoir de renverser cet/te Apocalypse (Oscar Isaacs ), vont-il y arriver malgré leurs différences ( je confirme, on a vu ce pitch au moins… 500 fois )? . On reste dans le plus pur style super héros, action teintée de mélodrame, mais on sent que le succès des films Marvel et la déroute du dernier film des 4 ( pas ) Fantastiques ( du tout ) a calmé les ardeurs niveau originalité.
Donc retour aux costumes de super slip, couleurs criardes et premier degré total. Est-ce un choix de Singer? Du studio? Aucune idée. De toutes façons, pour moi, la réussite la plus éclatante dans la saga X-Men par Singer, fut sa capacité à créer de l’empathie, de l’émotion autour de la grande question qu’est le rejet et la violence qui en découle. C’est évidemment en résonance avec le comics, mais c’est surtout une thématique très intéressante à utiliser dans le cadre d’un film de genre, permettant l’allégorie a plusieurs niveau et donc la réflexion et le questionnement, là ou la simple adaptation d’un fait réel grave tombe trop souvent dans la spécialisation, le pathos et l’instantanéité. Pour les X-Men de Singer, on peut tout autant voir un film d’action dans lequel les personnages se découvrent face a un adversaire, autant qu’une affirmation de soi et de comment on se débrouille avec ses différences. Et Singer l’a très bien réussi dans les 2 premiers X-Men. On sent donc y compris dans ce dernier film, a quel point cet univers et ses personnages lui importent. Et gloire lui en soit donné!
Malheureusement, ce souffle est complètement annulé par le choc frontal formel avec les recettes à la Marvel Films. La compagnie aux 5000 super héros a licence, a choisi de mettre en valeur l’univers en lui même et ses personnages phares et le fait très bien d’ailleurs, en choisissant ou ordonnant aux concepteurs des choix de réalisation et de thématiques sans risque. Peu de différences entre la dizaine de films Marvel niveau réal, aucun thème fort n’est vraiment questionné sérieusement. Cette homogénéité, rend l’ensemble fort pratique pour gagner du temps en compréhension pour le spectateur, en effet, a chaque film Marvel, aucun dépaysement réel, on reste dans les marques, reste a savoir si on avance bien dans l’univers, si on découvre de nouveaux persos ou comment ils sont respectés ou non. Rien de plus. Ce qui n’a donc rien à voir avec l’essence de la saga X-Men, qui est complètement centrée sur sa thématique sociale. Et forcément, ce dernier Opus en pâtit complètement.
Le cul entre deux cinémas ?
Rentrons donc dans le ventre de la bête fatiguée avec la réalisation. Elle est honnête et sans fulgurance ( un peu a la Marvel justement ), bon point pour l’intro, Singer réussi toujours ses intros, suffit de voir les autres films de la franchise, les enjeux, ainsi que l’univers sont souvent correctement posés a ce moment là. La mise en valeur des « acteurs phares » et l émotion reste pour moi le gros point fort du réal ( bien que pour moi, ça fasse souvent too much en bon cynique que je suis ) dans chacune de ses œuvres, y compris celle ci. Elle pèche par contre a de nombreuses reprises, notamment quand le réal cherche a faire des démarquages de ses propres réussites passées; type la scène au ralenti de Vif Argent, bien trop proche de l’originale en termes de dispositif pour nous marquer aussi fortement. C’est d’ailleurs sur des points de ce genre qu’on remarque à contrario la force du réal de First Class, aucun des écueils évoqués ne sont présents, Matthew Vaughn maîtrise les codes, les compos, le rythme et l’originalité qu’une oeuvre pop devrait contenir en son sein a merveille et sans ruptures ( je vous invite à remater Kingsman pour comprendre ce que je veux dire).
Ainsi, plusieurs scènes du film pâtissent du syndrome » je fais parler mes persos pour expliquer l’avancée de l’intrigue » alors que de simples appuis visuels auraient suffit et surtout auraient aidé à pousser un lyrisme plus qu’attendu pour ce type de thématique qu’est le rejet, la persévérance, la quête de l’acceptation personnelle. Evidemment, le peu de séquences vraiment réussies perdent en impact, genre la rencontre d’Angel, Diablo et Mystique qui est pourtant complètement signifiante de la situation des mutants, symbolique concernant le diable contre l’ange, leur dangerosité, mais aussi la violence et la peur des homo sapiens. Pareil avec le bonus fan service de Wolvie, ou à part le fait que ce qu’il se passe est cool, on a aucune mise en valeur ou en perspective de la séquence, je n’ose rêver ce qu’un spécialiste du genre horrifique a la Carpenter nous aurait fait en matière de claustrophobie/ambiance/composition pour rendre l’apparition du bonhomme logique et effrayante!
Plus sympathique pour la variété des décors tout de même, on bouge un peu partout sur le globe, ce qui reste dépaysant! La tonalité aussi d’ailleurs, le film reste très violent dans sa description des rapports humains. Il suffit de remplacer les mutants par des gays, des femmes, des noirs et beaucoup de séquences deviennent proprement dégueulasses, là on est de retour dans la crudité mythifiée de Singer. Ca fait souvent sont petit effet, les voisins découvrant que leur collègue est un mutant, les jeux du cirque, les états qui créent une politique autour de ça. Malheureusement, contrairement aux premiers, cette ambiance est complètement décousue de l’intrigue de base. Un peu comme la problématique de Civil War et la dangerosité des super-slips face aux maternelles qui choisissent le camp de leur copain parce qu’il est plus sympa que les autres… Dommage.
L’art de passer a coté de la cible !
Le scénario justement, alors là, c’est la déroute complète… C’est l’histoire d’un gros méchant qui se réveille et veut changer le monde, à nos clampins mal aimés de le sauver et tout ça dans les années 80… Bon, pourquoi pas… Mais alors, en quoi cette histoire avait sa meilleure place dans ce contexte ? En quoi, ce contexte met en valeur les antagonismes ? En quoi, un mutant millénaire et invincible est parlant de cette époque ??? Aucune idée, le film n’en parle pas… Sur Firts class, le contexte était complètement inclus dans la thématique du film. Le rideau de fer ( deux idéologies, comme Xavier et Magneto ), l’escalade des armes ( la sortie au grand jour des mutants ), l affirmation des minorités ( pareil concernant Erik et le prof, mais les mutants en général). Et un final qui rejoint l’histoire réelle.
Ici, quel rapport entre la loi du plus fort et les années 80, pour être plus précis, ou est ce que le scénar prends dans son corps cette problématique ? Il y avait tant à faire, les états qui se battent a coup d’idéologie sur des territoires plus petit, un Apocalypse se comportant de la même manière par exemple, en influençant directement chacun de ces états. Pareil, les années 80 sont les années fric, la financiarisation à l’extrême, un Apocalypse a tout a fait sa place la dedans il n’est finalement que l’avatar évolutionniste du personnage du Loup de Wall-Street, le plus riche est celui qui est « le plus fort » dans ce contexte. Enfin, la diversité de genres, musicaux, médias, minorités, qu’en pense le bon vieil Apopo ??? Eh ben on en sait que dalle et c’est vraiment dommage…
Le concept lui même en devient caduque, la trame de l’histoire aurait été en tout point la même aujourd’hui… C’est comme aller du point A au point B en faisant un détour qui ne nous apporte rien d’autre que de la perte de temps ( et je déteste perdre mon temps moi)… Dommage encore.
Culture de la victimisation te revoilà!
Enfin, la technique utilisée pour redonner une empathie forte pour que Magnéto ait une explication toute trouvée a son retour chez les méchants…Je ne perdrais même pas le temps la dessus, tellement ça parle de soi même… Tout le gris du personnage est perdu par la sacro-sainte « emotionalisation » à outrance de la société moderne. En gros, Quel que soit ce que tu fais, si tu nous a fait pleurer en expliquant pourquoi t’as fait ça, on t’autorise tous les errements, on te comprend mon pauvre…
De l’art de l’image…
De manière générale, les sfx sont dans la moyenne, mais extrêmement mal mis en valeur ( comme dans la plupart des Singer d’ailleurs ). Ni par la réal, ni par la lumière, alors que plusieurs effets sont très réussis, notamment l’aura magnétique d’Erik en fin de film. Revoyez la séquence de combat sur le métro aérien entre Octopus et Spidey, dans Spiderman 2, les effets en eux mêmes sont parfois moyen, mais la mise en scène, la photo, la composition et l’originalité sont parfaites! Mais n’est pas Sam Raimi qui veut!
Arrive le problème des costumes… Je ne peux pas dire qu’il sont nuls, mais c’est pareil qu’avec les sfx, aucune réelle cohérence entre leur confection, les gens qui les portent, la manière dont on les met en scène et en lumière… En soi, je ne les trouve pas pourris, mais un exemple, vif argent, porte des vêtements métallisés, ça leur aurait arraché le cerveau d’essayer de jouer à exagérer sa brillance dans l’action ??? On est dans du super slip ici merde, le bouclier de Captain, l’armure chromée de tête de fer ont eu droit a leur moment de brillance, de pure esthétisme et de signifiant, quand on utilise cet effet comme point d’exclamation visuel ou marque une renaissance ou un changement psychologique du perso. C’est vraiment dommage, le costume de super héros fait partie intégrante du genre et ce n’est pas pour rien que seuls certains dessinateurs ont su créer des costumes immortels. Ils doivent être une « logotisation » du personnage, un résumé de ce qu’il est de manière aussi concise que maximaliste. C’est un savoir faire a part entière. Pour Apocalypse, c’est pas qu’il est mal fait, mais comme dit pour les costumes en général, et sur la trame aussi, le perso est tellement esquissé, que je suis a peu près certains que les costumiers sont restés sur le fait que c’est un méchant surpuissant ayant vécu en Egypte il y a longtemps… On ne pouvait pas faire grand chose de plus avec une base aussi basique et peu claire.
Quand je pense aux mille et une manière qu’on aurait pu utiliser pour valoriser tout ça, ça m’ébaubi complètement! On aurait pu accentuer l’imagerie MTV des années 80, les superpositions de vêtements post punk… Tellement de choses en fait, de ce point de vue, c’est d’une pauvreté crasse ( après, ça n’a jamais été le point fort de Singer, mais tout de même …).
Début de la fin, ou fin tout court?
Malgré tout, on sent un cœur qui bat la dessous! On sent encore une fois l’âme de Singer, présente dans tous ses films, cette sensibilité, cet engagement. La Tornade est très réussie picturalement, son personnage est peu développé mais sa prestance suffit a tout dire d’elle, de même pour Psylocke ou Caliban d’ailleurs!
Beaucoup l’ont comparé a X-Men 3, ce qui se comprend aisément vu la structure scénaristique et la faible homogénéité de la direction artistique et thématique. Mais il reste une très grosse différence, X-Men 3 ne démontre a aucun moment l’amour du réalisateur pour ses personnages. Ce qui est complètement différent avec Singer et son rapport aux X-Men, il suffit de regarder la perpétuelle mise au milieu des relations du Fauve, pourtant pas un personnage majeur et qui fait doublon avec beaucoup d’autres. Il aime ce perso, c’est tout, rien de rationnel la dedans, là ou dans X-Men 3 il fallait un généticien, là on a un être imparfait, cherchant son propre chemin entre l’amour, l’amitié et la logique et la technique. Singer en somme!
J’espère sincèrement que Singer saura se poser les bonnes questions pour le prochain opus, au risque de se perdre complètement dans une recette ou il a tout a perdre! Il reste l’un des rares réalisateurs américains a gros budget qui conserve un talent et une patte personnelle, qu’il se fasse plus confiance ne ferait pas de mal a mon avis!
3/6.
Créée
le 26 juil. 2016
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