« My whole life I felt like an animal. » WOLVERINE

En 2006, après avoir réalisé une première trilogie consacrée aux mutants, la 20th Century Fox souhaite capitaliser dessus. Elle a d'ailleurs intérêt à le faire puisqu'elle détient les droits d'exploitations cinématographiques des personnages et qu'en cas de mise en jachère de la licence, ils retourneront obligatoirement chez la maison mère, MARVEL. Elle n'a toutefois pas besoin de cette épée de Damocles juridique pour se convaincre de mettre en production des films tant les succès économiques et critiques des opus précédents sont impressionnants.

La Fox a donc un projet. Réaliser toute une série de spin-off, des films dérivés, se basant sur l'origine des personnages les plus emblématiques de la trilogie. Deux candidats sortent alors du lot : Wolverine et Magnéto. Le premier a, il est vrai, toujours été mis en avant dans les films X-men, au point d'en devenir le personnage principal. Le second, quant à lui, est un méchant complexe au passé intéressant et évitant le manichéisme. La Fox souhaite de la sorte lancer une nouvelle franchise : X-men Origins qui se déclinerait en fonction des personnages.

La Fox lance donc la production de X-men Origins : Wolverine avec Hugh Jackman, interprète de Wolverine dans la trilogie X-men, à la tête des opérations. L’écriture de son scénario est effectué par David Benioff. L'auteur décide très vite de suivre une approche plus violente que celle des films X-men. Il écrit ainsi son script dans l'optique d'un film R Rated, une classification qui lui offre une plus grande liberté de ton. Mais voilà, la Fox ne l'entend pas de cette oreille et n'envisage pas de se priver de la tranche des adolescents en salle. Le scénario est donc remanié manu militari par Skip Woods qui l'édulcore pour rendre le film bien plus familial.

Concernant le réalisateur, le studio a plusieurs noms en tête : Bryan Singer évidemment, qui souhaite d'ailleurs revenir dans la franchise, mais aussi Alexandre Aja ou Len Wiseman. Mais c’est après avoir découvert Tsotsi, lauréat de l'Oscar du Meilleur Film Étranger en 2006, que Hugh Jackman a été convaincu que Gavin Hood devait devenir le metteur en scène de son film.

X-men Origins : Wolverine sort en 2009 et va gripper toute la belle mécanique des futurs spin-off. Car, à la suite des critiques négatives, le projet concernant Magnéto mutera (en un prequel de la trilogie) tandis que les autres seront purement et simplement annuler.

Pour autant, la prestation de Hugh Jackman n'est pas à mettre en cause. L'acteur est toujours aussi convaincant physiquement dans le rôle. Mais à l'impossible, nul n'est tenu : aussi bonne l'interprétation soit, l'écriture ne suit pas.

Le film est, en effet, paradoxal dans son approche. Constamment, les personnages parlent de l'animosité de Wolverine, de son coté sauvage, de sa brutalité. Et pourtant, cela n'est jamais montré. La faute à un ton volontairement édulcoré pour livrer une œuvre à destination de la famille. Mais voilà, ce qui peut marcher avec certains personnages de comics venus au cinéma ne fonctionnent pas avec tous, et Wolverine est l'exemple même de celui qui mérite mieux qu'une aseptisation poussée à l'extrême. Les scènes de combats, censées montrer la sauvagerie du mutant griffu, sont ici pour la plupart ridicules. Mal chorégraphiées et ne présentant aucun intérêt. Rien de jouissif. A cela s'ajoutent des effets visuels datés dés la sortie du film (les griffes en adamantium de Wolverine bénéficient notamment d'une CGI toute bonnement affreuse). Pour sa première aventure, Wolverine ne présente donc rien de bien intéressant. Aucune scène vraiment marquante. Même sa naissance en arme vivante est ici expédiée en quelques minutes, emportée dans un flot d'ânerie.

Wolverine peine ici à trouver écrin à son charisme bestial. Toute la psychologie de ce caractère binaire, déchiré entre humanité, désir de normalité, et bestialité et envie de vengeance, bute sur des choix narratifs un peu extravagants, comme le résumé hâtif des 150 premières années de sa vie, de la mort de son père aux ridicules scènes de guerre qui se succèdent sans aucun réalisme. La réalisation tape-à-l’œil, construite sur l’effet, manque de subtilité et même de profondeur pour qu’on puisse capter toutes les contradictions de l’homme loup et de ses congénères. La fameuse équipe de mutants que le héros éponyme rejoint, avec son frère Dents de Sabre, au tout début, nous renvoie immédiatement aux productions de Golan / Globus des années 80 pour le côté gros bras lourdingue, typique des action movies de cette époque.

Si Wolverine est à nouveau incarné par Hugh Jackman, Liev Schreiber et Danny Huston succèdent respectivement à Tyler Mane et Brian Cox dans la peau de Dents de Sabre et William Stryker.

Liev Schreiber est l'une des seules bonne nouvelle de ce film. L'acteur arrive en effet à tenir parfaitement tête à Hugh Jackman et s'impose comme une représentation réjouissante du personnage, malgré la déception d'ensemble du film.

Le reste des troupes se révèle en revanche, comme le film en fait, globalement anecdotique. Aucun personnage ne tire, en effet, son épingle du jeu : chacun vient et part avec beaucoup de froideur. Que ce soit Daniel Henney en Agent Zéro, Kevin Durand en Colosse, Lynn Collins en Silver Fox, Will I Am en Kestrel, Dominic Monaghan en Bolt ou même Taylor Kitsch en Gambit ; littéralement aucun des personnages n’est interessant.

Pire encore, Deadpool, un des personnages les plus appréciés et des plus originaux de tout le catalogue MARVEL fait sa première apparition. Malheureusement, le personnage est complètement dénaturé. Deadpool n'y a pas du tout le charme irrévérencieux dont il use et abuse dans les comics. Interprété par Ryan Reynolds, il souffre, comme le reste du film, d'une aseptisation à outrance. Impossible dans un film aussi bien pensant (pour ne pas dire niais) d'espérer une adaptation fidèle d'un personnage tout à la fois psychopathe, violent, psychotique, schizophrène, pervers, mégalomane, complètement imprévisible et très arrogant. Wade Wilson n'est donc ici qu'un pantin utilisé qui perd de sa superbe tout au long de l'opus, avant un final absolument consternant. Les fans ne se priveront d'ailleurs pas de manifester leur mécontentement à la Fox, et le film recevant des critiques assassines à la hauteur de son adaptation honteuse de Deadpool.

Reste quelques caméos qui feront toujours sourire le connaisseur, comme un Cyclope jeune ou le Professeur X, incarné par un Patrick Stewart légèrement rajeuni.

Malgré le potentiel de ses personnages, X-men Origins : Wolverine rate tout ce qu'il entreprend. Derrière sa volonté d'offrir au mutant griffu un passé digne de ce nom, il se perd dans des incohérences laborieuses, en plus de dénaturer honteusement de nombreux héros de la Maison des Idées à commencer, paradoxe suprême, par celui qu'il est censé porter. Wolverine en ressort bien moins intéressant que dans les films qui ne portent pas son nom.

StevenBen
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le 4 juil. 2024

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Steven Benard

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