Ce polar a un peu surpris en 1974, car c'était la première fois que la violence et l'efficacité meurtrière des arts martiaux était montrée à un public occidental, surtout dans un film américain. Le public découvrait ces yakuzas, la mafia japonaise impliquée dans des trafics nombreux de racket, de jeux et de prostitution. En tournant son film au Japon, Sidney Pollack donnait ses lettres de noblesse à ce genre de films qui ensuite déferleront en Amérique et en Europe, mais qui resteront dans le domaine de la série B.
Il est également surprenant de voir Robert Mitchum dans un tel contexte, je me souviens que quand j'avais découvert ce film en VHS dans les années 80, je l'imaginais mal en vengeur acharné sachant manier le katana, mais il y est finalement très crédible et efficace. La description des coutumes liées au code de l'honneur chez ces gangsters nippons est parfois un peu trop démonstrative, Pollack se laissant aller à un folklore exotique un peu trop appuyé, un peu comme le fera Ridley Scott dans Black Rain, polar presque aussi frénétique dans les années 80, mais qu'importe, le film reste très intéressant, possédant une profondeur humaine qui fait de cette histoire d'enlèvement une description troublante de l'honneur et du mal.
C'est un film violent et fort, qui ne manque pas d'une certaine grandeur tragique, avec une intrigue policière plus complexe qu'elle n'en a l'air, tout en faisant découvrir comme je l'ai dit, cette discipline, ces devoirs et ces lois qui régissent ce milieu yakuza. Le fait que 2 des meilleurs scénaristes de l'époque, Paul Schrader et Robert Towne, soient auteurs du script, n'est bien sûr pas étranger à ce ton de parabole morale fixé par le réalisateur, et le combat final, très violent et sanglant pour son époque de réalisation, est un spectaculaire morceau d'anthologie. Mis à part Mitchum, le reste du casting (Brian Keith, Richard Jordan, James Shigeta...) est excellent, notamment Takakura Ken, qu'on retrouvera bien justement plus tard avec un Américain en co-équipier dans Black Rain.