A nos corps dépendants
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Voici quelques jours, je devais expliquer en long, en large et en travers pourquoi, non, je n'avais pas aimé le merveilleux Arrival du non moins fantastique Denis Villeneuve. Et, pour la énième fois, pourquoi non, je ne lui reprochais pas un manque d'originalité, simplement un manque de doigté et de talent (pour ce film en particulier, puisque j'ai adoré Incendies et Prisoners, et beaucoup aimé Sicario).
Your Name arrive à point nommé pour étayer ce propos.
Your Name est mièvre. Il est cliché. Il est même hystérique dans ses dix ou quinze premières minutes, et se permet un humour un peu potache par moment. Et tout cela marche à la perfection.
Je ne sais pas, et c'est ce qui est merveilleux avec l'Art, expliquer ce moment où l'absence d'originalité cesse d'être une tare pour devenir une force, pourquoi nous sommes séduits par l'alchimie, le dosage, la subtilité avec laquelle le narrateur se joue de nos émotions, et nous emporte dans son sillage, telle la traîne d'une comète.
Oui, je suis aussi poète.
Se jouant de plusieurs genres à la fois, excellant dans tous, Makoto Shinkai donne envie de rire et de pleurer, parfois en même temps, et tout simplement de regarder urgemment ses autres films.
Probablement la meilleure histoire d'amour que j'aie vu depuis des Quand Harry rencontre Sally et autres Love Actually. De celles où l'on sait comment elles vont finir, du moins le croit-on, et puis pourquoi la mousse de mon accoudoir est-elle en train de se répandre sur la moquette du cinéma ? Oh pardon monsieur, c'était votre bras ? Tenez, je vous le rends.
Your Name signe aussi le grand retour de la petite fille à couettes qui sommeille en moi. Elle était bien éveillée ce soir, toute de larmes et de rires, c'était assez cool, dans cette salle bondée pour une avant-première à laquelle j'allais sans beaucoup de pression.
On nous présente le 28ème "nouveau Miyazaki", mais oui allez on y croit, et puis on prend un coup de vieux en faisant augmenter la moyenne d'âge de 10 ans dans la salle. Ça part mal. Et puis finalement deux heures plus tard on discute dans le bus qui nous ramène chez nous avec deux gamins qui ont effectivement 12 ans de moins, les fourbes, et qui croient que "dans les années 90 y'avait déjà d'autres moyens de se procurer des films" quand on leur dit que les Miyazaki n'ont pas été diffusés au cinéma avant le succès de Chihiro. Ha ha, tendre naïveté.
Bref, je ne pourrai pas vous en dire beaucoup plus sans spoiler, sinon que vous devriez vraiment aller vers ce chef d'œuvre en connaissant le moins d'éléments possibles (comme finalement presque tous les films, plus je pratique cette méthode plus j'ai de bonnes surprises dans les salles obscures).
C'est esthétiquement superbe, musicalement jouissif, émotionnellement éprouvant mais prenant, on a l'estomac noué et les poings serrés en attendant ce qu'on sait, ou croit savoir, obligé d'arriver, et puis si par chance on a touché juste, c'est quand même trop bon.
C'est drôle, c'est enlevé, c'est frais, c'est émouvant. Un véritable tourbillon, très peu de temps morts, je n'en ai en tout cas ressenti aucun, et pas relevé d'incohérence majeure, ce qui est un véritable tour de force. Les quelques unes qui subsistent sont complètement noyées dans l'océan de génie que constitue cette histoire, simple et primale.
Vous avez trop de la chance de pouvoir le découvrir alors que, pauvre de moi, dans le meilleur des cas je n'aurai que l'occasion de le revoir. Profitez-en, savourez ces moments à leur juste valeur.
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Créée
le 19 déc. 2016
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50 commentaires
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