Café froid

Chaque film d’Hong sang-soo doit être pris avec la plus grande désinvolture, tant le cinéaste adopte inlassablement la même attitude à l’égard de son spectateur. Aussi, à ceux qui appellent à voir dans chacun de ses films « un petit bijou » (Inrocks) ou « une maestria qui confine à la magie » (diantre, Libé) il est de bon ton de passablement s’amuser, sans trop forcer cependant, de crainte d’être taxé de vieux rabat-joie incapable de saisir toute la subtilité des situations que le cinéaste fait mine de décanter dans chacun de ses métrages.

Car on peut légitimement se demander l’attrait d’un tel cinéma qui se veut reflet du réel à tout prix mais qui n’accouche en fin de compte que de la fausseté la plus gauche qui soit. Aucun enjeu et donc nécessairement aucune émotion pour ne serait-ce qu’impliquer a minima le spectateur dans ces dialogues qui sentent bon le pédantisme petit-bourgeois. Pas la moindre magie à même de supporter la très maladroite tentative de donner à l'histoire un tour fantastique ou pseudo-métaphysique. Nul signe de lyrisme ou de poésie dans cette mise en scène d'une aridité délétère où suffoque tout embryon de délicatesse.

La critique européenne a curieusement paré le réalisateur sud-coréen d’une solide armure contre toute voix dissonante en Occident. Il faut aller outre-Atlantique pour chercher des avis plus timorés, comme le brave Simon Abrams, lequel a selon moi parfaitement bien résumé ce Yourself and Yours : « une sorte de fastidieux role-play cassavetien sadomasochiste ». Bien trouvé !