Troisième long-métrage du cinéaste Costa-Gavras et premier de sa trilogie politique (qui comprendra L'aveu et Etat de siège), Z est directement tiré du roman de Vassilis Vassilikos, lui-même inspiré par l'assassinat du député Grigoris Lambrakis à Thessalonique en 1963.
Posant les bases de sa politique-fiction au coeur d'un pays qui ne sera jamais nommé mais que l'on peut très bien imaginer être la Grèce (le film sera tourné en Algérie pour des raisons politiques évidentes), Costa-Gavras déroule, dans ses trois premiers quarts d'heure, une tension implacable et suffocante. Collant au plus près des corps, des visages et de l'action, le cinéaste parvient à retranscrire avec force le climat d'oppression et de violence d'une nation gangrénée par la corruption, s'interrogeant sur l'étrange haine que suscite un discours et des idéaux pourtant pacifistes.
Vient ensuite une longue enquête peut-être moins fascinante car revenant sur des faits que le spectateur connait, auxquels il a déjà assisté, ce qui a pour effet de minimiser le suspense et les différents points de vue recueillis. Une investigation qui permet cependant de mettre à jour toutes les magouilles du régime en place, de la main-mise des autorités et de la manipulation des masses, les puissants liguant comme toujours les classes les plus modestes les unes contre les autres et utilisant les êtres comme de vulgaires pions dans leurs incessants jeux de pouvoir.
Jamais ennuyeux malgré ses deux heures, Z bénéficie bien entendu de la qualité de son interprétation, le casting étant composé notamment de Jean-Louis Trintignant, de Yves Montand, de Charles Denner, de Jacques Perrin, de Jean Bouise ou encore d'Irène Pappas, tous fabuleux. Loin d'être académique, la mise en scène de Costa-Gavras est tout bonnement percutante, proche du documentaire tout en restant purement cinématographique, couplée à un montage pertinent et à une bande originale composée par Mikis Theodorakis, alors prisonnier sous le régime de l'époque.
Bien que le trait puisse paraître un peu gros, Z est un réquisitoire puissant contre toute forme d'oppression, une pièce importante dans le cinéma contestataire, aussi passionnante que nécessaire, dont le final, tombant comme un couperet, nous rappelle que tout cela n'est malheureusement pas que de la fiction, et qu'il y aura toujours une autorité corrompue pour nous baiser la gueule.