Zazie dans le métro par Gérard Rocher La Fête de l'Art

Paris, gare de l'Est, tout le monde descend ! Zazie, une petite gamine d'une dizaine d'année, délurée et livrée à elle même, débarque dans la capitale avec sa mère qui doit retrouver son nouveau copain. Celle-ci confie la garde de Zazie à son oncle Gabriel qui exerce la profession de "danseuse espagnole" dans une modeste boîte de nuit. L'oncle et les proches sont très vite dépassés par les frasques et le vocabulaire de la gamine. En effet celle-ci est d'autant plus irritable avec son entourage que son désir le plus fort, découvrir le métro parisien, ne pourra se réaliser pour cause de grève. Zazie va alors mener sa petite vie, découvrir Paris d'une manière inattendue et cocasse. Du haut de ses dix ans elle va porter un regard sévère et ironique sur le monde complexe des adultes . Elle va également chercher réponse à une question qui l'obsède: son oncle Gabriel est-il, comme tout le monde le pense, un homosexuel ?


Zazie n'a pas eu de chance dans sa vie de petite fille. Son père était un alcoolique invétéré et a tenté d'abuser d'elle. Sa femme l'a alors assassiné. La pauvre gamine, traumatisée par ce passé, a déjà beaucoup appris de la vie. Elle ne mâche pas ses mots avec son langage châtié et n'est pas à une espièglerie prêt pour enquiquiner son monde.
Son ambition de future adulte est "d'être institutrice pour faire chier les mômes !". En débarquant sur le quai de la gare elle est littéralement livrée à son oncle, homme élégant, précieux et un peu méprisant envers ses semblables.
La première volonté de la fillette est de faire un voyage en métro mais... pas de chance, grève ! Les grilles sont fermées. C'est ainsi qu'elle se retrouve dans le vieux taxi de Charles, un copain de Gabriel, direction le vieux café "La cave" au dessus duquel habite cet oncle en compagnie de sa très dévouée compagne Marceline... au fait compagne ou compagnon ?

Le quartier est peuplé de personnages atypiques à commencer par Turandot, le patron du café, qui n'apprécie pas la présence de l'insolente fillette. Sur son comptoir trône son perroquet vert qui répète sans cesse: " Tu causes, tu causes, c'est tout ce que tu sais faire !". Mado la serveuse file le grand amour avec Charles le chauffeur de taxi et puis Gridoux, le cordonnier, genre de "monsieur je sais tout" donne bien sûr un avis sur tout. Zazie va fuir ce milieu faisant une fugue dans Paris au cours de laquelle d'autres personnages plus ou moins honnêtes vont l'interpeller.
Elle va les ridiculiser, les faire tourner en bourrique en les engageant dans des courses poursuites effrénées ou les rabaisser par des réflexions vexantes. Mais Zazie restera par dessus tout une petite fouineuse et ne lâchera pas Gabriel à propos de son homosexualité supposée. Il va amener Zazie dans le cabaret où il exerce ses talents afin de tenter de satisfaire le désir de vérité de la fillette. Une soirée de folie va s'engager dans l'établissement avec toutes les connaissances de Gabriel. Au beau milieu d'un vacarme dévastateur Zazie va s'endormir et prendra enfin le métro mais plongée dans un profond sommeil.
En repartant vers sa province, sa mère lui demandera si elle s'est bien amusée. "J'ai vieilli" lui répondra l'infernale mais attachante gamine.


Le roman de Raymond Queneau, auteur que j'apprécie énormément, était l'un de mes livres de chevet durant mon adolescence. Lors de sa sortie en mille neuf cent soixante, je n'avais pas manqué d'aller voir l'adaptation de ce formidable roman à l'écran surtout qu'un film de Louis Malle après "Les amants" ou "Ascenseur pour l'échafaud" notamment attirait la curiosité. Je viens juste de le revoir et alors, merveilleuse surprise, ce film fait partie à mon avis des "indémodables". Après tant d'années, l'œuvre n'a pas pris une ride. Au contraire elle paraît d'une grande modernité par son thème, son interprétation et son étonnante mise en scène. Le panel de personnages est surprenant et les situations complètement inattendues. En effet cette virée de Zazie dans Paris lui permet en allant du Marché aux Puces à la tour Eiffel en passant par les quais et les vieilles galeries marchandes un panaché de situations et de réflexions assez extraordinaires. Les mêmes gens ne cessent de se croiser, de s'interpeller dans une capitale désemparée et envahie d'embouteillages à cause de la grève du métro. Zazie l'intrépide nous entraîne au milieu de ce désordre dans de délirantes courses poursuites ponctuées de gags d'une grande drôlerie auxquelles prennent part des personnages déjantés aux attitudes énigmatiques et aux propos savoureux. Puis vient un genre de feu d'artifice loufoque et flamboyant avec une bataille énorme de tartes à la crème et ustensiles en tous genres dans la boîte de nuit où travaille Gabriel. Au milieu de cet indescriptible chahut dévastateur, Zazie dort sur le coin de la seule table encore indemne. Pour incarner notre petite héroïne Catherine Demongeot est absolument LE personnage avec ses yeux malicieux et son petit minois canaille. Elle est éblouissante d'entrain et de naturel dans un rôle-titre peu évident. Philippe Noiret semble prendre beaucoup de plaisir à jouer un "ange Gabriel" hors du commun. Lorsque l'on ajoute à ce duo Jacques Dufilho, Vittorio Caprioli, Annie Fratellini et Hubert Deschamps ,entre autres, force est de reconnaître que nous nous retrouvons face à une pléiade de merveilleux comédiens. A signaler l'excellente performance d' Yvonne Clech en veuve joyeuse à la recherche de sa proie.


Ce "classique" de Louis Malle sort parfois en salle mais nous avons aussi le bonheur de pouvoir nous le procurer en DVD. Il ne faut surtout pas hésiter, il faut voir cette œuvre qui est de celles qui font toute la richesse de notre cinéma.


Vidéo d'une course poursuite inénarrable:
http://www.youtube.com/watch?v=tW-i3v9ZJNA

Grard-Rocher
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le 11 janv. 2014

Modifiée

le 25 avr. 2013

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