Je ne connais pas bien Yoshitarō Nomura mais sa réputation de Hitchcock japonais va plutôt pas mal dans le sens de ce que j'en ai vu pour l'instant — "Harikomi" que j'ai beaucoup apprécié et "Le Vase de sable", beaucoup moins. C'est évidemment réducteur et partial, mais on peut comprendre cette vaine assertion comme la description d'une filmographie marquée par les thrillers secs et les enquêtes qui piétinent longuement avant de trouver du sens en chemin.


L'enquête n'est ici pas portée par un groupe policier mais par l'épouse d'un homme qui disparaît peu de temps après leur mariage, tandis qu'il était parti en voyage d'affaire dans une région particulière sur la côte ouest du Japon. La recherche de l'homme disparu permettra à Teiko Uhara de découvrir le passif de son mari (qu'elle ne connaissait pratiquement pas, ayant accepté le mariage un peu par dépit et par lassitude), riche en secrets et en révélations. La progression au sein de cet environnement, la part cachée d'une existence, investit une dimension très psychologique jalonnée par des questions sur l'identité (et notamment l'opposition entre figure publique et vie privée), sur le décalage entre les apparences et la réalité sertie de mensonges, le tout dans un contexte d'après-guerre assez marqué — l'action se situant à la fin des années 1950.


À mesure que le mystère s'éclaircit, la double vie de l'homme se précise, et tout particulièrement au travers de ses relations avec d'autres femmes (le gars était en réalité déjà marié). Teiko met le doigt dans un engrenage qui ira très loin, impliquant des compromissions et des menaces de la part de personnalités puissantes, et même si certaines révélations paraissent un peu abruptes (on a droit à une vraie-fausse résolution du mystère, vraie identité du coupable mais motif et circonstances erronées) le désir de protection vis-à-vis de secrets du passé que certains personnages souhaiteraient laisser enfouis (avec la bonne dose de culpabilité) maintient un vrai intérêt. Les coups encaissés par l’héroïne constituent une trame dramatique qui s'accommode bien avec les tensions sociales de cet après-guerre, dans une ambiance très sombre — les derniers moments, très noirs, sont marqués par des bords de falaises très photogéniques.

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le 20 août 2024

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Morrinson

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