S'il y a bien une série dont je ne pensais vraiment pas être un jour déçu, c'est bien Metal Gear… Si on met de côté les portages NES foireux et les spin-offs Acid! dont l'intérêt m'échappe encore, je ne comptais jusque là aucun impair majeur : même Revengeance, ou encore MGS 4, qui souffre d'un gros problème de rythme et d'un peu trop de fan service, s'en sortent avec les honneurs… Malheureusement, ça n'est pas du tout le cas de ce Peace Walker.
Pourtant, Peace Walker s'annonçait comme l'aboutissement du concept de Portable Ops, que j'ai personnellement adoré. Et il est vrai que si on ne devait parler que de l'aspect gestion du soft, la création de sa petite armée privée est plutôt jouissive, et assez simple d'accès une fois qu'on a bien le jeu en main. Mais Metal Gear n'est pas Sim City. C'est aussi un jeu dans lequel on s'infiltre chez l'ennemi pour remplir tel ou tel objectif…avec désormais un gameplay très largement REMANIÉ, et pas vraiment pour le meilleur…
Allons droit au but, en listant à la sauvage (ou presque) les principaux manques ou défauts très gênants, que l'on remarque plus ou moins rapidement. Les plus graves à mon sens, qui m'ont en plus fait perdre au moins dix bonnes minutes à essayer toutes les combinaisons possibles, c'est l'impossibilité de ramper (mouvement présent depuis MG2 sorti en...1990!!) et surtout celle de déplacer les corps pour pouvoir les planquer : car oui, curieusement, un ennemi mort ou évanoui dans une zone bien à découvert, ça a tendance à alerter tous ses potos des environs, allez savoir pourquoi…
De ces deux "oublis malencontreux" résulte un level design souvent décevant, avec par exemple l'impossibilité de se faufiler dans les troncs ou de grimper aux arbres dans les zones boisées, ou encore de se planquer sous les meubles ou même dans des casiers (ou assimilés) dans les bases ennemies… De plus, on ne peut même plus longer les murs pour se déplacer prudemment à l'insu de tous, et encore moins viser instantanément (ou simplement jeter un coup d'œil) quand on arrive au bord de ceux-ci… Et pour ceux qui diraient "gna gna gna, jeu PSP, tout ça", il était possible de faire tous ces mouvements dans Portable Ops…
Mais attention, ce n'est pas tout, car on aborde maintenant les aspects plus offensifs de Snake. Ainsi, la visée caméra à l'épaule est vraiment pourrave, pas précise pour un sou ; il vaut mieux alors passer en vue subjective…sauf qu'il n'y en a pas. Vive le retour en arrière d'une bonne décennie !! Parlons plutôt des armes au corps à corps ; enfin j'aimerais bien le faire, mais il n'y en a pas non plus !! Les affrontements en CQC ? Ils ont certes gagné en possibilités (de combos) et en fluidité, mais quid de certaines techniques autrefois fort utiles comme utiliser un ennemi comme bouclier pendant qu'on canarde les autres ?
Même au niveau des boss, ils arrivent à déconner !! Ceux-ci ne sont plus que des tanks ou trucs volants gérés par des IA : où sont donc passés les The End, Psycho Mantis, Vamp ou autre Python ? Surtout que même leur "gestion" est mal foutue : logiquement, ils apparaissent à la toute fin de certaines missions ; or, puisqu'on est limité à deux armes à feu pour tout équipement transportable, on n'est généralement pas paré pour l'affrontement (pas fastoche de défoncer un blindage d'acier au Mk22…). Mais le jeu a la solution : un ridicule "à suivre dans le prochain épisode" permet de revenir au menu et de s'équiper en conséquence…
Mais le problème principal des boss, c'est leur barre de vie démesurément longue (FF XII powa). J'ai rien contre un soft qui oppose de la résistance, bien au contraire, mais là le problème est ailleurs : Peace Walker a littéralement été "pensé" (notez les guillemets) dans une optique multijoueurs !! Ça ne serait pas gênant si ça ne se faisait pas au détriment de l'expérience solo !! Car si le premier affrontement contre un boss est relativement équilibré, ce n'est pas du tout le cas des suivants (Ops bonus, cf. paragraphe suivant), notamment lorsqu'on doit récupérer certaines pièces spécifiques pour construire son Metal Gear, dont le taux de drop est parfois particulièrement bas…
Oui, on parle bien de farm là, du putain de farm dans un Metal Gear !! Si "farmer" des soldats pour se faire son armée est logique et motivant, recommencer 20 fois un combat de boss pour espérer choper ZE pièce qui nous manque l'est beaucoup moins… C'est le principe des Ops bonus : des (centaines de) missions souvent courtes et pas très intéressantes, ressemblant un peu aux VR Missions de MGS, très (trop) axées sur le scoring bête et méchant, qu'on recommence indéfiniment jusqu'à obtenir le rang S, seule note valable pour pouvoir toutes les débloquer : on y trouve de la destruction de cibles, la récupération d'un objet ou d'un ou plusieurs otages, et même du Monster Hunter-like…
Des passages assez chiants, mais malheureusement obligatoires (puisque c'est principalement là qu'on recrute les meilleurs éléments) pour qui veut profiter à fond les ballons du seul élément vraiment réussi de Peace Walker : la gestion de la mother base. Tout comme dans Portable Ops, chaque recrue a ses qualités et ses défauts, qui les dirigeront plus ou moins naturellement vers telle ou telle carrière (et s'ils sont vraiment mauvais partout, pas d'états d'âme, on les vire sans aucun regret).
On compte ainsi cinq domaines de compétence : le combat sur le terrain, le département R&D (pour acquérir de l'équipement), le département qu'on appellera les Ressources Humaines (gestion de la nourriture et développement des objets comme les rations), l'équipe médicale (pour soigner les blessés) et enfin le Renseignement (qui trouve les recrues potentielles prometteuses et permet le développement d'armes atypiques).
Pour pouvoir développer des items (armes, objets), dont le nombre et l'éclectisme augmentent à mesure qu'on progresse dans le scénario, plusieurs conditions doivent être remplies :
- les PIM (expérience générale de la base, augmentant avec la réussite des missions et la qualité des soldats recrutés) doivent être suffisants.
- le niveau général du/des domaine(s) concerné(s) doit également être suffisant.
- le cas échéant, il faut posséder les plans pour concevoir certaines armes bien spécifiques.
Quant aux meilleurs combattants, on peut les envoyer aux quatre coins de la région pour effectuer des "Outer Ops". L'idée n'est pas mauvaise en elle-même, mais c'est un petit peu dommage de ne pas pouvoir donner un minimum de directives pour coordonner un peu les mouvements : nos soldats ne font pas toujours les meilleurs choix, comme s'acharner sur le blindage d'acier des tanks au lieu de s'occuper en priorité des hommes ou des hélicos qui les accompagnent… Ça m'a rappelé les combats de monstres un peu frustrants dans Dragon Quest VIII, quand mon équipe se concentrait sur le metal king slime au lieu de tabasser ses deux acolytes…
Évoquons pour finir les aspects plus techniques du soft. Graphiquement parlant, ce portage HD d'un jeu à l'origine sur PSP est plutôt propre, preuve qu'il était déjà dans le haut du panier sur la bonne vieille portable. Niveau son, c'est tout à fait à la hauteur de la série, même si aucun thème ne m'a vraiment marqué. Mais comme d'hab', les comédiens de doublage sont bons et les dialogues bien écrits. Là où j'émettrais peut-être un léger bémol, c'est sur l'IA ennemie, pas spécialement futée, mais c'est sans doute fait exprès pour en quelque sorte compenser les limites du gameplay (comment ça, c'est une excuse bidon?).
En définitive, Peace Walker avait un potentiel énorme, très largement gâché par des choix de game design douteux. Et encore, je me suis attardé sur l'essentiel : je n'ai par exemple pas évoquer l'ingénieux système de ballon fulton pour récupérer les soldats préalablement assommés, bonne idée mais là encore mal exploitée, puisqu'on peut l'utiliser même dans les intérieurs -ils traversent les plafonds?- (ça n'aurait pas été un problème si on avait pu déplacer les corps...), ou encore ces putains de cinématiques intéractives pas toujours super lisibles, qui pour le coup sont vraiment ZE WORST IDEA EVER. J'ai aussi volontairement laissé de côté le scénario, parce que rien que d'y penser, ça me fout les boules, tellement il est à côté de la plaque. Entre une loli agent-double, des IA complètement anachroniques et un Big Boss idiot qui doute de la mort de son mentor (c'est pas comme s'il l'avait achevée de ses mains...), franchement, je préfère largement ce qui nous est conté dans Portable Ops, même s'il n'est pas canon...
Honnêtement, à la vue du résultat global, je ne suis pas totalement rassuré pour la suite et fin de la saga, incarnée par le futur Metal Gear Solid V – The Phantom Pain, qui sera le "prolongement logique" de Peace Walker, quand bien même Ground Zeroes a montré quelques signes plutôt encourageants niveau gameplay… Réponse en septembre 2015.