C’est un peu sur cet esprit que vogue RymdResa, il travaille assez bien le sujet avec sa « poésie ». Pour former cette poésie, RymdResa s’emploie à parsemer l’aventure de phrases aléatoires et étrangement inachevées, de discours abstraits souvent très éloignés des intérêts immédiats d’un pilote (mais terriblement d’à propos si vous, le pilote, savez vous faire suffisamment explorateur).
Le titre pour son décor, fait appel à des gabarits découpés qui dérivent ou orbitent ça et là. Tous ces éléments vous confrontent en continu à des figures de l’imaginaire populaire des humains en aéronautique et aérospatial. Chaque image semble très maladroite, leur mouvement paraît grossier jamais assez affecté par les forces alentours, leur bordure bien visible accentue encore l’impression de « découpage dans des vieux magazines ». Vous verrez dans des teintes saturée, vieillie, comme halée par des longues années d’expositions au soleil. Les figures en question ne sont jamais futuristes, au contraire ce sont des vaisseaux, des stations des années 80 ou avant. Le cachet est fort, réussi même et si ça à l’air étrange posé sur le papier, l’alchimie en jeu est palpable. Notez que RymdResa ce n’est pas du Pixel Art ! C’est d’abord des constructions visuelles plates et très simples au-dessus desquels est posé un filtre avec une granularité très large, comme les cellules RGB des vieux moniteurs.
Il a également une petite trame scénaristique, l’intention est louable, mais elle c’est trop articificiel, une série de micros quêtes à remplir ouvriront l’environnement suivant, ni fait ni à faire...
Le sonore a également un beau rôle, certains textes sont récités par la voix d’un androïde dont la diction est incertaine, troublante en fait. Cette voix fait mouche lorsqu’elle énonce comme des maximes, des séries de mots sans sens premier.
Je laisse à votre bon soin le thème initial sur Bandcamp :
“ Embla Colonizer [rymdresasoundtrack.bandcamp.com] ” .
Gameplay
Qu’y a-t-il à faire dans RymdResa ? C’est un rogue-like, donc mort définitive, plein de petites sucreries inattendues en termes d’items à trouver. Une seule ressource à votre disposition. Elle vaut pour votre survie générale, votre carburant et votre résistance aux dégâts. Le vaisseau a une petite dizaine de slots pour de l’équipement (qui prend en compte des niveaux de qualité jusqu’à « légendaire »). L’univers vous offre aussi des consommables pour des choses diverses et variées. À la mort, presque tous vos acquis sont conservés. C’est d’abord le Reset de la quête. Vous conservez les items non équipés et les consommables, vos skins et l’argent (permettant d’acquérir l’un des 6 vaisseaux avant mission). Un système d’héritage permet d’avoir un bonus passif dérivé de vos précédentes stats. Le titre implémente des recherches en temps réel, qui sont plus rares à trouver et peuvent parfois mettre des dizaines de minutes ou plus pour s’effectuer. Par ailleurs votre avatar dispose de quelques aptitudes passives que l’on peut faire évoluer au fil de l’XP gagnée en jeu.
Votre vaisseau est un petit truc insignifiant cloué au milieu de l’écran, il ne bouge pas, il peut tourner sur lui même pour pousser dans une direction plutôt qu’une autre, c’est un peu l’univers qui se déplace autour du vaisseau, doté le d'un Skin, de bouclier et ce que vous pourrez trouver pour le rendre un peu plus rutilant.
Dans l’espace il n’y a qu’un seul danger, tomber à court de l’unique ressource. Dans la majorité des cas, cela se produit à cause de poussées trop longues qui consomment plus de carburant que vous n’en découvrez (c’est une question de chance), la ressource s’épuisera tout aussi sûrement en cas d’attaque. Un bolide qui vient de nulle part et heurte votre carcasse, une étoile dont la gravité vous attire avec plus de force que ce que votre propulseur peut fournir et finit pour vous réduire en cendre, ou encore les assauts de vaisseaux ou drones hostiles. Au départ tout cela s’évite de façon triviale, mais dans le dernier monde, les voyages sont longs et les dangers nombreux, votre pilotage devient important, gérer vos accélérations, votre carburant, votre vitesse de réaction lorsqu’une menace se profile à l’écran (la dimension de l’espace visible est l’une des contraintes, comme dans Isaac, tout pourrait être plus simple avec un zoom arrière, mais il n’y en pas :)
Finalement
RymdResa est une petite perle à la poésie réussie qui a tout pour me séduire entre son iconographie désuète et ses paroles prophétiques quasi cryptées. Le titre est complet, le côté rogue est bien présent, mais un rien trop peu appuyé, de plus le vaisseau ne pourra pas vous gratifier de grande joie, même si trouver de l’équipement rare provoque à chaque fois le sourire.
Soyez sûr que RymdResa n’est pas ce jeu d’auteur, austère et impénétrable dans lequel c'est au joueur de faire tout le chemin, pour comprendre et apprécier l’interaction, deux attributs assez rarement présents ensemble, en même temps.
*Sphère, roman de Micheal Crichton, 1987
**Colomb savait déjà ce qu’il cherchait, les Indes, si la destination ne relevait pas de l’inconnu, le chemin en revanche l’était lui. Cela a abouti à la découverte du continent américain. C’est une découverte accidentelle qui prouve avec plus de force que je ne saurais dire l’intérêt que recèle l’inconnu.
***Osez Joséphine, album d’Alain Bashung, 1981
cf. Stranded, Capsule, Elegy for a dead world, Out there, The Fall, Capsized, Luftrauser, FTL: Faster Than Light