Sois pas belle et ne te tais pas
Qui n'a jamais rêvé d'être un agent secret ? Parcourir le monde, traquer et punir les terroristes, sauver la veuve et l'orphelin et finir par se taper la veuve en douce. Un beau programme que nous propose donc Obsidian, studio spécialisé dans les suites de jeux développés par Bioware, la suite de Knights Of The Old Republic et celle de Neverwinter Nights c'est eux.
Une trajectoire parallèle à celle des créateurs de Baldur's Gate (En même temps les fondateurs d'Obsidian sont des anciens de Black Isle, éditeurs de Baldur's Gate) qui semble prendre enfin un chemin différent. Différent ? Pas tant que ça car l'ombre de Mass Effect plane sur pas mal d'éléments du jeu. Mais on ne leur en tiendra pas trop rigueur.
Non s'il y a bien un point sur lequel il faut tenir rigueur à Alpha Protocol c'est sa technique. Ne soyons pas timides et osons sortir les mots justes: Alpha Protocol est d'une laideur absolue.
Textures dégueulasses, animations raides, modélisation à la serpe, visages peut convaincant, finition douteuse avec bugs et pop-ups à la clé et une direction artistique globale tout à fait quelconque.
Alpha Protocol c'est du Unreal Engine au niveau de maitrise le plus bas. Il faut aussi ajouter à cela une I.A. ennemi particulièrement à la rue et un gameplay flottant où parfois sortir de derrière un mur relève du calvaire tant les commandes s'emmêle toutes seules les pinceaux.
Soyons clair Alpha Protocol c'est tout sauf un jeu qui donne envie de prendre la manette, des éléments qui pourront, légitimement, rebuter un grand nombre de personnes.
Pourtant... oui, pourtant ce serait une erreur de ne pas s'investir dans le titre. J'avoue volontiers que dépasser les 2 premières heures de jeu relève du sacerdoce mais une fois installer dans l'histoire on commence à ne plus vouloir décrocher.
Obsidian a en effet tout misé sur son scénario et son système de jeu.
Entendons-nous bien, le scénario d'Alpha Protocol n'a rien de révolutionnaire ou de vraiment renversant mais il a le mérite d'être solide et d'offrir des personnages hauts en couleur, la crédibilité n'étant qu'accessoire.
En fait Alpha Protocol c'est de la série B d'action-espionnage avec ses dialogues cons mais vraiment drôles, surtout quand ils sont basés sur des références sexuels (nombreuses) et ses situations improbables.
Le mieux avec tout ceci est que le scénario évolue vraiment en fonction de nos choix, que ça soit au travers de décisions franches (vivre ou laisser mourir comme dirait ce cher Paul) ou au travers des dialogues (une jauge de sympathie variera et offrira par la suite différents rebondissements). Loin de l'habituel argument marketing on est ici dans un jeu de rôle pur où l'on façonne vraiment son aventure, parfois de manière inconsciente.
On se retrouve ainsi dans certaines situations complètement rocambolesques mais souvent fun et avec des personnages qui peuvent passer du premier au dernier plan, et inversement, selon nos choix.
Qui dit jeu de rôle dit évolution et capacités, là encore Alpha Protocol n'est pas en reste avec son lot de points personnalisables permettant de s'orienter vers un ninja technologique ou vers une brute aussi sanguinaire que primaire.
Il est vrai que certaines capacités donnent un aspect curieux à certaines situations (passer devant un garde et devenir invisible sous ses yeux sans qu'il ne le remarque par exemple) et que certaines autres sentent bon l'abus total (les capacités "pistolet" à fond permet d'éliminer n'importe quel boss sans même transpirer) même si cela donne l'impression d'être un agent invincible et super classe, sensation pas désagréable finalement.
Alpha Protocol a, en fait, le coeur d'un très bon jeu mais l'emballage et la finition d'un produit Mindscape. Il faut vraiment faire un sacré effort pour faire abstraction de ce que nos yeux voient et pour pouvoir goûter au plaisir réel que peut offrir ce titre. Avec un développement moins cahotique et plus d'argent nul doute aurions-nous eu une nouvelle référence du jeu de rôle sur console. Même si le titre n'est pas très long, il maintient un rythme soutenu qui fait qu'on replonge dedans plutôt facilement pour explorer l'histoire sous des angles nouveaux grâce à nos choix. C'est moche, c'est buggé, c'est équilibré avec les pieds mais c'est pourtant indéniablement marquant. Alpha Protocol c'est tout simplement un jeu qu'on prend un plaisir fou à faire et dont on se souvient longtemps après.
Et puis je ne connais pas d'autres jeux qui te permette de se faire violer par une femme-soldat à l'accent allemand prononcé. Et rien que pour ça, il faut jouer à Alpha Protocol.