Mamoune simulator
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le 23 nov. 2020
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En comparaison avec les précédents succès de Frictional Games, Amnesia: Rebirth est une déception. En tant que suite directe de The Dark Descent, la première différence que l’on remarque très vite c'est la grande linéarité de la progression : un couloir la plupart du temps. Il faut voir la (longue) introduction du jeu, presque deux heures à avancer tout droit comme sur un rail, au gré de quelques bouleversements scénaristiques. On perd de fait le plaisir ludique que procurait l’exploration semi-libre du premier épisode. Une vraie régression sur ce point.
Amnesia oblige, la gestion de la lumière est de retour avec un changement sympa : les allumettes qui permettent d’embraser autant de sources de lumière que possible dans un court laps de temps. Pouvoir n’en porter que dix à la fois change un peu la dynamique de jeu. On a désormais moins tendance à économiser ses précieuses ressources, mais plutôt à essayer de tirer le maximum de chacune de ces petites tiges, en allumant le plus de lampes et flambeaux possible avant que la flamme ne s'éteigne. Malheureusement, cette nouvelle façon de jouer n’aura que peu d’impact, principalement à cause du fait que les allumettes sont présentes en trop grande quantité. Il est donc difficile d’etre à court et donc de ressentir l’appréhension de se retrouver subitement plongé dans le noir. Il faut aussi mentionner que trouver des paquets d'allumettes dans des cryptes sahariennes ou des mondes inconnus n'a aucune cohérence, mais passons sur ce détail.
La santé mentale de The Dark Descent est remplacée par une étrange affliction qui menace de prendre le dessus en cas d’exposition trop prolongée aux ténèbres ou de stress intense. Une sorte de game over diégétique trop complaisant avec le joueur, qui le replace quelques mètres en arrière et fait disparaître toute menace. Sans vrais conséquences pour le joueur, la peur de mourir s'évanouit. De fait, ce nouvel épisode peine à renouer avec l'ingéniosité des mécaniques de son prédécesseur et les grands moments de flippe qui en découlent.
Entre temps est sorti l’excellent SOMA, et on ressent son influence tout du long. Cela se constate par un abandon progressif des mécaniques de jeu en cours de route et un focus sur la scénarisation, omniprésente. On est même parfois à la limite du walking-simulator, avec des moments très contemplatifs ou d’autres quasi-cinématiques. En résulte un jeu qui ne sait pas vraiment sur quel pied danser. Dans Rebirth, tout comme dans SOMA, le moteur du jeu est l’intrigue, et c’est même la raison principale de se lancer dans l’aventure, autrement vous risquez d'être déçu si vous y cherchez la même expérience horrifique lovecraftienne que The Dark Descent.
Le pire c’est que quand Rebirth veut faire du Amnesia il le peut. Ça s'appelle le niveau du Fort, le seul moment où la formule originale est de retour. Et c’est de loin le meilleur passage du jeu : le plus effrayant (ces jumpscares de salopard sont très bien mis en place) et le plus ludique grâce à la bonne vieille recette du hub. A côté le reste fait figure de brouillon, comme l’utilisation de l’amulette qui permet d’ouvrir des failles menant vers un autre monde. Elle est trop anecdotique pour avoir un vrai impact autre qu’une justification scénaristique, et accessoirement dénicher quelques ressources supplémentaires. D’ailleurs, ces changements de dimensions fréquents n'aident pas à donner ce sentiment gratifiant d’explorer une unité de lieu cohérente comme dans The Dark Descent, même si la plupart des environnements ont une vraie identité visuelle, qu’il s’agisse des sables maghrébins ou de l’Autre-monde.
La narration est aussi étonnamment moins maîtrisée et subtile, et ce malgré la prise de risque de traiter de la grossesse dans un jeu vidéo. Tasi, la protagoniste, est beaucoup trop bavarde et ne peut s'empêcher de commenter chaque événement du jeu ou d’avoir des réflexions à haute-voix, ce qui pour moi a plutôt tendance à m'agacer qu’a m’immerger dans l’aventure. La surcharge de documents à lire (il y en a littéralement partout) et la narration hachée par des flashbacks pas toujours intéressants, alourdissent l’ensemble. A trop vouloir narrer une histoire riche en détails et en personnage, le jeu s'éparpille en intrigues plus qu’il n’est nécessaire. En revanche, on retrouve la grande richesse du lore typique des jeux de Frictional, et revenir sur les lieux et les événements racontés en toile de fond du premier jeu est un excellent moyen de lier les épisodes de la saga entre eux. Peut-être qu'à trop vouloir en montrer et chercher à tout expliquer, surtout quand il s’agit de l’Autre-monde, est en quelque sorte anti-lovecraftien, mais étendre à ce point l’univers permet au moins de créer une fondation solide pour les futurs épisodes. On retrouve aussi les grands dilemmes moraux à la SOMA, avec toujours une certaine capacité à susciter la réflexion. La fin est réussie dans ce style, très impactante, elle résonnera particulièrement chez ceux qui ont le plaisir d'être parents.
Selon moi cette baisse de qualité peut s’expliquer par un changement de direction et peut-être une tentative de réitérer le succès critique de SOMA. Rebirth est la preuve que mélanger deux excellentes formules ne donne pas toujours un très bon résultat. Même si l'équipe reste plus ou moins la même, je note quelques changements dans les postes créatifs principaux comme game-designer ou scénariste. Je suis ravi de constater que Amnesia: The Bunker change complètement d’orientation pour se focaliser sur le gameplay. Il faut croire que les développeurs apprennent de leurs erreurs. Suite à la prochaine critique…
Cet utilisateur l'a également ajouté à ses listes "Vous venez de pénétrer de nouveau dans un monde d'horreur" et Parcours vidéoludique commenté - 2023
Créée
le 24 juin 2023
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