Aah, Batman, le chouchou des bouffeurs de comics, l'idole des jeunes qui ont grandi avec le dessin animé de 92... Héros complexe et torturé, Batman fait tomber ses fans en pâmoison à chaque apparition.
Forcément, j'attendais cet épisode avec impatience. Enfin oui et non, j'ai commencé par être très sceptique à son annonce, notamment quand j'ai réalisé qu'il ne serait plus développé par Rocksteady mais par WB Montréal. Épisode commercial! Suite rapide! version 1.5 de Arkham City! Ca ne m'a pas empêché de me le procurer dès sa sortie, et d'avoir compté les jours soigneusement. Et en effet, Arkham Origins est une suite rapide commerciale de Arkham City. Et pourtant, la recette marche toujours...
Arlham Origins revisite les débuts de Batman, 2 ans après le début de sa croisade contre le crime qui ronge sa ville. La nuit de Noël, le justicier doit faire une croix sur la dinde et arpenter les villes, car Roman Sionis, Black Mask, grand ponte du crime organisé, a fait venir à Gotham 10 des tueurs les plus dangereux de la terre, pour éliminer Batman. Tous font des ravages dans la ville, aussi le justicier n'a d'autre choix que de leur courir après. C'est ainsi Bane, Deathstroke, Deadshot, Killer Croc et quelques autres grands noms qui tenteront d'abattre le Dark Knight. Mais rien ne dit que d'autres invités ne se joindront pas à la fête...
OUI, le pitch est peu réjouissant, mais le scénario se tient. Si certains le qualifient de faiblard, c'est qu'ils n'ont joué ni à Arkham Asylum, ni à Arkham City, car aucun de ces deux jeux ne se distinguait par son scénario. Non, ici il s'agit clairement d'utiliser le monde de Batman à bon escient en attendant le prochain épisode officiel de Rocksteady. Dans le même temps, une certaine distance est prise par rapport à la chronologie officielle DC, bon choix selon moi. Ce qui n'empêche pas néanmoins de voir énormément de personnages de cet univers évoluer devant nos yeux, des moins connus du grand public (Alberto Falcone,le commissaire Loeb et Branden, notamment, sont des noms qui parleront certainement aux lecteurs des comics mais probablement pas aux autres) aux plus connus. Origins s'inscrit donc dans la continuité de ce qui existe déjà, tout en proposant une relecture relativement bien construite. On reprochera toutefois au jeu de placer une grande partie des éléments majeurs des premières années de Batman sur une seule et même nuit, ce qui est assez peu logique (je suis convaincu qu'il y avait moyen de concevoir un jeu qui aurait pris place sur plusieurs nuits, voire semaines), et également [SPOILER] de vider le personnage de Bane de toute sa substance dans la mesure où il ne vainc pas Batman et ne pourra probablement jamais le faire, je n'en dis pas plus [/SPOILER]. L'histoire est riche en rebondissements, et même si ce n'est qu'un prétexte aux affrontements (comme dans AA et AC), elle se suit avec plaisir.
J'aimerais d'ailleurs à ce sujet dire que des trois jeux, c'est celui-ci qui met en scène le Joker le plus fascinant. À mi-chemin entre celui de Burton et celui de Nolan (il est d'ailleurs doublé en français par la doublure de Heath Ledger - oui j'ai fait le jeu en français et je vous emmerde, je me débrouille très bien en anglais mais prout - et si ça fait bizarre au début, force est de reconnaitre qu'il s'agit d'un choix judicieux), sa folie et sa malveillance régaleront franchement le joueur. Autant j'ai trouvé le personnage un peu trop classique dans les jeux précédents, autant il crève totalement l'écran dans celui-ci.
Passons maintenant au gameplay. 95% du gameplay d'Arkham City est ici repris, et enrichi de quelques nouveaux éléments. D'aucuns lui reprocheront son classicisme, le manque de nouveauté, mais objectivement, encore une fois la recette fonctionne. Dans les nouveautés, on notera quelques nouveaux ennemis sympa, en particulier le maitre d'arts martiaux, l'utilisateur de venin et le balèze en armure (le balèze normal est juste l'équivalent des frères siamois russes d'Arkham City), qui renouvellent les combats et imposent au joueur une nouvelle façon de jouer. On trouve également toutes sortes d'améliorations nouvelles, certaines pas, qui rendent malheureusement les gadgets un peu trop puissants. Ces derniers sont pratiquement les mêmes que dans l'opus précédent, certains ont simplement été remaniés (la bombe gelante est devenue la bombe collante parce qu'on a pas encore rencontré Mr Freeze, la tyrolienne a également changé son fonctionnement et quelques autres modifications de ce genre) et on remarque l'apparition des gants électriques, extrêmement puissants (à tel point qu'on se demande pourquoi Batman ne les a pas conservés par la suite), qui permettent plusieurs choses, et surtout d'introduire des combats bien plus exigeants. Le seul vrai problème de ce gadget est qu'il peut s'activer accidentellement très facilement, et que du coup si on a pas envie de s'en servir on se retrouve un peu embêté.
Je vais pas faire une critique point par point de ce qui reste, ça va durer trop longtemps, je m'attacherai donc aux points négatifs et positifs qui m'ont le plus marqué:
-la taille de la map: c'est bien mais c'est pas bien: d'une part c'est plus grand, c'est cool, mais d'un autre côté quel manque de vie! À part des malfrats, il n'y a personne dans les rues (ok c'est Gotham et ça peut justifier la chose, mais il y a quand même des limites) et aucune voiture ne roule. Chiant. Également, on se retrouve bloqué par des murs artificiels purs et durs, ce qui n'était pas arrivé dans les autres: dans Asylum les accès de l'île étaient fermés et... bah c'est une île quoi, dans City le quartier était complètement fermé et bouclé par une milice privée qui vous flinguait dès que vous essayiez de quitter la zone, et dans Origins.. ben vous avez juste accès à une petite partie de la ville PARCE QUE. Vous voyez le Wayne Building, dont vous admirez la silhouette depuis déjà deux épisodes? Eh ben continuez à l'admirer, pasque c'est comme ça et pas autrement. Bordel;
-le traitement du personnage: un Batman plus dur, moins mature, encore en colère contre le monde pour la mort de ses parents, ça fait plaisir à voir. Un Batman des origines finalement assez cohérent;
- la voix d'Alfred: faites-le taire!
Je tiens quand même à revenir brièvement sur l'ambiance du jeu. Un certain travail a été produit, contrairement au travail certain des précédents opus. Je salue la volonté de situer l'action dans un monde contemporain et non dans un Gotham des années 40 ou 50 (cela étant les deux choix sont intéressants), mais je déplore la perte de qualité par rapport à Arkham City.
Finalement, si vous avez aimé les épisodes précédents et que vous êtes capable de réfréner votre mauvaise foi, vuos trouverez en Arkham Origins un travail parfaitement appréciable - et peu importe qu'il soit commercial, 80% de la production culturelle de l'humanité depuis l'aube des temps est guidé par un impératif de rentabilité, même les bons trucs. Bon après si vous n'êtes pas particulièrement connaisseur ou fan du chevalier noir, je vous conseille chaleureusement de vous rabattre sur les deux premiers épisodes.