La société Capcom est riche de plusieurs dizaines de licences, pour autant de voies vers des univers distincts. Certaines sont constamment alimentées en nouvelles déclinaisons, comme Resident Evil, pour le plus grand plaisir des fans et du porte-feuille des actionnaires. Mais il y a parmi toutes ces licences un grand nombre qui n'ont pas connu de grand succès à leur époque ou qui ont été oubliées avec le temps. Parmi celles-ci, Bionic Commando, sorti sur l’ancestrale Nintendo. Le jeu a marqué de nombreux joueurs, mais visiblement pas assez pour que la série continue. Capcom, roi des suites, crossovers et autres clins d'oeil à son histoire, a même complètement délaissé la licence pendant 20 ans.
Et pourtant, au milieu des années 2000, il est prévu de redémarrer celle-ci, grâce aux bons soins du studio Grin. Ce retour veut se faire remarquer et c'est ainsi sous la forme de deux jeux qu'il va prendre forme. Le premier, Bionic Commando Rearmed est prévu sur PSN et XBLA et remake son aîné sur NES, toujours avec une vue en 2D. Mais le gros projet, le AAA, c'est le Bionic Commando prévu pour PS3 et Xbox360 tout en 3D, qui veut relancer la série.
Mais, à l’arrivée, si Bionic Commando possède certaines qualités, il est dépassé par son cousin Rearmed, ce petit jeu dématérialisé mais bien plus maîtrisé.
Ce qui a fait la particularité du Bionic Commando de la vieille Nintendo, c'est le maniement particulier de son héros, qui ne peut pas sauter mais qui possède un grappin à la place du bras. Il y avait donc un temps d'adaptation nécessaire avant de maîtriser l'engin, d'autant plus que le jeu était réputé pour sa difficulté. Cette bonne vieille époque où les développeurs aimaient faire enrager les enfants devant leurs jeux.
Le scénario fait le lien entre ce premier Bionic Commando et le nouveau. L’histoire est aussi haute en couleurs qu'un téléfilm d'action sur le câble, entre deux factions ennemies, mais le jeu a le bon goût de l'assumer jusqu'au bout avec un certain humour.
Nathan Spencer, le héros, ne sait toujours sauter, mais il a évidemment conservé son légendaire grappin. Au fil des niveaux, il acquiert même différentes armes ou nouvelles aptitudes qui, loin de rendre les choses plus faciles, seront mises à contribution pour des énigmes ou contre des ennemis récalcitrants. C’est parfois amené de façon si ingénieuse que le joueur ne se rendra pas forcément compte immédiatement de certaines nouvelles subtilités.
Le jeu ne fait pas dans l'action décomplexée comme un Contra. L’utilisation du grappin oblige à une certaine prudence, une chute dans le vide est très souvent arrivée. Il impose aussi au joueur de se servir de sa tête pour progresser. Lors des affrontements contre les boss, celui-ci risque de passer plus de temps à trouver comment les abattre que s'en défaire. Trouver tous les secrets de chaque niveau demande aussi beaucoup de jugeote, en plus d'une dextérité réservée aux plus persévérants.
Car Bionic Commando Rearmed est difficile, dès le mode normal. Il est très exigent avec le pauvre bougre de l'autre côté du fil de la manette. Celui-ci n'a pas d'autre choix que de se plier aux règles du jeu. Mais le jeu est fait avec un tel sens du détail, une telle minutie dans les mécanismes proposées et les obstacles proposées que c’est un régal de s’accrocher, et un plaisir de réussir à surmonter les difficultés. Pour ceux qui n'en auraient pas assez, les inconscients, une cinquantaine de défis sous forme d'exercices virtuels s'offrent à eux, impossibles à faire sans connaître le gameplay par cœur.
Le jeu de Grin peut se vanter de réussir sur deux tableaux : grâce à ses qualités, et parce qu'il pique au jeu l'ego du gamer. Cette remise à niveau du jeu original se permet quelques ajustements nécessaires de nos jours, notamment un système de sauvegardes, tout en conservant ce qui fait l'originalité de la série, son gameplay exigeant dans des niveaux au level-design bien étudié.
Alors que le Bionic Commando AAA fut un semi-échec, entraînant la fermeture du studio Grin, ce jeu téléchargeable a fait sensation, entraînant une suite, sortie en 2011. Réalisée par Fat Shark, elle n'est pas à la hauteur de l'originale, et disgresse de la série avec la possibilité de sauter, sacrilège. Alors que c'était justement cette limitation, couplée à l'utilisation d'un grappin, qui rendait la série si particulière. Depuis, la licence fait de temps à autres des apparitions timides dans d’autres jeux de Capcom, mais avec peu de chance de la revoir autant sur le devant de la scène.