Jouissance. Oui, c’est bien le terme qui me vient à l’esprit en pensant à Bloodborne. Une véritable claque comme rarement prise. Une de mes dernières grandes expériences vidéoludique.
Pour autant, ce n’était pas gagné. N’étant pas un séide de la secte des Souls, j’avais un peu d’appréhension avant de me lancer dans l’aventure, même si en ayant lu quelques tests et regardé plusieurs vidéos le jeu me parlait plus que ses petits frères.
La chose qui frappe d’emblée en découvrant Bloodborne, c’est l’incroyable direction artistique du titre (bien qu'inégale comme me l'a très bien rappelé le camarade Nushku), empruntant tant à l’imaginaire gothique, au style victorien et à des inspirations lovecraftiennes, donnant le sentiment de déambuler constamment dans un univers cauchemardesque envoutant. Je n’ai pas compté le nombre de fois où je me suis arrêté pendant quelques temps afin de profiter de certains panoramas particulièrement majestueux. Je pense sincèrement que l esthétique du jeu mérite à elle seule le coup d'oeil.
Que dire aussi de cette ambiance écrasante, oppressive, de solitude qui assaillit constamment le pauvre hilote que nous sommes de part cette architecture monumentale et monstrueuse. Nous sommes comme perdu dans un environnement qui nous dépasse, un petit pion sur un grand échiquier.
Après, concernant l’aspect purement technique, étant mon premier jeu PS4 j’ai tout de même bien ressenti le passage à la nouvelle génération. C’est plutôt propre, les couleurs ressortent bien, sans trop d’aliasing et de clipping même si à certains moments du jeu j’ai le droit quasiment à chaque passage à un affichage de textures en retard assez violent (ça m’a un peu rappelé Mass Effect 1 du coup), puis autre point assez dommageable visuellement, l’entrecroisement entre la cape et l’épée dans le dos, mais là je chipote sans doute.
En tout cas, si on compare avec son grand frère Dark Souls 2, évidemment, la comparaison est plutôt méchante pour son ainé …
Que dire aussi de ce level design tortueux magnifiquement agencé, porté sur la verticalité et la sinuosité, où quasiment toutes les zones du jeu sont directement reliées entre elles donnant ainsi à l’ensemble une cohérence de tous les instants. Une des particularités du titre est d’offrir la possibilité au joueur d’accéder à quasiment tous les lieux visibles (ex si au loin vous voyez un pont en hauteur, à coup sur vous aurez la possibilité d’y accéder, si vous trouvez le chemin bien entendu !), ce qui renforce l’immersion du titre et donne le sentiment d’un terrain de jeu véritablement pensé et réfléchi.
De même, on peut noter, chose appréciable, qu’une grande diversité de décors nous est proposée. On alterne entre des environnements urbains, d’autres plus campagnards ou forestiers, l’exploration d’un château ou d’autres zones échappant à toute classification classique plus ou moins cauchemardesques. Point trop de redondance, surtout que les quelques milieux urbains proposés par exemples bénéficient chacun d’une identité propre.
Comme chez les membres de sa famille, tous les niveaux fourmillent de petits raccourcis par ci par là pour rendre au joueur ses déambulation plus aisées, notamment lorsqu’il faut rejoindre un boss si on ne veut pas se retaper tous les monstres disséminés sur son chemin ! Ainsi, lors de la découverte de chaque nouveau lieu, mon objectif principal est toujours de dénicher ces fucking raccourcis !
Et évidemment, comme chacun sans doute, le joueur est lâché dans cet univers hostile sans carte pour se repérer ou sans objectif visuel pour nous guider. On se démerde, et c’est aussi ça qui procure un réel plaisir de découverte. Un moment de liberté sans assistance. Le sentiment d’être totalement perdu et de devoir trouver son chemin par soi même. On est finalement pleinement acteur du jeu, on a l'impression d'être le chasseur, d'être égaré comme lui dans un monde hostile et incompréhensible.
Outre l’aspect visuel particulièrement enchanteur et la construction intelligente et méthodique du monde dans lequel nous évoluons, ce qui m’a véritablement fait kiffer le dernier titre de From Software par rapport aux Souls est bien le gameplay. La sacro saint gameplay. Sans aucun doute un des éléments incontournables du jeu.
Terminé le style « simulation » des anciens, la rapidité digne d’un service de gériatrie et bonjour la vélocité et la fougue de la jeunesse ! Courses, roulades, esquives, tous ces mouvements sont facilités afin de rendre le jeu bien plus dynamique. Pour autant, il est toujours autant question de bien observer les coups de chaque ennemis et d’essayer de passer dans leur dos pour faire un backstab. De plus, la possibilité de regagner une partie de sa vie en attaquant un ennemi qui vient de nous blesser incite à adopter un style bien plus offensif et nerveux.
Autre gros changement, l’impossibilité véritable de faire le tank comme dans les Souls planqué derrière son bouclier, ce dernier étant remplacé par une arme à feu principalement utile pour contrer les ennemis. D’un côté risqué car en cas d’échec la punition arrive irrémédiablement par le coup de l’adversaire mais de l’autre côté les opportunités de placer un contre restent tout de même assez larges et peut conduire à rendre le tout bien simple pour ceux maitrisant cet outil. Pour ma part, n’ayant pas pris le temps de m’entrainer et ne trouvant pas cette attitude très stimulante à jouer j’ai tout misé sur l’esquive, pour un résultat je pense égal, même si pouvant être parfois un peu handicapant lors de certains affrontements. From Software a considérablement fait évolué sa recette sur cet aspect et je les en remercie.
Un des points qui ressort assez souvent en évoquant la série des Souls est celui ayant trait aux affrontements de boss qui parsèment l’aventure, optionnels ou non de leur état. Je ne saurais dire au demeurant si leur nombre est supérieur, inférieur ou dans la norme par rapport au reste de la « série ». Je sais simplement que j’en ai occis 15 hors boss de fin (où je suis actuellement arrêté) et si on ajoute le boss caché on arrive donc à 17. En tout cas, je peux dire que ces affrontements ont eu un impact non négligeables sur ma vision de Bloodborne.
Certes, certains sont totalement inutiles et/ou inintéressants (comme les sorcières de Hemwich ou celui qui renaquit), d’autres plus imposants que redoutables (le monstre clérical, la nourrice Mergo) mais une bonne partie d’entre eux offre des moments véritablement jouissifs ! Bien entendu, on s’énerve assez souvent lorsqu’on est comme moi un pauvre myrmidon sans talent, je ne compte plus mon nombre de morts devant Gascoigne, Amélia ou Rom) mais Bloodborne (et la série en général parait-il) offre une telle satisfaction et un plaisir d’accomplissement tellement intense une fois l’affrontement achevé qu’on se dit que d’un côté on mérite bien de suer un petit peu (ou être au bord de la crise de nerf en mourant une quinzième fois alors, qu’un seul coup supplémentaire et c’était la victoire) pour profiter d’un tel moment !
Puis non de Zeus, From Software a vraiment du talent dans la mise en scène. On sent, on ressent très souvent la limite entre le lieu de découverte et l’arène du boss, notamment lorsqu’on est devant l’Eglise où se terre la bête affamée, Gascoigne, Amélia ou encore Logarius. Et que dire de la musique pendant ces affrontements ! Avec la tension et le côté épique de la chose j’étais souvent en mode apnée tout le long du combat, la mort pouvant frapper à chaque instant. Une vraie réussite de ce point de vue là.
(A noter aussi que le bestiaire commun que l’on rencontre au cours du jeu est assez varié et plutôt plaisant même si pour râler encore un peu plus de diversité n’aurait pas été de refus!)
Mais on n’arrive pas à poil devant eux tout de même ? Petit changement encore avec Bloodborne, l’inventaire et l’équipement ont été remaniés. Terminé les armes, armures et autres accessoires en pagaille, ici nous avons plus le droit à une offre ascétique tant leur nombre a diminué.
Pour autant, j’ai l’impression, pour les armes notamment, que l’équipement était plus personnalisé, avec des pièces moins génériques, qui diffèrent de la simple différenciation visuelle. A noter aussi que les armes peuvent être améliorer grâce à des gemmes pour monter certaines caractéristiques (force, dégâts élémentaires…).
Une nouveauté a ainsi été introduite pour en quelque sorte pallier à une offre moins pléthorique, le caractère évolutif des armes blanches, pouvant être utilisées à une ou deux mains, s’en suit alors logiquement des mouvements inédits et une nouvelle façon de jouer ce qui permet d’enrichir le gameplay.
Personnellement, j’ai bien dû faire 75% du jeu avec l’épée de Ludwig (une/deux mains) qui une fois transformée permet, outre de faire beaucoup de dégâts, de stopper nombre d’ennemis dans leur mouvements. Un plus non négligeable.
Pour le reste, rapidement, on peut noter que l’usage de la magie a été un peu mis de côté (pour ma part mon ésotérisme est restée au plus bas…) ou encore que la gestion du poids de notre inventaire a totalement disparue ! (ce qui offrait dans les Souls la possibilité de jouer léger /rapide lourd/lent).
Bien entendu, on ne peut pas ne pas évoquer la question de la difficulté quand on réfléchi sur un jeu From Software. Sur ce point, c’est intéressant de noter que les avis diffèrent entre les joueurs. En ce qui me concerne, je trouve le jeu bien plus simple d’accès qu’un Dark Souls 2 par exemple (contrairement à notre camarade Liquid'). Alors certes, ce sentiment doit pas mal reposer sur ce nouveau gameplay, mais je trouve qu’en dehors des boss (et encore, pas tous) le jeu n’est pas excessivement compliqué, si on fait attention et ne prend pas des risques immodérés (la tentation est pourtant grande héhé), ce qui est une leçon des Souls de manière générale. N’hésitez pas par exemple, si vous êtes en possession d’un nombre conséquent d’âmes (réflexe Souls) d’aller les dépenser pour monter de niveau dans le hub plutôt que de risquer de mourir comme un pauvre hère et finir par tout perdre. De la mesure, de la mesure mes amis.
Evidemment, les développeurs sont toujours un peu pervers et le jeu n’est pas avare en turpitudes et autres coups tordus, comme cette manie de placer certaines créatures dans un coin qui te one shot une fois saisi. Il ne faut pas avoir peur de mourir (et de perdre ses âmes héhé), mais le jeu n’offre pas un challenge insurmontable (la gestion des potions aide bien, plus souple que les fioles des Souls et avec une réserve souvent pléthorique), surtout qu’il y a je trouve une véritable progression au fil du jeu, on sent véritablement notre personnage devenir plus puissant et on prend conscience de l’évolution de nos capacités, ce qui permet de devenir plus serein au cours des affrontements.
Et puis, de toute façon, si on se trouve trop faible à un moment donné, il est toujours possible de dénicher un autre itinéraire, une nouvelle zone ou même d’aller farmer et revenir une fois bien boosté, ce que j’ai fais à plusieurs reprises. Sinon dans tous les cas, il y a toujours l’arme du lâche (mais réfléchis), de choisir la course et de passer à travers les ennemis en sprintant ! Une technique parfaitement valable et qui m’a sauvé à de nombreuses reprises. Ainsi, le jeu offre « toujours » un échappatoire possible.
Enfin, je vais terminer ce passage en revue ses principaux points du titre par une brève évocation de l’histoire de Bloodborne. Alors oui, en parfaite synergie avec l’ensemble des éléments constituants le jeu, une bonne compréhension du scénario ou tout du moins arriver à dégager les grands thèmes et les principaux axes de ce dernier demande un minimum d’effort de la part du joueur.
La narration étant assez obscure, il ne faut pas s’attendre à une offre pléthorique de cinématiques et de dialogues explicatifs, mais bien être attentif à tous les détails, descriptions d’objets, architecture des lieux, dialogues pouvant paraitre brumeux pour en faire ressortir la sève. Une attention aux choses anodines est primordiale.
Finalement le jeu est cohérent jusqu'au bout, le joueur est lancé dans un environnement extérieur à lui, il doit se débrouiller, et il débarque dans une Histoire en cours à laquelle il est étranger, à lui là aussi de comprendre les raisons de sa présence et le but qu'il doit atteindre tout en prenant connaissance de tout ce qu'il se passe dans le monde où il est jeté. Vaste programme.
Pour ceux que cela intéresse il y a pas mal d’interprétations assez poussées du scénario disponibles sur internet.
En tout cas, le background général du titre, qui a un petit côté « sisyphien » amène une réflexion sur l’hybris des hommes, le désir sempiternel de s’élever au-delà d’une simple humanité, et qui finalement sont frappés de folie dans cette entreprise démesurée. A vouloir toucher le soleil on sfinit par se brûler les ailes.
Le tout peut paraitre un peu abscons mais s’investir vaut le coup. Le jeu en vaut la chandelle Larmina.
Nonobstant les points laudatifs susmentionnés, je ne suis pas aveugle et j’ai gardé un minimum de (points de) lucidité et de regard critique sur ce titre enchanteur de From Software ! Pas de reproches sur les fondations du jeu mais quelques petits points pouvant un peu agacer durant l’aventure.
Premièrement, une incompréhension demeure, la gestion des relations entre le hub (qui a toujours la même utilité, entre achats divers et passage au niveau supérieur) et la téléportation entre les différents feux (oui, des lampes). Dans Dark Souls 2, différent du 1, on pouvait se déplacer de zone à zone sans revenir au hub central alors que dans Bloodborne il est obligatoire de revenir au hub pour ensuite se retéléporter vers notre destination finale. Personnellement, je trouve ce système complètement stupide et inexcusable (non non mettre en avant l’importance du hub ou autre tentative de justification n’est pas recevable). Bonjour du coup le temps de jeu perdu, surtout que, pour ne pas encore plus agacer, on a le droit à des temps de chargement interminables (et votre fidèle serviteur n’a pas fait la mise à jour). Point noir de ce côté là.
De même, j’ai trouvé le hub en lui même moins intéressant que celui de Dark Souls 2, plus petit et avec moins de choses à y faire. Je dirais aussi plus « vide », dans le sens où on trouve moins d’interlocuteurs possibles comparativement au précédent jeu de From Software qui finissait par être « remplis » de PNJ en tout genre. Rien de bien grave évidemment.
Une autre petit déception me vient de l’introduction des fameux donjons calices, une nouveauté mise en avant dans la communication des développeurs. Cette possibilité de créer des donjons aléatoires mettait quelque peu l’eau à la bouche mais ne se révèle pas véritablement stimulant à découvrir. Je précise, je n’ai fait que les 3 premiers niveaux et je n’y ai rien trouvé d’intéressant. D’une part, certes, j’avais sans doute un niveau un peu trop élevé d’où le relatif ennui de leur parcours, mais même les récompenses que l’on trouve ne donnent pas forcément envie de s’investir dedans, surtout si c’est pour devoir refaire plusieurs donjons pour pouvoir débloquer les ingrédients nécessaires. Du loot d’ingrédients, non merci, ils auraient pu trouver un autre biais pour débloquer la suite.
Je sais que les Souls s’étaient un peu vu critiquer sur la gestion de la caméra et des déplacements du personnages par rapport aux chutes. Malheureusement, je trouve que de ce côté là From Software s’est contenté du minimum. La caméra pose véritablement quelques soucis, notamment lors de l’affrontement de certains boss ou contre de simples ennemis rapides ayant tendance à se mouvoir rapidement elle part dans tous les sens ! Il ne faut donc pas hésiter à revenir en caméra libre assez souvent. Soucis aussi sur la gestion des chutes, il m’est arrivé plusieurs fois de tomber dans le vide à ma plus grande surprise, je ne sais pas, le terrain est peut être parfois glissant. Par ailleurs, le jeu est plutôt bien optimisé, mais il n’est pas exempté de petits bugs, notamment d’ennemis qui restent coincés dans le décor ou sur place ! (fin c’est plutôt cool notamment lorsque c’est un ennemi coriace hé hé). Et ah oui, il y a un point à changer absolument, les coups qui passent à travers les murs ! C’est du grand n’importe quoi, certes c’est souvent utile (comme les loups garous dans la cathédrale) mais ça impact l’immersion et la vraisemblance non de Zeus !
Bon, après je ne vais pas m’étendre mais étant donné que j’en veux toujours plus (comme dans Fallout, Skyrim ou d’autres jeux) j’aurais souhaité qu’il y ait plus d’environnements, un cheminement moins linéaire, plus d’ennemis différents, plus de boss (et moins de ratés), plus d’armes, plus de choix de compétences pour son personnage, une meilleure cohérence de qualité entre le début et la fin etc etc Mais bon, faut bien en laisser pour la suite !
Une direction artistique splendide, un level design ahurissant de maitrise, un gameplay efficace terriblement accrocheur, une difficulté bien dosée poussant à s’investir. Ne cherchez plus, Bloodborne est assurément un des titres majeurs de cette année 2015.
From Software a su évoluer après avoir livré trois opus qui restent malgré leurs différences dans la même lignée. En espérant qu’ils arrivent à approfondir leur nouveau concept par la suite. Maintenant je n’ai plus qu’à attendre Dark Souls 3 en espérant qu’il soit influencé (même un petit peu) par Bloodborne dans son gameplay. Réponse en début d’année prochaine !
PS : Je remercie aussi certains membres d’avoir supporté mes jérémiades hé hé