Temps de jeu : 200 heures
Testé en Accès Anticipé
Test rédigé pour Nintendo-Difference [#28]
Paru sur le Nintendo eShop le 6 novembre dernier, Brawlhalla est un jeu de combat gratuit développé par le studio Blue Mammoth. Déjà disponible sur PC et PS4 depuis octobre 2017 (et même 2014 sur PC, en accès anticipé), ledit studio s'est vu racheter par Ubisoft en 2018, ce dernier en devenant l'éditeur. De ses prémices sur PC à sa sortie sur Nintendo Switch, nous nous sommes frittés comme jamais pour en extraire un avis fort de plusieurs centaines d'heures de jeu. Alors accrochez-vous bien, direction le Valhalla !
Gratuit, qu'ils disaient...
Qu'on se le dise franchement : oui, Brawlhalla ressemble de loin à la vilaine copie d'un Super Smash Bros. Pourtant, s'il affiche quelques similarités, le titre cultive sa différence sur bon nombre de points. Avant toute chose, il faut savoir que le jeu est disponible en free-to-play, proposant d'acheter les personnages au cas par cas, soit avec la monnaie virtuelle, soit en dépensant quelques deniers bien réels. Il est toutefois relativement aisé de se procurer la moitié du casting, ne serait-ce qu'en jouant quelques heures par jour. Pour les joueurs plus occasionnels et ceux qui souhaitent soutenir les développeurs, il existe un pack contenant toutes les Légendes et celles à venir pour près de vingt euros ; une offre relativement généreuse. Des pièces Blue Mammoth sont également disponibles à l'achat, lesquelles permettront de se fournir en éléments cosmétiques divers (apparences, effets de K.O., emote, etc.). Pas forcément utiles, ils feront néanmoins suer les plus faibles, toujours prêts à ternir leur statut de joueur free-to-play pour parader en ligne.
Dans le monde du jeu vidéo et encore plus chez Nintendo, les graphismes sont certainement la dernière chose qui importe pour les adeptes de l'école du gameplay. Néanmoins, force est de constater que ceux de Brawlhalla sont plutôt faiblards, malgré l'amélioration notable au fil des années. Loin d'être particulièrement désagréables à l’œil, il s'agit surtout du côté cheap du titre qui pourra rebuter la majorité des nouveaux venus. Les modèles des Légendes sont similaires à un format chibi – rigolo, rond et donc mignon – et sont basés sur les mythes de notre monde (viking, valkyries, aztèques, steampunk, post-apo, droïdes, etc.). Les animations du jeu sont très rapides, mais finalement assez basiques, comme si elles manquaient d'un grain de folie malgré leur aspect très cartoonesque. Certains fonds de terrain sont plutôt jolis, tandis que les plus anciens – pas tous à jour – dénotent avec leurs visuels proches du croquis. Finalement, c'est bel et bien la technique du bousin qui qui risque de repousser les plus critiques, tant le soft s'apparente à un jeu Flash.
Cachez cette folie que je ne saurai voir
D'un autre côté, c'est ce même moteur graphique qui permet à Brawlhalla d'être téléchargé en quelques secondes et de tourner sans aucun souci. Côté bande-son, difficile d'être marqué par une quelconque piste, tant elle se fait discrète. Il y a également un gros problème au niveau du sound design du jeu, que ce soit dans les signature moves – des simili-smash – des personnages qui ne donnent aucun sentiment de puissance, qu'il s'agisse d'un coup de marteau ou de coups de feu. Dans un autre registre, les explosions des bombes et des mines essuient un bug sonore ennuyeux : l'ennemi esquive l'explosif mais parfois la détonation retentit quand même. Au final, si tout parait relativement joli au premier coup d’œil, difficile par la suite d'apprécier la direction artistique qui lorgne vers le cartoon sans totalement l'assumer. Et même si le budget semble limité, le jeu manque cruellement d'identité.
Brawlhalla propose majoritairement du jeu en ligne grâce à des serveurs en constante amélioration et une population active et croissante. Là où le Nintendo Switch Online ne garantit absolument pas une fluidité qualitative pour les jeux First Party, le titre de Blue Mammoth lui, ne semble jamais souffrir de lag. L'aspect eSport est une composante essentielle de Brawlhalla, notamment avec son mode classé ou les différents tournois organisés par les développeurs ; le matchmaking est lui-aussi de qualité. Les joueurs solitaires pourront s'amuser contre des bots à travers un match unique ou un tournoi éliminatoire. À noter également un mode entrainement où le joueur pourra tout tester (apparences cosmétiques, Légendes et arènes) et surtout s’améliorer grâce à de nombreuses fonctionnalités et statistiques. En outre, Blue Mammoth essaie de proposer quelques modes alternatifs, à l'image du Kung-Foot, le tout dernier ajouté. La majorité d'entre eux se révèlent peu enthousiasmants, à l'image de la bataille de boules de neige ou du football américain.
Slowhalla
Que ce soit en duel ou surtout en FFA (quatre joueurs, chacun pour sa pomme), le jeu se montre réellement amusant, autant pour le bourrin de service que le petit rusé qui ramasse les miettes. Si de gros progrès ont été réalisés dans les menus et l'interface du jeu, on pourra toujours pester contre les barres de vie qui se contentent seulement d'une colorimétrie approximative et non pas d'un pourcentage clair, net et précis façon Super Smash Bros. N'oublions pas non plus les arènes qui ne proposent rien de bien différent hors de leur structure, rappelant au joueur à quel point le titre est encore loin d'afficher les trouvailles géniales d'un Stade Pokémon qui se mue plusieurs fois au sein d'une même partie, ou même d'un Dream Land et le souffle vicieux de son Whispy Wood. En ce sens, Brawlhalla souffre douloureusement de la comparaison avec le mastodonte de Nintendo, l'éternel et indétrônable maître et créateur du genre.
En effet, impossible de ne pas comparer le titre phare du petit artisan à celui de Blue Mammoth, tentant par tous les moyens de se faire une place au soleil. S'il y parvient sans mal sur les autres plates-formes, son intérêt est bien plus questionnable sur Nintendo Switch. Évitons d'aborder la direction artistique ou les graphismes, tant les deux boîtes sont éloignées en termes de budget. Cependant, difficile de passer outre les problèmes de gameplay de Brawlhalla. Le jeu affiche une rare mollesse dans ses combats, qu'il s'agisse de ses phases aériennes où les personnages planent pendant de longues secondes, ou encore ses phases terrestres très statiques. Même les projectiles semblent flotter, comme si la gravité leur interdisait de fuser à toute vitesse, l'ensemble créant une logique d'action lente, que ce soit dans les esquives ou les sauts.
David contre Goliath
Enfin, il est de bon ton de souligner le cruel manque de variété dans le roster du jeu, les Légendes elles-mêmes ne disposant pas de moveset propre. En effet, Brawlhalla a préféré opter pour un système d'armes, chacun possédant ses propres attaques basiques. Tous les personnages se voient assigner deux armes de prédilection, chacune possédant trois signature moves propres à la Légende jouée, pour un total de six. Dans l'ensemble, tous les coups se ressemblent plus ou moins (à l'exception d'un ou deux sur un petit tiers des personnages jouables). On est encore une fois bien loin de la variété folle des movesets des derniers Super Smash Bros., à l'image d'un Mr. Game & Watch s'il ne fallait en citer qu'un. Reste que la possibilité de réaliser des combos dévastateurs est bel et bien présente, offrant une courbe de progression bien tangible, sans pour autant être injouable pour un débutant.
Quant à ceux qui s'imaginent déjà se balancer plusieurs types d'objets à la tronche, comme c'est le cas ailleurs, il n'en est rien ici. En dehors d'une mine, d'une bombe rebondissante (on adore celle-là !) et d'une boule à pics, l'arsenal du titre se révèle franchement pauvre. Pas de balle Smash et son coup ultime, pas d'objets de soins et encore moins de folie à la Trophée Assistance ou Poké Ball, capables d'invoquer des alliés de choix. De cette décision en découle un jeu visuellement moins attractif pour l'initié souhaitant un peu de fun, tout en laissant bien moins de surprises et d'actions explosives pour le spectateur. Deux éléments majeurs qui font de Smash Bros. ce qui l'est aujourd'hui : un monstre intouchable dans son domaine, et ce même si Nintendo s'est toujours refusé à se lancer pleinement dans l'eSport lucratif.
Verdict : Peut-être ?
Pas foncièrement mauvais dans son ensemble, Brawlhalla n'a pour lui que son modèle économique. Il faut dire qu'en arrivant sur Nintendo Switch, à moins d'un mois de la sortie de Super Smash Bros. Ultimate, les joueurs étaient en droit d'en attendre beaucoup plus. Un souci que le titre ne trouve évidemment pas sur les autres plates-formes, sur lesquelles le créneau du Smash Like est libre comme l'air, ou bien mal occupé (All-Stars Battle Royale, à l'époque de la PS3). Son plus gros point négatif réside dans son manque cruel de folie, à l'image de son arsenal de gadgets, très limité. Au-delà de ça et pour peu qu'on ne soit pas trop regardant sur la qualité du titre, autant dans son fond que dans sa forme, Brawlhalla est le parfait genre de jeu pour se défouler en soirée entre amis. On y rit, on y pleure, on y brise nos amitiés aussi vite qu'elles se sont forgées et c'est avant tout cela qui fait sa force. Parfait pour sa dimension fun, un peu moins pour son aspect compétitif, il serait bête de ne pas essayer Brawlhalla, surtout quand il s'agit d'un titre gratuit et proposant une véritable solution alternative au monstre de Nintendo.