Cineris Somnia
5.9
Cineris Somnia

Jeu de Nayuta Studio et Playism (2018PC)

Note à moi-même : je serais peut-être quelqu'un de plus joyeux et de moins torturé si je jouais un peu à autre chose que des jeux sur la dépression, les ténèbres intérieures de l'être humain et la futilité de son existence. Je dis ça, je dis rien.


Demi-déception que ce Cineris Somnia, qui avait pourtant en main toutes les cartes pour gagner notre partie de poker menteur - et mon coeur avec elle : de son titre à la Christopher Nolan en passant par le design androgyne de son protagoniste façon X de Clamp, sans oublier l'esthétique glaciale d'un Silent Hill en plein soleil (la plupart du temps) et quelques héroïnes diaphanes en froufrous Gothic Lolita, qu'aurait pu demander le peuple s'il avait eu du goût ?


De la sincérité ? Cineris Somnia en a à revendre, il la transpire par tous les pores de ses pixels. Dans chaque texture, chaque éclairage, même un peu frustre, dans chaque petit enfant qui regarde l'azur avec des yeux de poisson mort et dont on se dit "oh non, pitié, pas encore une tragédie, c'est déjà la quatrième en deux heures !". Car Cineris Somnia n'a pas les moyens de ses ambitions, il ressemble à un jeu PS3 début de gen, comme un cousin un peu bâtard de Deadly Premotion, mais sans le monde ouvert ni la folie furieuse. Seulement il fait tout ce qu'il peut pour le faire oublier et nous aménager une place d'honneur dans sa maison de poupées cassées.


Dans la peau d'un mystérieux protagoniste mutique et solitaire (clone inavoué du Sebastian Michaelis de Black Butler), on parcourt les couloirs usés de quatre histoires indépendantes dont les thématiques se répondent comme un écho au fond du puits, quatre nouvelles de Poe à la japonaise, élégamment tournées mais sans être révolutionnaires en rien, ni ménager trop de surprises aux vieux de la vieille.


Hélas, le manque de moyens s'en ressent également au niveau du level design, et c'est précisément là que le bas blesse. A mi chemin entre jeu d'aventure à l'occidentale (en version très édulcorée, vous ne bloquerez jamais bien longtemps) et walking simulator de l'ère préhistorique (imaginez un survival horror de l'ère PS2 dont on aurait "juste" enlevé les ennemis) : vous saurez tout ce qu'il y a à savoir de ce titre à la Mad Max Fury Road où on se contente d'aller d'un point A à un point B, puis de revenir sur nos pas, pour trouver l'item qui nous permettra de trouver l'autre item qui nous permettra de trouver l'autre item qui nous permettra de revenir sur les pas de nos pas. Essentiellement constitué de longs et laborieux aller-retours, le jeu lasse rapidement, aucun stratagème ludique, visuel ou sonore n'étant employé pour rompre la monotonie de son architecture interne (à quelques exceptions - bien pensées - près, prouvant que les auteurs ne manquaient pas d'idées, mais de possibilités de les exploiter concrètement).


En conséquence de quoi voudra-t-on aimer Cineris Somnia de toutes ses forces (au moins autant qu'il nous aime nous, joueurs) mais sans jamais y parvenir vraiment car si le potentiel, la passion et l'authenticité sont au rendez-vous, l'ensemble s'avère d'une platitude qui mettra la patience à rude épreuve - mais saura aussi la récompenser, parfois.


A voir de quel côté de l'indulgence notre balance personnelle a tendance à pencher, habituellement, pour en tirer les conclusions qui s'imposent...

Liehd
6
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Créée

le 10 avr. 2020

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Liehd

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