Quand j'étais plus jeune, je cultivais une espèce de facination pour les jeux de stratégie. Bien que j'y ai très peu joué, j'avais décrété que c'était un genre de jeu qui me convenait, mais je me retrouvais totalement frustré par l'absence de PC chez moi qui m'aurait permis de m'y adonner. Au sein du genre, Civilization était le porte étendard de ce genre intouchable.
Bien des années plus tard - et après un passage éclair sur Civ2 à l'époque sur Mac - je me suis lancé, doté de mon PC de moyenne gamme, sur l'épisode "un peu spécial" de la saga : Beyond Earth.
Un peu spécial puisque le seul Civilization à ce jour à ne pas appartenir à la série numérotée mais à bénéficier d'une espèce de titre spin-off. Et pour cause : pour une fois, il n'est pas question de retracer l'évolution d'un peuple ou d'une faction de l'espèce humaine, mais bien de se lancer dans l'exploration et la conquête d'un nouveau monde suite à la disparition prochaine et programmée de l'espèce humaine sur notre bonne vieille Terre que nous avons, grâce à nos effort, condamnée.
La première chose qui m'a touché, dans BE, c'est que ce titre, tout jeu de stratégie au tour par tour qu'il soit, dégage une vraie ambiance. Pas forcément d'une originalité folle, mais réelle, avec les différents peuples de la Terre qui débarquent sur cette nouvelle planète pour en percer les mystères, en découvrir la faune, et tenter d'en faire une nouvelle maison.
Depuis le temps, la saga maîtrise son sujet, et on retrouve ce fonctionnement au tour par tour si caractéristique de la série. On se développe, on implante ses nouvelles villes, on évolue au sein des différentes technologies, plutôt bien dispatchée sur l'arbre ad hoc, on travaille son "affinité".
Dans les faits, CivBE est un énorme jeu de plateau nécessitant de parvenir à la convergence de certains éléments de réussite pour parvenir à remporter la partie. C'est là le premier écueil du jeu : mis à part si on est coutumier de ce jeu, il est véritablement compliqué d'adopter dès le départ une stratégie efficace pour atteindre la victoire. Plus concrètement, tant qu'on est pas parvenu à remporter une première partie, c'est difficile de bien maîtriser le chemin pour y parvenir.
Alors là vous allez me répondre : "ben oui banane ! c'est le principe ! t'as qu'à y jouer et tu gagneras en expérience pour comprendre les mécaniques du jeu !". Sauf qu'à une dizaine d'heures la partie, ça fait cher le gain d'expérience. Et à mon sens le jeu aurait gagné à fournir une interface plus claire et lisible sur les conditions de victoire, pour rendre les parties plus stratégiques et moins dépendantes de la chance (ou la malchance) qu'on aura à atteindre certains objectifs.
Du coup, c'est là que le bas blesse. Soit CivBE est un pur jeu de stratégie au tour par tour, et du coup il se retrouve avec une lacune quant à sa capacité à nous faire comprendre et apprécier ses conditions de réussite, soit c'est un jeu de découverte et d'exploration, mais du coup il manque des éléments d'histoire et de narration. C'est en tout cas ce qui m'a le plus perturbé sur ce jeu : sa capacité à slalomer entre les deux genres, et donc à n'être véritablement bon ni pour l'un ni pour l'autre.
Le jeu et les mécaniques sont bons, l'ambiance est là, mais j'ai eu l'impression que mes victoires étaient plus le fait d'un aléa et du comportement des autres joueurs (en IA) plutôt que d'une pertinence de mes stratégies.
N'étant pas un spécialiste de la saga ni du genre, mon jugement pourra vous apparaître sévère (voire erroné ou totalement incohérent), mais c'est la façon la plus honnête que j'ai trouvée de rédiger mon ressenti. Du plaisir de jeu, mais plus une navigation à vue dans le brouillard qu'un jeu mettant à l'épreuve mes talents (maigres) de stratège.