Crash Twinsanity par Botwin
Crash Twinsanity AURAIT PU être, et de loin, le meilleur Crash Bandicoot de la saga, trilogie originale comprise.
Je dis bien "AURAIT PU", car l'équipe de Traveller's Tales et de Vivendi a été - je ne m'étendrai pas sur le sujet, d'ailleurs je n'ai pas tout compris - pressée par le temps. Le jeu a été bâclé dans sa dernière moitié, et tronqué de plusieurs mondes qui devaient le rendre encore plus fun. On a, en gros, affaire à un jeu au potentiel énorme, à l'univers magique mais qui a subi les méfaits du temps.
Du coup, les derniers niveaux semblent moins inspirés, l'ambiance totalement déjantée du début disparaît, la musique faibilit, le challenge est inégal... le jeu, après plusieurs heures (mais pas du tout au début !) finit par patauger dans sa propre semoule. Pourquoi lui ai-je attribué 9, alors ?
Parce qu'on ne peut ignorer, derrière tout ça, les efforts surdimensionnés fournis par l'équipe de production pour maintenir le niveau de la saga. Alors que Spyro a eu droit à une série bien trop large de navets, Crash a beaucoup mieux vécu son déménagement : "Wrath of Cortex" était plus que correct, "Twinsanity" redonne un souffle frais aux aventures du bandicoot. Car malgré tous les défauts cités ci-dessus, le jeu est bourré de bonnes idées, de gags hilarants, de scènes cultes. On pense à Crash désireux d'embrasser Uka-Uka pour ne pas se faire tuer, au "Moulin Cortex", au bus en carton poursuivant une jeune gothique muette, aux grosses directrices maléfiques, au boss final surmonté d'une cage pour canaris... Bref, à tous ces éléments farfelus qui montrent un réel désir de folie, comme le nom du jeu l'indique. Ajoutez à tout ça une musique EXCEPTIONNELLE (pas pour chaque niveau, certes) et unique : vous obtenez un ovni qu'on aurait tort, et qu'on a tort de rejeter ainsi.
Car malheureusement, le jeu est loin d'être adulé sur les Internets. Ici, la note n'atteint même pas le 5. Sur Jeuxvideo.com, la rédaction a bien voulu mettre un faible 12. Je ne sais pas si c'est l'effet "Post-Naughty Dog", un peu comme le baby blues, mais je trouve ça injuste. Ok, les points de sauvegarde ne veulent rien dire. Ok, la difficulté est aussi bien dosée qu'Olivier Minne est un bon présentateur. Ok, certains sauts sont inexacts, certains angles de caméras foireux. Mais ces tares, aussi manifestes soient-elles, ne m'ont personellement pas retiré le plaisir d'un vrai jeu de plateforme en free roaming, avec un univers bien propre, une ambiance sans précédent, et sans sucesseur. Là où les premiers Crash se contentaient de quelques piques d'humour, Twinsanity propulse l'ensemble dans un véritable hameau de délire, enchaîne les surprises, repousse les limites d'un univers déjà bien fourni par le passé. Et puis, pas question de sauter bêtement tout du long : le gameplay, à l'image des opus PSX (surtout du 3), est particulièrement varié. Phases de slide, phase de shoot, phase de coopération loufoque... À plus d'un titre, les personnages de Crash et de Cortex s'assemblent pour étonner le joueur, et proposer une nouvelle mécanique. Même le personnage de Nina Cortex, jusqu'ici quasiment inconnu au bataillon, se fait une petite place et propose une nouvelle approche à quelques niveaux du grand final.
Bref, le jeu est riche et varié ; il ne se repose pas sur une seule dynamique. Comment dès lors cracher complètement dans la soupe ? Avec un peu plus de temps, le jeu aurait été plus long, plus beau, encore plus fun, et aurait définitivement constitué le MEILLEUR Crash Bandicoot de toute la saga. C'est juste l'histoire d'un avortement, d'un avortement certes triste, mais qui ne doit pas nous faire oublier que le bijou est là, qu'il a perdu un peu de son éclat en passant à la machine, mais qu'il a son lot de brillance à offrir. Alors si vous avez un peu de temps et une PS2/Xbox sous la main (Ne jouez pas sur 360, ça passe très mal), foncez et appréciez l'aventure. Le début vous éblouiera sans le moindre doute, la fin vous décevra forcément, mais dans tous les cas vous aurez assisté au passage d'une étoile filante.