Double 6

Le lourd statut de jeu mégahypé est loin d'être un cadeau : demandez ça à No Man's Sky, Spore, Brink ou encore Mighty N°9. Ces jeux qui, d'articles de médias spécialisés en hyperboles marketing, se font longtemps désirer avant de décevoir plus ou moins les joueurs une fois disponibles en magasin ou en téléchargement, Cuphead en était.

Présentes à plusieurs E3, ses graphismes alléchants et ses promesses de gameplay titillaient les envies de tout joueur convenablement informé sur l'actualité vidéoludique. Le fameux "scandale" du journaliste échouant à passer le tutoriel est un bon baromètre de sa condition de "chouchou" des joueurs.

Et le voilà donc, presque sans faire plus de bruit que ça, en train de faire rager les possesseurs de PC et d'Xbox One à travers le monde, mais pour les bonnes raisons.

Car, en effet, Cuphead est allé au-delà de la hype, au delà même de son style en mode cartoon des années 30. Derrière ce style, il y a bel et bien un gameplay digne d'intérêt : les déplacements et actions ont beaucoup de répondant, les boss sont variés et charismatiques (seul un des derniers boss du 3ème monde teste trop la patience du joueur), les niveaux run'n'gun sont sympathiques (ils font penser à Rayman 1) et le système d'équipement ouvre très grand le champ des possibilités d'aborder tel ou tel niveau.

Mais la plus grande qualité de Cuphead, c'est qu'il est extrêmement juste envers le joueur. On a beau pester contre telle phase de tel boss, il faut avouer que rien dans le jeu ne relève du bullshit absolu, et que la mémorisation de pattern couplée à une bonne dose de concentration suffit à triompher de n'importe quel ennemi. Le format court de ces affrontements (2 minutes par niveau) donne un vrai cachet au jeu et empêche de nous laisser ressentir de la lassitude ou de la résignation. Mourir en boucle n'est peut-être pas agréable sur le moment, mais le sentiment du devoir accompli une fois le "Knockout !" entendu rattrape tout ça, nous faisant réaliser que finalement, Cuphead n'est pas un jeu artificiellement difficile.

Côté emballage, le contrat est largement rempli, le jeu étant fidèle au style qu'il vise jusqu'aux imperfections volontaires et à certains visuels cauchemardesques. Mieux encore, la bande-son de Cuphead est une très grande réussite qui nous a été bien cachée tout au long des années de hype.

Le contenu, sa qualité, sa cohérence, sa rejouabilité ainsi que le prix plus qu'honnête du jeu lui font frôler la perfection, qu'il rate à cause de la présence de plusieurs bugs (dont certains rendant des boss spécifiques très faciles à battre), de quelques niveaux encombrés par les sprites en premier plan ainsi que d'un mode "simple" absolument inutile puisqu'il ne permet pas la moindre progression dans le jeu. Cuphead souffre également d'un mauvais équilibrage au niveau des armes et des supers, mais ce qui ne les empêche pas d'avoir chacune une utilité.

Cuphead est un excellent terrain d'entraînement aux réflexes et à l'exigence dans le jeu vidéo, grâce à sa façon de diluer attractivité, obstacles et clémence.