Balayons dans un premier temps la sortie catastrophique du jeu, et son état qui l’était tout autant, car je n’y ai pas touché en l’état, et ai décidé de me lancer dans l’aventure sur la version PS5 toute pimpante à l’été 2022, et n’ai donc pas de doléances particulières quant à l’aspect technique du titre. Maintenant, rentrons dans la danse:
CDProjekt a eu une ambition démesurée, celle de retranscrire un univers existant profondément développé, et ce sous une forme qu’ils n’avaient jusqu’alors jamais exploré (le FPS). Le pari était risqué, les chances que le studios polonais ait eu les yeux plus gros que le ventre étant élevées. Mais comme vous l’aurez constaté par ma note, je fais partie de ceux qui y ont découvert une franche réussite. Je ne l’attendais pourtant pas particulièrement (pas de précommande, il a traîné quelques mois sur le disque dur de ma console, et l'univers m’était inconnu). J’avais même lancé le prologue une première fois, puis lâché l’affaire, me disant que ça n’avait pas l’air bien fifou.
Puis je l’ai recommencé, et passé le prologue dirigiste et frustrant, je me suis retrouvé libre dans les rues de Night City. Et là, le charme a commencé à opérer. Une ville vibrante, aux influences esthétiques et thématiques brassant large, des évidences à la Blade Runner ou Deus Ex, en passant par les technologies vidéo de Strange Days ou du fake-media en évolution naturelle de la partie MTV de notre société. Des néons, des décharges, des rocailles, du sexe, du sable, des cyber-psychos, des docteurs infâmes, des villas high-tech, des bidonvilles whitetrash, des containers, des cités gratte-ciel (à la Dredd)... Un large panel, fourmillant de détails, et servant un seul et unique but : l’immersion.
Car Cyberpunk ne réinvente pas la roue en matière de gameplay. Les mécaniques sont déjà vues, mais efficaces et à propos. Par contre, et c’est bien là que l’on retrouve la patte des géniteurs de la saga de Geralt, tout ce qui touche à la narration est follement excitant. Qu’elle soit environnementale ou directe, cette narration entraîne le joueur dans les méandres de cette mégalopole étouffante avec toujours cette envie excitante de voir ce qui nous attend. La trame principale est dirigée de main de maître, et quand bien même nos choix n’ont au final que peu d’importance, ceux-ci s’avèrent parfois douloureux tant on s’est attaché à la galerie de personnages que l’on rencontre, grâce à une écriture et un acting de haute volée. Les quêtes secondaires viennent parachever ça, avec des ruptures tonales déstabilisantes (le thriller poisseux, la contemplation sous-marine, la conspiration paranoïaque, l’espoir des badlands…) réussies. Enfin, toutes les activités annexes, aussi futiles soient-elles manette en main (nettoyer des camps) sont dotées d’une backstory, sans exception, témoignant du soin apporté par CDProjekt à leur univers, et à sa crédibilité.
On aura bien quelques déboires à noter, la conduite hasardeuse étant la principale, ou certains aspects qui apparaissent comme des occasions manquées (la streetcred peu exploitée ou les relations avec les handlers vite expédiées), mais rien qui ne soit parvenu à entacher l’expérience immersive et narrative quasi totale que fut cette centaine d’heure passée dans la peau de V. Un immense travail abattu pour une ambition démesurée, et dont le studio n’a pas fini de payer les pots cassés. Mais purée, que c'était bon !