Il n'est pire douleur que le souvenir du bonheur au temps de l'infortune.
De prime abord, Dante's Inferno ne convainc pas, mais alors pas du tout. Une introduction banale, mal ficelée et mal racontée, prétexte pour nous jeter le plus vite possible dans les Enfers. Rajoutez un gameplay apparemment tristement pauvre et une direction artistique qui saute aux yeux par sa médiocrité, et le constat semble peu reluisant.
Heureusement, plus l'on va s'aventurer dans les profondeurs de l'Enfer, plus le jeu va dévoiler d'intéressantes features. Ainsi, la possibilité de punir ou d'absoudre ses ennemis est une excellente idée, ici intelligemment utilisée : punir est simple, absoudre demande plus d'efforts (bourriner un QTE, mais bon). L'idée me plait. On peut en sus choisir d'absoudre ou de punir certains misérables se lamentant sur leur sort, inoffensifs. L'intérêt ? Ceux-ci nous conteront leurs péchés. A nous de choisir en conséquence. Un vilain petite côté de droit divin, plaisir coupable s'il en est.
De plus, à partir de l'arrivée sur le Styx (un peu avant en fait), la DA va joliment s'améliorer, avec quelques superbes idées (les murs vivants - enfin... façon de parler). Le cercle de la luxure est sympathique, mais beaucoup trop court. La découverte des vagins carnivores est néanmoins un moment marquant.
Mais c'est selon moi dans le second cercle de l'Enfer (sur 9) que le jeu atteint son apothéose : la DA de la Gourmandise est juste extraordinaire, et je pèse mes mots. Les combats sont intelligents et bien pensés, et même l'énigme de la fin saura vous retourner le cerveau (aha). Malheureusement, ce cercle est très court (15-20min), et passé ce point on se met alors à s'enfoncer dans la médiocrité, en parallèle de Dante plongeant dans les limbes.
Car ses bonnes idées, DI ne les renouvèle jamais. Et on se retrouve sans cesse à faire la même chose, ad vitam eternam. Certains disent que God of War ne consiste qu'à faire "carré carré carré". Ceux-ci sont soit des trolls, soit des joueurs ayant lancé le jeu en mode facile. Dans tous les cas, ils n'ont jamais vraiment joué à GoW. Car GoW, c'est un gameplay incroyablement bien calibré, avec un système de combat parfait, combos, contres et magies se combinant à la perfection si on le maîtrise. C'est également une mise en scène extraordinaire, et une narration stupéfiante. Le problème de DI, c'est qu'il pompe absolument tout GoW. Mais genre vraiment tout. On me l'avait dit, mais je n'aurais honnêtement jamais cru que c'était à ce point.
Sauf qu'il repompe le gameplay des combats, mais sans leur perfection. En résulte des combats vite chiants avec des ennemis souvent imprévisibles et toujours identiques. On se contentera donc bien souvent dans DI de mitrailler la même touche comme un gogole pour progresser...
Il repompe également la caméra fixe, mais sans l'utiliser pour sa mise en scène, et en la plaçant n'importe comment lors de scènes de plate-forme à se tordre de douleur d'imprécisions. Ont-ils seulement testé leur jeu ? Ce gameplay de plateforme est pourtant lui aussi intégralement repompé de GoW...
D'ailleurs, le jeu veut aussi se la jouer intense en utilisant les vibrations de la manette... Sauf qu'ils ne savent pas comment faire. Résultat : la manette vibre TOUT LE TEMPS. Au bout de 6h de jeu ma DualShock 3 était déchargée, au lieu de 20 à 30 heures normalement. Et ça tue les mains en plus.
Les magies sont en revanche sympathique, c'est un bon point à noter, tout comme les reliques à trouver et à s'équiper ou le système d'amélioration qui mise sur la bipolarité punition/absolution.
Mais le pire, le pire Mesdames et Messieurs, reste la narration. DI va jusqu'à repomper l'exact schéma du tout premier God of War, avec les révélations sur le passé de Dante au fur et à mesure de sa quête, avec des cinématiques/peintures EXACTEMENT calquées sur GoW. Sidérant, j'ai jamais vu ça. Sauf que là, c'est tragiquement mal fait. La VF est une des plus risibles ever, les dialogues d'une pauvreté navrante et la synchro labiale complètement à l'ouest. Bordel les mecs, vous adaptez la DIVINE COMEDIE de DANTE. Un putain de chef d'œuvre de la littérature et de la poésie. Et vous nous pondez CA ? SERIEUSEMENT ?? J'ai vraiment du mal à le croire...
Mais que croire au juste ?
Comment croire au malsain quand les graphismes sont si lisses et si pauvres ?
Comment croire au malsain quand il n'y a rien de malsain tellement les textures sont grossières ?
Comment croire à l'histoire devant une VF et des textes aussi ratés ?
Comment vouloir secourir Béatrice, vaincre Lucifer et se faire pardonner ses péchés quand le héros n'a absolument AUCUNE expression faciale, aucune conviction, aucun charisme ?
Comment ne pas sortir blasé de l'expérience après un combat final interminable, décevant et répétitif ?
Comment ne pas sortir de l'aventure le cœur empli de la plus amère et de la plus sincère déception ?
Au final, je quitte Dante's Inferno plein de regrets. Le potentiel était immense. Adapter cette épopée aurait pu donner une histoire épique, tragique, malsaine, dont on serait ressorti la gorge nouée et encore tremblant. Les rares idées apportées sont bonnes, mais c'est largement insuffisant face au C/C sans maîtrise ni saveur qui compose le reste. Je me mets à amèrement regretter que Sony Santa Monica se soit attelé à un GoW Ascension sans trop d'intérêt plutôt que d'avoir l'idée qu'a eu Visceral avec ce jeu...
La fin promet pourtant une suite qui pourrait être géniale. Mais non. Non, désolé Visceral, je vous aime bien, mais ne faites pas de suite. Ou alors vendez la licence.
Pour un tel gâchis de bonnes idées et de potentiel, à l'époque on vous aurait condamné à errer et à pourrir dans le 9ème cercle des Enfers pour traîtrise. Aujourd'hui, vous ne récolterez rien d'autre qu'un 5 sur SensCritique. Soyez heureux que les temps changent, Messieurs.