Bien que le jeu est à présent sorti depuis presque une demi-décennie et comptera dans les prochains mois une seconde itération, le plus Sombres des Donjons est un jeu intemporel sur lequel il est difficile de ne pas revenir de manière complètement compulsive tant il offre une rejouabilité monstrueuse.
Doté d'une narration plus que minimaliste, Darkest Dungeon n'est pas sans rappeler l'horreur Lovecraftienne avec ces monstres jaillissant du néant que doivent affronter des personnages désemparés et rarement utiles. Petit veinard que vous êtes, vous avez hérité du domaine familial, dont votre aïeul a retourné le jardin par avarice au point d'en avoir déterré tout un ensemble de donjons, accompagnés des sombres engeances habituelles. Il s'agira donc d'envoyer à la chaîne de l'aventurier courageux par paquet de quatre contre des hordes infinies de créatures infâmes; tout en assurant la rentabilité de votre petite affaire, quitte à sacrifier du péon malchanceux au passage. On est bien loin de l'ambiance dentelle et biscuits au citron. Chaque jour ramènera son lot de chair fraîche et il faudra ainsi composer avec les particularités de chaque classe, mais aussi de chaque personnage individuel dans l'espoir d'une victoire hypothétique contre le plus sombre des donjons.
Il faut dire que si les éléments les plus basiques de gameplay sont plutôt simples à comprendre, les subtilités sont quant à elles une sacré paire de manches: à moins d'y passer une bonne dizaine d'heures et de lire les innombrables guides que l'on peut dénicher sur le net, il faut accepter de se voir puni sévèrement pour ses élans les plus... créatifs. Mais après s'être ramassé quelques taloches bien méritées et avoir compris par exemple que l'évitement est la statistique la plus importante à développer, c'est une toute autre perspective qui s'offre alors. Il ne s'agit plus de temps de subir une composante aléatoire intransigeante mais d'affiner chaque détail de sa stratégie selon les moyens donnés (à savoir principalement ceux du bord). Toute votre équipée est destinée à mourir par "essence" puisque chaque virée dans les donjons les affligeront de traits négatifs, de maladies ou de stress. En somme donc, il n'est pas "rentable" de garder tous ses personnages les plus expérimentés, ni d'investir trop d'argent en eux.
Tout le paradoxe (et ce qui m'empêche de lui mettre un 10/10), c'est qu'une fois les stratégies les plus viables statistiquement et les petits "exploits" (comme par exemple le fait que la génération du loot se fait pile à l'instant où le combat termine ou juste avant d’interagir avec un coffre, ce qui permet d'éteindre la lumière juste avant et s'épargner les "dark runs"), il ne reste au final plus que la RNG pour vous tenir tête. Il n'y a guère que les boss pour relever un peu le défi et les donjons au-delà du niveau 4 qui donnent un avant-goût de l'enfer tant attendu.
Mais au final, c'est un peu le problème central de beaucoup de Rogue-like et Rogue-lite: la courbe de difficulté est plus ou moins en roue libre selon le zèle des développeurs, ce qui ne laisse que peu de chance à celles et ceux qui n'auront pas la patience de sonder toutes les subtilités de gameplay. Alors certes, il existe un mode facile, mais c'est à mon sens un trompe-l’œil puisqu'en réalité les personnages gagnent plus d'XP mais cela ne suit pas correctement la progression générale de vos améliorations puisque vous ne gagnez pas plus de ressources. Le secret de la recette du bon Rogue-like ne repose pas sur les ingrédients maintes fois éprouvés au cours des époques mais sur leurs dosages précis et qui dépendent bien souvent du temps investi dans les patchs et autres correctifs. Pour ça donc, on ne va pas y aller par quatre chemin, il faut un peu de renommée (et d'argent) pour pouvoir tenir la longueur et on ne peut pas retirer cela à Darkest Dungeon. En revanche, si l'on est un peu pointilleux, on se doit tout de même de déceler quelques défauts de fabrication qui n'ouvrent pas forcément en grand les portes du genre aux néophytes et cassent quelque peu le sentiment de progression.
Si je peux m'épancher sur les DLCs, je dirais qu'en version "ancestrale" ceux-ci font doubler le prix du jeu de base en ajoutant deux donjons spéciaux plutôt bien réfléchis, une classe de personnage "anecdotique" et le soundtrack; le tout pour la modique somme de presque 50 parpaings sur Steam, on attendra les soldes.