Le jeu le plus masochiste jamais conçu
Par Jérôme Dittmar
Qui aurait pensé qu’un jour Electronic Arts, après tant de licences sportives qu’on accueillait chaque année d’un oeil morne et blasé, au point de nous faire oublier ses meilleurs titres, puisse sortir un jeu à l’ambition digne des chefs d’œuvre du jeu vidéo ? Ce n’est pas qu’on y croyait plus, plutôt que notre vision était brouillée par trop de parasites, de jeux commerciaux sans réel talent. Et puis là, coup sur coup, Mirror's edge et Dead space : d’un côté un jeu concept à moitié réussi mais qu’on aime, de l’autre un survival horror hyper maîtrisé. Presque un virage de la part d’EA, ou peut-être une réelle volonté de se refaire une identité avec la plus haute exigence. Mais peu importent les raisons de cette nouvelle ligne éditoriale, les jeux sont là, et ils comptent. Leurs ambitions respectives sont telles qu’ils figurent déjà en bonne place dans ce qui s’est fait de mieux en 2008. Des deux titres, Dead space est certainement le plus classique mais le plus évident. Le plus abouti aussi, tant il fait preuve d’une cohérence esthétique et d’un design global presque sans faille. Jusqu’à aujourd’hui, Resident evil 4 régnait sur le survival horror, moins indétrônable que sans successeur potentiel. Mais l’empereur du genre a désormais un dauphin de taille, de ceux qui pourraient bien faire vaciller la gloire de Capcom en attendant la sortie du cinquième épisode, sans Mikami aux commandes - parti fonder Platinum Games, il a mieux à faire, comme par exemple un jeu pour E.A avec Suda 51, drôle d’ironie. Alors quoi, Dead space meilleur que Resident evil ? Pourquoi pas.
On peut en effet oser préférer le jeu d'E.A, pas par effet de contemporanéité, parce qu'on est sur PS3 ou 360 et qu'on a désormais un peu honte de notre PS2, non, c'est autre chose. Dead space n'a certainement pas la perfection du jeu de Mikami, son rythme implacable et habilement dosé, son gameplay serré et ses innovations devenues depuis des canons repris par tous. Son avantage, c'est de venir après, d'être une somme, une synthèse, poussant ainsi les éléments clés du genre à un degré d'efficacité que d'autres n'ont pas. Il peut ainsi tout reprendre, d'Enemy zero à Resident evil en passant même par Bioshock et Metroid sans n'avoir honte de rien, encore moins de ses pères. Car Dead space en impose malgré les apparences. Si la vue à l'épaule, la gestion des armes et des munitions (en quantité réduite), les messages audio, le système d'upgrade ou encore l'univers tout droit inspiré d'Alien évoquent moult réminiscences, le jeu à quelque chose que les autres n'ont su porter à un tel niveau d'exigence : la mise en scène. Mettons immédiatement Silent hill 2 hors catégorie, trop incomparable et unique pour être mesuré à quelconque autre titre. Si Dead space apporte sa pierre à l'édifice, loin, très haut, au sommet, c'est sur un autre versant, moins poreux, insaisissable, sentimental, psychologique que le jeu de Konami. (...)
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