Desolatium
Desolatium

Jeu de Superlumen et Soedesco Publishing (2023PlayStation 5)

Pour commencer l'année sous des auspices d'un autre monde : plongée dans l'antre de la folie à l'espagnole avec Desolatium, succédané de point and click à l'ancienne qui nous ramène à la Rome des cultistes, en terres Insmouthéennes, le temps d'une énième enquête à base de gens encapuchonnés pas très gentils et de monstres mi hommes mi poissons (mais tant qu'il n'y a pas Cyril Hanouna, ça va, ça fait pas peur).

Incarnant à tour de rôle quatre personnages liés par un même combat crypto-historico-prophético-païen, le joueur devra fouiller méticuleusement chaque environnement photo à 360° pour y trouver le micro poil de fesse qui lui permettra de progresser dans ses investigations et d'empêcher le retour de la revanche de nos Anciens préférés. Et si l'on peinera parfois à tracer la route tant il s'agit de dénicher l'aiguille du chaos dans la meule de foin démoniaque, la progression sera néanmoins régulière et jamais pleinement laborieuse non plus. Ceci, pour une raison fort simple : en matière de difficulté, on est (très) loin d'un Myst ou d'un Secret Files, au point qu'on n'aurait pas craché sur un peu de challenge supplémentaire quand même, pour marquer le coup. Pas besoin de démonter la vis au pied du lampadaire pour la cacher dans la tarte à la myrtille sous le piédestal de la statue du gouverneur : les éléments à combiner sont peu nombreux, leur fonction la plupart du temps limpide, si bien que même lorsque les associations ne sont pas évidentes, les tâtonnements sont rares et s'avèrent vite payants.

"Ha tiens, ça marche ? ! Hum... C'était exactement ce que je voulais faire !".

riche de lore (classique, mais efficace) et de clins d'oeil de spécialiste, l'ensemble se distingue également par l'esthétique pop art de ses dialogues et ses cinématiques, superbe, au point qu'on aurait aimé voir l'effet étendu aux décors (ce qui était semble-t-il initialement le projet, mais a sans doute dû être abandonné pour des raisons de lisibilité), quand bien même l'effort de mise en scène des lieux est plus qu'honorable (d'autant qu'il s'agit, répétons-le, de lieux réels, joliment diversifiés).

Bien qu'assez conventionnelle dans ce registre vert poisseux, l'enquête est aussi prenante que passionnante, et malgré l'archaïsme antédiluvien du gameplay, on peine à lâcher la manette, on a toujours envie d'aller un peu plus loin, d'en apprendre davantage, de cliquer sur tous les cailloux jusqu'à ce que crampe au doigt s'ensuive. Effet "partie d'Horreur à Arkham" garanti.

Quelques bémols toutefois, inévitables pour une production indé de cet ordre : les quelques modèles 3D de personnages sont tellement hideux qu'ils en deviennent cocasses (pourquoi, mais pourquoi n'avoir pas opté pour des dessins 2D dans le ton de la direction artistique ?), l'agencement spatial entres les différentes sections des environnements plus ouverts manque de lisibilité et de cohérence, de sorte qu'il est difficile de s'y retrouver (un changement de couleur du curseur pour indiquer d'où l'on vient aurait été fort pratique), et l'existence de 3 fins différentes (ce qui implique autant d'embranchements narratifs) rend certaines transitions confuses, voire contradictoires.

Il n'en demeure pas moins que cette courte expérience de 4 à 6 heures ravira à coup sûr les amateurs d'horreur cosmique et autres John Carter en herbes, pour peu qu'ils n'aient pas été biberonnés à Call of Duty.

Liehd
7
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le 5 janv. 2024

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