Mankind Divided est un de ces jeux qui a la particularité d'être excellent mais de faire mal au cœur. Un peu comme Fallout New Vegas, finalement, qui n'a bénéficié que d'un temps de développement très limité pour l'ampleur du projet, ce qui a abouti à un chef d'oeuvre... rempli de bugs, avec une technique datée.
Puis, parfois, comme avec Mankind Divided, ça ne se ressent pas sur la technique, mais sur la durée de vie. Bref.
Mankind Divided est la suite de Deus Ex : Human Revolution, qui démarrait l'histoire d'Adam Jensen, chef de la sécurité chez Sarif Industries, qui enquêtait sur un énorme complot mêlant transhumanisme, grandes corporations et illuminatis (on est dans Deus Ex cherchez pas.)
Aujourd'hui, le brave mais à moitié mécanique Adam se reconvertit au sein d'Interpol, pour trouver et neutraliser une menace terroriste augmentée qui "milite" pour les droits des augmentés à grands coups de massacres.
Techniquement, le jeu est plutôt propre, rien de spécial de ce côté-là. Peut-être l'optimisation, qui est un peu aux fraises par moments, et quelques bugs, mais graphiquement, rien ne m'a choqué, sans casser des briques non plus. Cela dit, la direction artistique est magnifique pour peu que l'on apprécie le cyberpunk.
En termes de gameplay, on retrouve la liberté et les possibilités classiques de Deus Ex : il est possible de s'infiltrer, de passer à un assaut frontal, de désamorcer des conflits par le dialogue... et évidemment, vous disposez d'augmentations cybernétiques pour vous aider quoi que vous décidiez de faire. Mais comme d'habitude, Deus Ex met surtout l'accent sur l'infiltration, qui est clairement le style de jeu le plus riche au sein de cette saga (et c'est d'ailleurs le style de jeu le plus récompensé en termes de points d'expérience). Vous pouvez pirater des tourelles, neutraliser les ennemis de manière non létale, retourner des drones et robots contre leurs propriétaires, pirater des terminaux pour gratter des mots de passe ou des informations supplémentaires, Deus Ex est un bac à sable de l'infiltration. Bon, comme dans presque tous les jeux d'infiltration, l'IA des ennemis est parfois bêbête et il est un peu trop facile de les duper. Côté armes, elles ne sont pas très variées, mais l'essentiel est là, et vous pouvez maintenant les améliorer grâce à un système de craft qui n'existait pas dans l'opus précédent. En outre, il est toujours possible de modder vos armes : ajouter un silencieux, un pointeur laser, etc...
Les dialogues sont excellents : le jeu vous offre toujours plusieurs possibilités de réponses pour tenter d'influencer votre interlocuteur. Et au cas où vous auriez envie de manipuler les gens jusqu'au bout, vous pouvez même prendre l'augmentation CASIE, une augmentation analysant automatiquement la personnalité de certains interlocuteurs pour que vous puissiez leur dire ce qu'ils ont envie d'entendre. L'augmentation peut même diffuser des phéromones pour contrôler les réactions de votre interlocuteur ! Ce n'est pas probablement pas très moral, mais entre nous, on s'en tape.
Le scénario... est moins complexe que dans Human Revolution, mais offre quelques éléments intéressants. Premièrement, il ne sombre pas dans le manichéisme. Beaucoup trop d'oeuvres sont tentées de faire des comparaisons entre les discriminations raciales d'autrefois et les discriminations "du futur" (un peu comme Detroit Become Human qui le fait très mal et de façon très stéréotypée).
Mankind Divided le fait sans sombrer dans aucun manichéisme. Adam Jensen lui-même subit constamment des contrôles de la part de la police (qui ferme sa gueule globalement parce que le type bosse pour Interpol), des augmentés se font arrêter pour rien, ou crèvent tous seuls faute de neuropozyne, un médicament permettant de lutter contre le rejet des implants. Bref, les augmentés sont clairement opprimés. Mais d'un autre côté, le jeu te montre littéralement que des augmentés qui se sentent un peu trop opprimés commencent à produire des attentats, des massacres, grâce à leurs capacités hors-norme, au point d'aller bien au-delà de la légitime défense. Le jeu ne condamne pas un côté ou l'autre par principe mais tente de montrer une situation nuancée et complexe où la violence dégénère entre deux camps... et ça fait du bien, surtout à une époque où tout le monde adore hurler à l'injustice pour tout et rien. Cette dualité est renforcée par Adam Jensen, ex-flic mais en même temps augmenté, dont le cynisme et les sarcasmes ne parviennent pas à cacher sa sereine bonté d'âme.
Deuxièmement, Mankind Divided est toujours aussi riche en lore et en détails que son prédécesseur. Le jeu contient des tonnes d'ordinateurs dont vous pourrez avidement lire les mails, vous révélant des détails sur les corporations de cet univers, ses personnages, leur façon de vivre, etc..
L'OST est passable, dans le bon sens du terme. Ce n'est pas fantastique, mais ce n'est pas *médiocre* non plus, la musique fait généralement bien son office et s'intègre parfaitement à l'ambiance cyberpunk du jeu. C'est juste que vous n'y trouverez aucun thème vraiment mémorable.
Mais là, on arrive au défaut principal du jeu, dont je me dois de parler : sa durée de vie est courte, et surtout... Le jeu se termine un peu en queue de poisson. Il y a des chances à ce qu'en finissant Mankind Divided, vous vous disiez : "Hein ? Déjà ?".
Alors c'est bon signe, parce que personne ne dit ça quand on termine un jeu médiocre. Mais il faut bien avouer, la fin tombe d'un coup, ne répond pas à toutes les réponses et n'est pas aussi étoffée et poignante que Human Revolution. Ca se finit un peu en mode "ET SURTOUT ACHETEZ NOTRE PROCHAIN JEU POUR VOIR LA SUITE", et c'est très frustrant. Mais, malgré tout, si vous vous tapez toutes les quêtes secondaires, il y a quand même moyen d'arriver à 25h, ce qui est convenable.
Voilà. Solide ambiance cyberpunk, thèmes intéressants sans être trop stéréotypés, gameplay bien travaillé, quelques problèmes ici et là mais rien de terrible.
Bref, Mankind Divided est un bon jeu. Un peu inférieur à Human Revolution, mais il vaut quand même son pesant de cacahuètes, malgré sa durée de vie limitée et sa fin... naze.