La liberté encadrée
Nouvelle session de rattrapage sur Playstation 4 avec un jeu de la génération précédente réédité pour faire rentrer un maximum de fric en vue de financer la fin du développement du second volet...
le 24 févr. 2016
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Comme c'est souvent le cas, certains termes peuvent porter à confusion et ainsi induire en erreur le joueur. Ici, il faut rappeler qu'une Définitive Édition n'a que le simple but de regrouper un jeu avec ses extensions dans un même ensemble, et ceci sans forcément se focaliser sur une amélioration visuelle (chose que propose en revanche une Remasterisation). Cependant, sans pour autant ne se contenter que de passer à la génération la plus évoluée, Dishonored Définitive Édition se permet un léger lifting sans que ce soit encore une fois le véritable objectif. La raison d'achat devra alors davantage s'orienter sur l'offre de s'atteler encore (ou pour la première fois) à un jeu grandiose avec ses extensions dans une version améliorée, sans s'attendre à une qualité graphique digne des jeux actuels.
Après une suite sobrement nommée Dishonored 2 ainsi qu'un stand alone Dishonored Death of The Outsider qui boucle avec brio l'aventure initiée par Corvo en 2012, retour sur un chef-d’œuvre maintes fois applaudi par la critique et les joueurs. Dishonored premier du nom, c'était surtout l'expérience inoubliable de tous les grands passionnés de l'assassinat méticuleux et silencieux, avec cette Définitive Édition incluant toutes les extensions vous pourrez alors saisir une bonne occasion de (re)plonger dans le monde décadent créé par Arkane Studio.
Dans un monde au style steampunk largement inspiré par les architectures victoriennes, vous êtes le protecteur royal de l'Impératrice et votre femme Jessamine Kaldwin. Après un long voyage, vous rentrez enfin chez vous pour tragiquement assister à l'assassinat de votre bien aimé. Suite à ce drame, les membres du complot saisissent l'occasion de vous mettre l'homicide sur le dos. Ainsi tel le titre du jeu, vous serez alors totalement déshonoré, il faudra alors partir en croisade et vous attaquer aux rouages essentiels de l'organisation adverse et sauver votre fille Emily, l'héritière légitime du trône. Et puisqu'il s'agit d'un immersive sim, c'est à vous d'atteindre cet objectif de la manière dont il vous plaira, par vengeance ou justice, en tuant ou non, vous serez finalement seul maître du déroulement de l'aventure.
Une fois dans la mouise vous comprendrez que derrière son air de papa-poule et d'époux modèle se cache en réalité chez Corvo un véritable assassin. Déjà bien avant de recevoir la marque de l'Outsider et donc vos pouvoirs surnaturels, le personnage demeure un excellent combattant très habile de sa lame. Et puisque les méthodes sont à élaborer par vos soins il s'agira alors de mettre à profit ses talents d'assassinats. Les possibilités sont nombreuses, grimper sur les toits et se frayer son propre chemin en tuant discrètement les ennemis sur votre passage, ou au contraire faire face à des armées entières tel un dieu de la guerre implacable. Quoi qu'il en soit, Corvo est une machine à tuer efficace qui se perfectionne encore davantage grâce à la marque de l'Outsider, le cadeau d'un dieu lui offrant alors des pouvoirs terriblement jouissifs qui façonneront grandement la manière dont vous aborderez Dishonored. Brièvement, on citera surtout parmi d'autres la possibilité de se téléporter sur une courte distance, facilitant ainsi les accès en hauteur et par la même occasion les assassinats aériens. Également un pli temporel qui permet de maitriser le temps à souhait en le mettant sur pause un court instant, de cette manière il est possible pour Corvo d'enchaîner un nombre assez incroyable d'adversaires. Et le dernier pour la route, jouer les sadiques en invoquant une nuée de rats qui s'empresseront de dévorer corps et ennemis. Cependant, même si Corvo conserve sa propre identité ses choix en revanche n'en reviennent qu'à vous. Sans nul doute, beaucoup choisiront l'infiltration meurtrière, mais l'atout de Dishonored c'est aussi de rendre toutes les solutions viables et surtout d'établir un impact sur votre fin et le monde qui vous entoure vis-à-vis de votre façon d'appréhender les situations. En complémentaire et comme pour pousser le joueur à torcher le jeu sur plusieurs parties, il sera également possible de terminer une aventure sans pouvoir, cet atout rendant ainsi la discrétion en priorité bien plus complexe pour un défi audacieux.
Quand on parle du style immersive sim, beaucoup ne savent pas vraiment expliquer ce qu'est ce genre à part entière. En effet, c'est un style peu répandu et dont Arkane Studio est un des rares représentants. Concrètement, l'immersive sim c'est la possibilité pour le joueur de faire ce qu'il veut comme il veut en lui permettant d'élaborer lui-même ses actions plutôt que d'en imposer. Justement avec Dishonored, plutôt que de dicter la conduite du joueur on lui laisse suffisamment d'options différentes pour laisser libre cours à son imagination. Ainsi tel que précisé plus haut, vous pouvez tuer ou non, discrètement ou non, sans pour autant que le jeu fasse la morale sur votre façon d'appréhender l'aventure. L'expérience va même beaucoup plus loin puisque les plus curieux dénicheront forcément plusieurs possibilités d'approche afin de terminer une mission. Globalement, chaque nouvel objectif s'accompagne d'un assassinat à accomplir, mais en écoutant des conversations, en dénichant des infos, ou en jouant le petit fouineur il finira forcément par se dévoiler une finalité non-létale pour vos cibles. De cette manière plutôt que d'enchaîner bêtement les assassinats autant trouver une autre solution et l'exploiter par conscience ou par simple opportunité. Surtout si vous jugez que votre cible ne mérite pas la mort, mais plutôt un traitement plus miséricordieux (ou encore plus horrible).
De ce fait, l'ensemble du jeu s'accentue sur les petits détails. L'architecture même des zones gratifie encore plus le gameplay en y dissimulant plusieurs moyens d'approches bien cachés. Le côté bac à sable justifie l'envie de relancer plusieurs fois une mission afin de multiplier les diverses approches. La condition restera celle d'explorer de larges zones suffisamment grandes pour frôler l'Open World, afin d'y trouver toutes les solutions possibles. Que ce soit des informations utiles à dénicher, des accès secrets, ou encore accomplir des quêtes annexes qui elles-mêmes peuvent servir positivement la mission principale. En bref, la règle maitresse de Dishonored est celle de laisser une totale liberté d'action. Assurément, la durée de vie de l'ensemble de l’œuvre est alors indescriptible à partir du moment où le joueur prendra la décision de varier sa façon de faire les choses. Un atout adéquat de ne jamais vivre deux fois la même expérience, surtout pour une aventure qui s'achève malheureusement trop vite sous le premier run.
L'univers de Dishonored se compose d'un style steampunk largement inspiré par les architectures victoriennes. Outre une immersion forcément conséquente, chaque contemplation nous ajuste en face d'un véritable tableau. Ici, il n'est pas question d'une beauté ahurissante, mais plutôt d'un concentré sur une direction artistique parfaite et exemplaire. La ville de Dunwall impose clairement un charme très varié avec une belle distinction des zones selon où l'on se situe sur l'échelle de la société. Parlons alors de la différence des quartiers riches et de leurs intérieurs magnifiquement colorés et brillants, contre la vie difficile dans des rues où les habitations sont éventrées et où les citoyens sont les proies de la garde, des gangs, mais aussi de la faim, de la soif, et de la maladie. Ajoutons à cela le contexte, l'époque de Dishonored se situe en pleine épidémie de peste, il est alors commun de voir les cadavres s'entasser et les rats pulluler. Quoi qu'il en soit, avec ceci s'accompagne alors des pnjs qui participent eux-mêmes grandement à l'élaboration d'un monde décadent parfaitement maitrisé de A à Z. Le simple fait de tomber sur le journal du jour et d'y lire les mauvaises nouvelles, d'écouter les confessions d'un habitant de la ville, ou encore de surprendre des gardes flamber des innocents, permet finalement d'impliquer le joueur encore davantage. Même si l'on ne parle pas encore d'Open World, chaque zone est assez grande et vivante pour pousser à l'exploration et à agir (toujours selon votre volonté) face aux différentes situations qui se présentent. Un moyen intelligent de ne pas limiter ses actions à la quête principale mais d'accomplir une autre quête bien plus vaste : celle d’interagir en bien (ou mal) avec le monde et la vie autour de nous.
Cependant, même avec l'atout de gonfler la durée de vie par l'intermédiaire de quelques activités supplémentaires, l'aventure s'achève toutefois bien trop rapidement. Explications, Dishonored conserve le grand défaut de faire passer son scénario en second plan en le rendant beaucoup trop simpliste. Volontairement ou pas, on prend alors davantage plaisir à évoluer dans la ville de Dunwall, ce qui fait que l'histoire elle-même s'immisce parfois entre parenthèses et cède sa place aux nombreuses activités secondaires qui composent les zones d'action. Sans comprendre comment ni pourquoi, la fin débarque déjà alors qu'on pensait bien avoir encore quelques chapitres supplémentaires. Dans ce cas de figure, on notera cependant que la rejouabilité très tentante du jeu compense ce défaut puisqu'il s'agira ensuite de démarrer une nouvelle aventure en s'imposant des défis. Soit en changeant soi-même son style ou encore en élaborant des approches manquées, soit en sautant sur l'occasion qu'offre Dishonored de rejouer au jeu sans les pouvoirs de l'Outsider.
La première extension scénarisée nourrie l'intérêt de tuer le manichéisme parfois un peu trop facile de Dishonored en plaçant le joueur dans la peau d'un personnage à première vue détestable : l'assassin Daud. Vous l'aurez compris au cours du jeu base, Daud est le leader des Harponneurs, un groupe d'assassins qui se battent comme des ombres grâce aux pouvoirs du grand vide. Cette nouvelle aventure prend place en même temps que le jeu de base, Daud comprend trop tard que son dernier assassinat a eu de graves conséquences. De cette façon, l'extension s'emploie à faire découvrir une personnalité différente du personnage en présentant un Daud dans le doute le plus total. Votre objectif cette fois-ci : résoudre le mystère Delilah, un nom encore inconnu chuchoté par l'Outsider. En dehors du contexte intéressant, le gameplay demeure le même qu'avec Corvo avec cependant quelques petites nouveautés. Certains pouvoirs sont toujours de la partie, tel le pli temporel, l’œil du grand vide, ou encore le clignement (qui permet toutefois maintenant d'arrêter le temps spontanément avant de se téléporter sur une structure). Le seul véritable nouveau pouvoir est celui d'assumer votre titre de maître des Harponneurs en ayant la possibilité d'invoquer un assassin qui tuera vos ennemis. De ce côté justement, vous ne serez plus aussi solitaire que lors de l'aventure initiale puisque Daud sera en permanence aidé par sa collaboratrice : Billie Lurk. Celle-ci prend le temps d'intervenir régulièrement afin de vous aider à dénicher et à élaborer quelques options d'approches, mais elle sert aussi à faire un bilan de vos actions. En effet, Billie donnera toujours son avis sur vos méthodes, elle sera même plutôt intriguée si vous décidez de changer radicalement le comportement de Daud en tuant le moins possible.
Quoi qu'il en soit, cette extension est véritablement à faire puisque complémentaire à l'histoire d'origine. Cependant, l'aventure demeure courte et incomplète puisqu'elle n'est finalement qu'une première partie, la deuxième intitulée Les Sorcières de Brigmore continue l'intrigue et devient alors incontournable si vous désirez poursuivre l'ensemble des aventures de Daud.
Suite de la première extension, Daud continue son périple pour cette fois-ci se confronter à des adversaires d'un autre niveau : Les Sorcières de Brigmore. L’énigme Delilah est sur le point de se résoudre, mais pour cela il va falloir rejoindre son repère reculé par bateau, on retrouve alors un Daud toujours autant rongé par le remord qui organise une infiltration osée dans la prison où Corvo lui-même était détenu. Le but? Libérer une vieille amie capitaine pour l'emmener au manoir Brigmore et ainsi engager la confrontation contre son adversaire mystérieux. Grand atout de cette extension, deux nouvelles maps retiennent particulièrement l'attention, l'une inédite grâce à ses décors originaux, l'autre est connue et vient directement faire le rapprochement avec l’œuvre initiale. Dans le cas de la zone déjà rencontrée dans l'aventure de Corvo, on peut y dénicher les conséquences des actes de l'assassin. C'est ce qu'il se passe à la prison de Coldridge où la sécurité a été renforcée avec la musique des superviseurs (celle capable de rendre les pouvoirs du grand vide inopérant), et certains gardes présents au moment des faits sont même sanctionnés à l'extrême pour leurs échecs. Mais au niveau du visuel, le plus beau tableau reste le fameux manoir qui se détache considérablement des architectures habituelles. Sans en dire trop, l'intérieur du bâtiment laisse la nature reprendre ses droits avec tout un tas de végétations gigantesques, à la fois beau et terrifiant. Côté gameplay, rien de bien nouveau si ce n'est qu'il est maintenant possible d'user d'un pouvoir déjà rencontré de la part des Harponneurs mais inutilisable jusqu'ici, il s'agit d'une force télékinésie obscure qui attire objets, mais aussi ennemis contre leur volonté. De plus, les possibilités sont toujours aussi diverses et variées, peut-être même un peu plus via les "faveurs" déjà présentes dans la première extension qui ajoutent une incidence encore plus conséquente sur le déroulement d'une mission, elles offrent toujours plus de solutions pour la résolution d'un unique problème soit un respect total envers Dishonored.
Concrètement, le grand objectif de cette dernière extension est de s'attaquer à l'impression globale de l'oeuvre initiale. Déjà grâce à la lame de Dunwall le point de vue du joueur vis-à-vis de Daud changeait radicalement, celle des Sorcières de Brigmore bouleverse quant à elle l'ensemble de l'univers établi par Dishonored. Dans le monde vidéo-ludique, rares sont les DLC ambitieux qui ont le mérite d'étoffer encore davantage le jeu d'origine, en effet les deux extensions combinées offre un scénario fouillé qui non seulement s'impose comme une conclusion de Dishonored, mais aussi prépare le terrain pour (on le sait à l'heure d'aujourd'hui) de nouvelles aventures palpitantes.
En somme, Dishonored est un jeu qui a imposé son style trop peu répandu émanant d'un studio lui-même peu connu. Après quelques années, une suite, et un stand alone, la définitive édition permet aux fans mais aussi à ceux désireux de plonger pour la première fois dans un univers riche et intéressant de (re)découvrir un véritable chef-d’œuvre doué dans son style unique, mais également imprégné d'une direction artistique simplement parfaite.
Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Trophées Platines (PS4)
Créée
le 11 févr. 2019
Critique lue 352 fois
6 j'aime
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