Il y aurait sans doute beaucoup de choses à dire, concernant pas mal d'aspects de Don't Starve. Mais je sais qu'il y en a eu d'autres avant moi pour louer son univers personnel, son aspect graphique "dessiné", son sound design léché et original ou encore la façon dont il s'est enrichi (et continue de s'enrichir) grâce à une écoute attentive de sa communauté. Et il y en aura sans doute d'autres après, alors je laisse de côté ces points pour en venir à ce qui m'a réellement passionné dans ce jeu : le game design.
Don't Starve se définit comme un jeu de survie. Bon. Mais qu'est-ce que ça veut réellement dire ? On a assez vite l'image d'un jeu où l'on doit fuir une horde de zombis affamés plus ou moins gerbants à l'évocation du mot "survival" (et comme on est tenté de lui accoler son traditionnel partenaire : "horror"). Mais là, il ne s'agit pas tout à fait de ça. C'est vachement plus terre à terre, beaucoup plus trivial : on parle juste de trouver de quoi se remplir le ventre et de quoi se mettre sur le dos.
Moi quand j'ai un creux, c'est plutôt facile, je vais au plus proche lidl si j'ai peu d'argent, ou au plus proche carrefour si je me sens riche. Puis, pour éviter de canner en hiver, je taxe le manteau en authentique fourrure de feu mon grand-père amateur de chasse et surtout je paye ma facture de gaz. Au final on en arrive à ce point : si j'ai besoin de quoi que ce soit, il me faut de l'argent. Les possibilités de mon univers sont globalement concentrées à travers cet objet unique. En revanche, dans celui de Don't Starve, les hommes-cochons n'ouvrent pas de supermarchés et les créatures cauchemardesques ne frappent pas encore leur monnaie.
Non, ce qui est passionnant dans Don't Starve, c'est que pour avancer dans une partie (et tout simplement survivre) on a besoin d'un tas de ressources différentes. On a beau reset son monde pour trouver dès le premier jour un endroit qui rassemblerait toutes les ressources nécessaires ; rien n'y fait. Si je me déniche un coin sympa avec des trous de lapins, de l'herbe, des cailloux et quelques beefalos, à tous les coups, il va me manquer des brindilles et des arbres. Ça sera donc à moi d'aller les récolter, ou dans l'idéal des les trimballer pour en faire un culture près du campement.
Je veux en venir à ça : le gameplay de Don't Starve fonctionne car il met en place une économie de la rareté. Et cette rareté fonctionne car il y a une surabondance de ressources différentes, et que celles-ci se retrouvent du coup éparpillées de par le monde. Et c'est ça qui crée le manque, et ce sentiment si particulier de frénésie collectiviste.
Je pourrais développer encore bien d'autres points, par exemple l'alternance périodes fastes (printemps) et périodes maigres (hiver), mais c'est celui-là qui me parait central dans le game design de Don't Starve. Et c'est la finesse avec laquelle la fragile alchimie des ressources est équilibrée qui donne toute sa qualité au gameplay.