Un joli voyage (mais monotone, kitsch et scripté) en enfer.
Voilà, il m'aura fallu 10 ans pour finir Doom 3. Et c'est assez difficile de noter et encore plus de critiquer, surtout en 2014. 10 ans que je remets à plus tard, et je me suis jamais demandé pourquoi je tardais autant. Il y a une raison finalement.
Mes souvenirs y voient un très bon jeu, mon coeur un titre incontournable, ma raison une oeuvre perfectible.
Quand j'y ai joué, à l'époque, j'étais scotché par sa performance visuelle, la beauté des FX, des lumières gérées en temps réel, des modèles 3D et j'en passe, car il faut bien l'avouer, c'est surtout une claque graphique ce jeu, en tout cas plus qu'une démonstration ludique de gameplay riche et varié. Et si aujourd'hui il a ce quelque chose de culte, c'est surtout pour son moteur.
Dans Doom 3, on incarne un membre des marines transféré dans une station orbitale sur Mars et en bon troufion que nous sommes on suit les ordres du chef (j'ai toujours été nul en grades militaires) nous demandant d'aller chercher un scientifique perdu et apparemment très important, blablabla.
Et mise en scène kitschouille oblige, au moment des retrouvailles avec ce fameux scientifique qui nous murmure mystérieusement qu'il a vu des choses terribles, que l'enfer existe et qu'il a construit sa cage: on assiste à un événement paranormal, une faille spatio-temporello-démoniaque ouvrant la porte aux enfers offrant par conséquent un ticket d'entrée aux démons autres humains zombifiés. On évitera donc de parler de l'histoire, ce serait trop facile.
Et c'est à partir de cette première mise en scène que Doom 3 devient presque inintéressant j'allais dire.
Passé l'exaltation du moteur 3D, on s'attend à un gameplay tout aussi intense et tenir 10h de suite dans une succession de couloirs à la monotonie terrifiante aux tons grisonnants et métalliques où l'on arrive quand même à se perdre, lesdits couloirs étant jonchés de scripts grotesques (même à l'époque) du style une salle que vous avez scrupuleusement inspecté et qui est donc complètement vide aura quand même son petit monstre qui sortira de nul part pour vous sauter à la gorge une fois sorti de la pièce. Ca surprend une fois, deux... mais tout le long du jeu, on finit par prendre l'habitude de sortir d'un endroit en marche arrière, sans surprise. Et que dire du gameplay aussi basique qu'ennuyeux... C'est dur, et long. Le level design est par ailleurs d'une rare médiocrité.
Mais bon, au moins ça reste quand même très beau, encore aujourd'hui (ou alors est-ce le regard influencé de l'époque ?).
Pour info, j'ai joué à la version BFG proposant donc de pouvoir utiliser la lampe torche en même temps que l'arme. Ca peut surprendre aujourd'hui mais ce n'était pas évident à l'époque: c'est censé rajouter de l'ambiance, enfin c'est l'argument des développeurs. Dans les faits c'est loin d'être le cas. En réalité, ça insupporte au plus haut point: vous deviez switcher en permanence entre la lampe et l'arme. Dans un survival pourquoi pas, mais pas dans un FPS finalement bourrin où vous ne voyez rien sans cette lampe, c'est une grossière erreur de design.
Mais au delà du level design linéaire et déprimant, faisant passer celui des Call of Duty pour une démonstration d'inventivité, Doom 3 est dramatiquement ennuyeux dans ses gunfights. Pour un FPS, il ne reste plus grand chose passé ces deux bases.
Le sound design des armes est abominable, on a l'impression d'avoir des jouets dans les mains. Quand on tire avec un fusil à plasma, on s'attend à entendre autre chose qu'un "piou, piou", pareil pour la mitraillette qui sonne très "toc", comme si vous tiriez sans balle.
Le bestiaire lui, est assez varié, mais finalement pas très intéressant à combattre dans la mesure où 90% du temps il pop dans votre dos, sans localisation de dégât, et qu'il vous fonce et saute dessus en permanence troublant la vue obligeant la fuite pour se retourner et bombarder bêtement. Dans le genre FPS horreur, on a vu plus immersif.
Il y a des tonnes de choses qui ne vont pas dans Doom 3: la manque de "réactions physiques" (pas de localisation de dégâts, d'objets qui tombent etc), les allers-retours saoulants, la frustration se perdre dans des décors identiques, les flingues qui sonnent si mal et sans tir alternatif, le jeu scripté jusqu'à la moelle et souvent de manière vicieuse ou bourrine, pas de grosse difficulté, une certaine raideur globale du jeu, du gameplay et de son univers... Tout ça, ce n'est pas rien dans un FPS.
Certes, les habitudes des joueurs d'aujourd'hui perturbent la redécouverte du titre en question, mais rappelons également, juste comme ça, qu'est sorti Half Life 2 la même année, donc pas vraiment d'excuse.
Pourtant, Doom 3 se laisse étonnamment jouer. Pas pour son gameplay, ni son level design ou son histoire, mais d'avoir finalement entre les mains un jeu qui a marqué son temps, ce petit je-ne-sais-quoi de "culte", ce truc qui flatte la rétine du joueur rétro ou curieux le tenant en haleine tout au long de l'aventure.
Au final, même si vous êtes dans mon cas, et que ça doit vous prendre 10 ans, on arrive toujours à ses fins, même à celle de Doom 3.