Première étape dans ma redécouverte de la saga Dragon Age, et on commence avec un très gros morceau.
Origins est un tour de force. Des pages et des pages de lore structurent un monde cohérent, vaste, que le joueur découvre à son rythme et dans l'ordre qu'il souhaite. La réalisation du monde de Thedas a dû demander un travail titanesque, et bien que le scénario du jeu soit finalement convenu, c'est bien la richesse des intrigues sous-jacentes et de l'histoire du monde qui lui donnent corps. Certains concepts - parmi lesquels la garde des ombres, l'engeance ou la religion de Thedas et la figure d'Andrasté - ont été construits avec une minutie certaine, et tout s'imbrique sans rupture de ton. L'écriture est délicieuse, l'humour toujours présent malgré le contexte crade et poussiéreux. Chaque dialogue est conçu comme une pochette surprise, qu'on ouvre et qu'on décortique jusqu'à en tirer toute l'essence.
Dragon Age, c'est aussi une galerie de personnages burlesques. Le monde de Thedas réunit tous les poncifs de la dark fantasy, et ses personnages ne font pas exception, mais chacun d'entre eux apporte une vision différente sur les événements, donnant une profondeur à un scénario finalement convenu. Par exemple, le discret Sten qui, de temps à autre, lors des phases d'exploration, commente seul certains événements. Le joueur choisit de le confronter ou non sur ces remarques mystérieuses et, s'il le fait, découvre une couche passionnante d'histoire, sans réel lien avec les événements principaux du jeu, mais terriblement addictive. Sten porte une vision alternative du monde de Thedas, conceptualisée par le Qun, un dogme quasi religieux, à la fois terriblement cynique et fondamentalement pragmatique. Il y a aussi Morrigan, qui n'a pas volé son statut de personnage iconique de la saga. Elle est ambivalente dans tous ses choix, à la fois drôle et touchante. Chacune de ses lignes de dialogue comporte une couche de compréhension supplémentaire quand on a joué à l'ensemble de la saga.
Si Dragon Age est un tel plaisir à parcourir, c'est aussi que son gameplay répond à une structure d'une cohérence rare dans le monde du CRPG. On peut aborder les quêtes principales dans l'ordre qu'on souhaite, et notre personnage n'est jamais démuni face aux vagues d'engeances qu'on lui envoie dans la face. Le système de combat est punitif mais juste grâce à un système de progression équilibré. Un seul regret toutefois : si on ne possède pas de healer dans le groupe, on se retrouve à descendre toutes nos potions de soin, ce qui nécessite de passer par la pause tactique toutes les 2 secondes.
Dragon Age Origins est une fresque épique, aux relents tolkieniens prononcés. La scène d'Ostagar, qui accueille le joueur en tout début de partie en lançant une horde d'engeances assoiffée s'écraser sur les boucliers féreldiens du roi Cailan, donne le ton d'une aventure sans concession, brutale, magique, et terriblement addictive. Chaque choix compte et crée une multitude d'embranchements, qui culminent dans un final en apothéose.
Un début presque parfait, donc, complété par l'un des meilleurs DLC sorti des usines de Bioware, pourtant coutumier du fait : Dragon Age Awakening.