La saga Driver réussit enfin l'épreuve du parking !
J'ai joué à Driver 1, jeu épuré, uniquement axé sur le pilotage de savonnettes plus ou moins glissantes, et j'ai adoré. J'ai joué à Driver 2, qui rajoutait des villes, des phases à pied et des bugs : j’ai beaucoup moins aimé - c’est le jeu dans son ensemble qui est devenu une véritable savonnette pour ses développeurs. J’ai joué à DRIV3R (LULZ, cai dé vrai TRU3 H4RDC0R3 G4M3R !), et c’est simple : le jeu est aussi insupportable que le maire de l’une des villes dans lequel celui-ci prend place – je ne salirai pas cette critique en indiquant ici son nom.
J’ai zappé les épisodes suivants, parce que bon, on ne se remet pas si facilement de la mission avec le Fenwick dans DRIV3R, les vrais savent.
Et me voilà donc avec Driver San Francisco, dont on me dit le plus grand bien, même si moi, j’avais des doutes. En effet, Driver n’a jamais été aussi bon que dans sa formule initiale, aseptisée. Devais-je alors avoir foi en Ubisoft (qui a repris la licence, et une partie du studio d’origine), éditeur dont on connait la propension à alourdir tout ce qu’il touche, chiffre d’affaires, listes d’item à collectionner dans ses open world, DRMs à la con dans nos expériences de jeu, modes multis en ligne qui parasitent les modes solos et bidules apps moisis en bonus sur nos smartphones, et si ma phrase est aussi lourde, c’est pour que tu puisses mieux comprendre le problème ?
Hmmmmmmm… en fait, oui. Parce que Driver SF est chapeauté par l’Ubisoft d’avant, celui de 2011, l’éditeur encore un chouia breton, pas totalement mondialisé et pris en otage par des markéteux fans d’Alain Madelin. On sent que les développeurs (Ubisoft Reflections, ex. Reflections Interactive), ont pu… pardon, ont été libres de rendre une copie qui leur ressemble (un peu). Du coup, Driver SF, c’est bien de la conduite pure, aussi glissante qu’un orifice sous une grosse noix de Vaseline, et donc, ultra jouissive. Les voitures font vroum vroum comme de grosses américaines dont le plein d'essence n'est à la portée que des markéteux précités, et les véhicules dérapent comme un directeur créatif lambda de la firme de Montreuil qui s’exprime sur la présence de personnages féminins jouables dans Assassin’s Creed Unity. Tout. Va. Bien. Vraiment. Quoique. On pourrait déplorer le trop grand nombre d’activités annexes-mais-pas-tout-à-fait-car-il-faut-les-faire-pour-débloquer-les-missions-principales-de-l’aventure, par rapport au nombre de missions « utiles » du jeu, mais bon, ça, c’est la patte d’Ubisoft, qu’on soit déjà heureux de ne pas devoir sortir de notre bagnole toutes les trente secondes pour ramasser des foutus coffres à ressources.
En plus, le jeu est moche, donc c’est bon, même s’il est mal optimisé, il ne risque pas de ramer. 60 fps constants, ça passe. On s’en félicite.
Et puis, l’idée de génie : le Shift. Le truc rajouté à la recette initiale du jeu, le truc qui aurait pu tout faire foirer, le truc dont je craignais qu’il ait été implanté dans le jeu par un obscur scribouillard… pardon, directeur du marketing qui considèrerait le jeu vidéo comme un simple truc. C’est même à cause de ça que j’ai attendu trois ans avant de toucher à Driver SF, je n’avais plus foi en rien ; ni en la licence ni en ceux qui la portent.
Et j’avais tort.
Le Shift est un gimmick qui permet au joueur de passer à la volée d’un véhicule à un autre, et donc, d’imaginer les pires fourberies pour d’arriver à ses fins, à savoir éliminer ses poursuivants, arriver à un point A le plus rapidement possible, rattraper un malandrin… les missions se ressemblent toutes plus ou moins dans Driver SF, mais cette simplicité est ici un atout. Car le jeu ne se renouvelle pas dans ses objectifs, mais dans la manière de les atteindre : utiliser via le Shift des véhicules de la circulation afin de percuter ses ennemis, détourner un bus scolaire pour faire un barrage imposant quelques centaines de mètres plus loin, et boum le méchant fuyard - ainsi que les gentils écoliers dans le bus.
À propos d’écoliers broyés dans un accident de la route (pas tout à fait) fortuit, n’attendez rien de Driver SF sur le plan de la cohérence entre l’univers du jeu/le scénario et le gameplay… rien ne pouvait justifier le Shift, si ce n’est la recherche du bon gameplay, du bon flow, celui qui fait vibrer le joueur. Ça marche, c’est le plus important, tant pis pour les innocents broyés dans de la tôle fumante à cause des excès de zèle du flic que vous incarnez ; pour le scénar’ de Driver SF, c’est aussi ridicule que du Assassin’s Creed, mais au moins, ce n’est pas aussi chiant à suivre. Pas aussi prétentieux en fait.
Seul écueil du jeu : il est un chouia trop facile, alors que la saga Driver se caractérisait autrefois par une difficulté au mieux relevée, au pire vomitive. La dernière mission de Driver 1, la poursuite sur les corniches de Driver 2, celle de Catalina dans DRIV3R, ça se jouait toujours au poil de cul ; dans Driver SF, même lorsque mon run est loin d’être parfait, il y a toujours la fouf’ à Mallaury Nataf entre ma performance et un hypothétique échec.
Résumons : Driver SF, c’est bien. Très bien même. Pas brillant, hein. Mais ça fonctionne, comme jamais cela n’a fonctionné dans la saga Driver. C’est aussi bien que les… pardon, LE Driver d’antan, et je ne remercierai jamais Ubisoft d’avoir permis à ce jeu d’émerger.
Mais ça, c’était l’Ubisoft d’antan.
(Enfin, d’il y a seulement trois ans… oui, le temps passe vite…)