Critique Fabuleusement Rétrospective

--- réécriture d'une vieille critique de 2016 ---


Il est désormais temps.

Temps, enfin, de remercier la trilogie qui égailla ma jeunesse à la manière d'auteurs comme Gemmell, Rowling, Twain, Stevenson ou dans un autre art Miyazaki et P. Jackson. A l'issu du dernier opus de cette fable en triptyque, crépuscule d'une épopée légendaire (oui oui les grands mots), je me lance.

De part ton nom, et tout le reste, je suis tombé amoureux. A défaut d'aimer son père, j'aime l'enfant. Car, enfant aussi, il m'aura insidieusement ouvert ce tortueux mais exquis chemin qu'est celui du héro. Un chemin que j'aurai suivi en toute hâte, inlassablement, fébrilement, et au long duquel j'aurai pu découvrir le monde magnifique dans lequel se déroule notre conte.


“ " C'est un voyage qui débute comme tout autre : d'abord chargé d'excitation à l'idée de découvrir cette nouvelle destination dont on nous a tant parlé (en l'occurrence, voir mon frère jouer au premier opus sans pouvoir y toucher, les cadets comme moi s'y reconnaîtront), puis rempli d'un émerveillement sans borne lorsque nos attentes sont dépassées, pour finalement connaître cette fièvre inarrêtable qui ne nous laisse qu'un seul choix pour l'atténuer : recommencer.

Malheureusement (ou pas ?) à 12 ans, il est très difficile de se mettre des limites. J'ai ainsi plongé sans aucune forme de retenue dans Fable : The Lost Chapter, et je m'y suis autant perdu que retrouvé. Je pense que c'est avec à ce jeu que mon amour pour la fantasy, l'humour burlesque, les contes épiques, et surtout le jeu vidéo s'est entièrement épanoui. Tout dans ce premier épisode rayonnant et coloré me plaisait, de son histoire autant simpliste qu'évocatrice à ses personnages autant timbrés que touchants, de ses musiques magistrales à ses combats frénétiques.

Il est évident que ce premier Fable n'est pas celui qui pourra prétendre n'avoir aucun défaut, notamment sur la déception qu'il aura pu provoquer dans son manque de contenu (monde ouvert, interactions, profondeur du rpg...) mais voyez plutôt la chose comme ceci : dans l'esprit d'un enfant, le vide d'une pièce déjà bien remplie n'est là que pour être complété par son imagination.


“ " L'attente du deuxième volet était donc inévitablement maladive. La moindre information qui me passait sous le nez y restait un bon moment et, après avoir tout décortiqué, je me prêtais à imaginer les divers éléments qui me restaient inconnus : je me faisais déjà mon propre jeu.

Le jeu enfin en main, je fus évidemment d'abord émerveillé : Avoir le choix de son genre, la cinématique d'intro exemplaire, les musiques toujours envoutantes, le renouveau graphique et les environnements toujours - voire plus - enchanteurs (ah, ces godrays rayonnants à travers la canopée bien verte de Brightwood, les clapotis de l'eau au rythme des flûtes irlandaise de Bowerlake...). Mais comme pour tout parcours du héro, il y a des chutes.

En effet, après tant d'attente et un Molyneux aux commandes (on ne peut pas tout lui reprocher non plus bien sûr, mais c'est si facile), la déception était difficilement évitable. Ayant grandi et joué à d'autres jeux en parallèle, l'esprit critique n'était plus celui d'un enfant de 12 ans non plus. Je fini donc par être lassé par la lourdeur du système de combat et des interfaces, déçu des quêtes et du manque de profondeur (encore) des différents récits, des personnages, de l'aspect rpg et surtout de l'équipement revu à la baisse (ou plutôt devenu simplement cosmétique). Avec le recul, les graphismes deviennent eux aussi plus fades.

Malgré tout ce Fable 2, par ses nombreuses nouveautés et sa persistance à nous délivrer une aventure toujours plus épique, pleine de sincérité et de détails enrichissants, continue à m'éprendre et me faire voyager. Ses nombreuses qualités effacent largement ses défauts qu'on a facilement tendance à pardonner, par simple amour. J'y vécu et mouru, héro d'habitude en toute immersion au sein d'un Albion ravissant et grandiose.


" " Puis vint le 3. Cette fois, j'ai dû sérieusement ravaler mon incompréhension face à des choix qui, clairement, ne pouvait qu'alourdir une recette déjà mal calibrée dans le 2. J'ai dû me heurter à ces nouveaux revirements étranges et contre-productifs : c'est quoi cet inventaire ? Le système de combat est encore pire ? Une direction quasiment uniquement narrative, bien que le scénario n'a jamais été le point fort de la série, pour finalement atterrir maladroitement dans un jeu de gestion simpliste ? A nouveau, les monstres molyneux se sont agrippés à mes jambes dans l'espoir encore plus grandissant de me faire trébucher et, je dois l'admettre, j'ai chuté.

Pourtant voilà. J'étais déjà tombé amoureux, et on sait ce qu'on dit sur les aveugles. Heu, non... ...Enfin, tout ça pour dire que le 3 ne fit pas exception : il m'a fait voyagé. J'entends encore les arbres chuchoter et le vent des cavernes murmurer, je me souviens et n'oublis pas ces peuples et leur contrées. Illuminé par ce soleil toujours majestueux, enhardi par ces péripéties jouissives, mon périple fut beau. Et telle une douce caresse ou une claque furibonde, la musique accompagne en un écho parfait ce qui se déroule devant mes yeux (le climax de la première partie...). Ce jeu est la version la moins convaincante du monde de Fable, mais c'est bel et bien un jeu Fable.


" " Car je pense qu'au final, peu importe leur nombres, aucun défaut ne pourra me priver de ces joies. L'univers de Fable restera absolument unique. S'ils ont échoué dans divers domaines, les créateurs ont largement réussi ici. Vagabond des landes mystérieuses d'Albion, j'ai fini épris de ses champs infinis, éclatant de beauté, des ces forêts lugubres et angoissantes, de ces maisonnées grotesques et charmantes, de sa faune et ses portes parlantes, de ce héro tout à fait solitaire et mutique. Et c'est à l'issue éprouvante de ce dernier opus que toute l'ampleur de la chose s'effondra sur moi : Fable n'est pas sans le 1, le 2, et le 3 ensembles. Les trois forment un tout. L'univers de l'un complète l'autre, les qualités de l'autre effacent les défauts de l'un (et inversement ? nan, ce serait bizarre). Si certains auraient aimé - j'en fait parti - une conclusion plus réussie à cette saga, c'est bien la trilogie dans son entièreté qui aura marqué tout une génération de jeune joueurs avides d'aventures et pleins de rêves fabuleux en tête.


" " Il est donc naturel pour moi de conclure cette longue réflexion (bravo par ailleurs à ceux qui ont tenu jusqu'ici) en un remerciement envers cette œuvre et ses créateurs.

Merci. Encore aujourd'hui, je me surprend à m'imaginer sauveur de marchand, quêteur de trésor, dresseur de chien et surtout chasseur de poulet.

Sybed
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