Far Cry 5 : Ça vous change la vie

Raah, monde de merde.


On savait déjà que Bethesda n’en avait plus grand-chose à foutre de la qualité d’écriture de ses titres depuis Oblivion, mais je crois que cet opus a explosé tous les records. S’ouvre une brève introduction pas transcendante mais au moins originale dans les futures années 60 d’avant-guerre. C’est le pompon. Oui. Ces tocards nous ont refait le coup du pitch ultra nombriliste de Fallout 3, tout en essayant maladroitement de provoquer une once d’émotions, avec des personnages antipathiques et des dialogues complètement pourris doublés par des acteurs de téléfilms. Le tout est si mauvais que même en mettant de côté l’aspect RPG tout simplement inexistant dans ce volet et en se contentant de jouer à un FPS, il ne se passe pas un instant sans qu’on ait envie de hurler devant les sacs de merde que Bethesda déballe et étale à chaque détour de quête. Sérieusement, regardez ce passage (enfin, ne cliquez pas si vous ne voulez pas vous spoiler la première mission du jeu ; après tout, je ne voudrais pas vous gâcher ce plaisir) : https://youtu.be/ZHoHUyrq2XQ?t=6m55s


Mon dieu, quel dynamisme, quel charisme ! Et ces randoms connards qui masquent la conversation avec leurs remarques pertinentes ! Et ce lipsynch bugué, quelle classe !


Mais PUTAIN, sortez-moi de cet ENFER de MÉDIOCRITÉ !


Dans ce passage, tout y est : le casting merdique, le rythme inexistant, les répliques qui se chevauchent et qui se coupent brutalement, les dialogues de merde. Notez d’ailleurs comment le mec veut vous expliquer qu’un réacteur à fusion, c’est une batterie, « mais nucléaire -.-. » NO SHIT SHERLOCK ! On est dans un foutu monde où le nucléaire est omniprésent ! On en trouve quasiment PARTOUT ! Imaginez un instant qu’un péon d’un Elder Scrolls vous explique que la magie existe. Ce genre d’explications n’a tout simplement rien à foutre ici, il est simplement bon à ramener le joueur à son statut de spectateur.


Évidemment, ce que je ne vous ai pas dit, c’est la façon dont cette mission débute : vous vous pointez, le cœur vaillant, vers le centre-ville, attiré par des coups de feu. Arrivé devant le bâtiment principal, un type attire votre attention du haut de sa fenêtre, aime bien votre gueule et vous balance un fusil laser en vous ordonnant de bien vouloir les aider à buter leurs agresseurs. Ce type. Sacrifie. La MOITIE de son arsenal en espérant tomber sur le bon samaritain. Bethesda, je te chie sur la tête. Je sais déjà que tu vas me transformer en connard de service livreur de courrier, et pas en héros.


La vidéo se termine sur le personnage bien cliché et horripilant de la vieille gitane aveugle qui te raconte ton avenir. Mon Dieu.


Alors, vous me direz peut-être : ce n’est que la première mission, le reste du jeu tient la route ? Non. Je suis allé en voir un peu plus sur Youtube et c’est du même acabit. Enfin, il y a peut-être quelques sursauts de qualité ici-et-là, comme dans chaque open world Bethesda, mais j’aurais plutôt tendance à penser que le seul contenu un tant soit peu subversif que ce studio peut produire, c’est une guilde avec des fillettes meurtrières et du porno reptilien dans des livres. Et quand bien même l’intrigue réserverait de belles surprises, ce que j’en ai vu ne me donne pas envie de me forcer.
Je ne commenterais pas le système de dialogues, qui était déjà réduit dans Fallout 3 et à nouveau enrichi par Obsidian dans New Vegas avec le retour des tests sur compétences, sur réputation ou encore sur les dons. A ce niveau-là, on ne peut plus sauver grand-chose. Et pour ce qui est du karma et des traits, vous pouvez les oublier.


Bethesda a tout de même fait un effort sur un point. Si Minecraft avait à mon avis influencé Skyrim avec la pioche, Fallout 4 va un peu plus loin avec la construction de bases en s’inspirant des jeux de survie du moment. Du coup, on peut construire des bâtiments selon notre bon vouloir (à des endroits bien spécifiques sur la carte), les alimenter en électricité, en eau et en nourriture, et les défendre en y installant des tourelles et d’autres structures pour attirer des colons, le tout en recyclant des matériaux. Alléchant, mais il y a cependant deux inconvénients majeurs : on s’en lasse très rapidement (je suis pourtant friand de ce genre de goodies) et on a tendance à entasser ses bourses avec la moindre petite merdouille qu’on peut ramasser. Skyrim remplissait votre inventaire avec des lingots (et des potions, dont on ne se servait jamais), Fallout 4 le fait avec des tessons de bouteille.


Il n’y a également aucune difficulté. Non seulement le jeu vous gave de munitions et de potions (comme n’importe quel Elder Scrolls, en fait), mais il vous donne en plus votre première armure assistée au bout de dix minutes de jeu. Alors certes, il y a une contrepartie (la recharger) mais ça n’arrange rien au sentiment de larbin invincible que l’univers entier du jeu veut provoquer en vous (en fait c’est pas un jeu, c’est une thérapie pour individu en manque d’estime de soi !).


A cette déchéance narrative, il faut également ajouter une esthétique assez moyenne, surtout pour les personnages, qui crèvent complètement l’écran, et une réalisation technique associant d’énormes problèmes de performance (surtout sur consoles) avec des textures parfois dignes du siècle dernier, et les quelques nouveaux effets cache-misère proposés n’arrangent absolument rien.


Les animations des personnages sont toujours aussi rigides que risibles, la vue à la troisième personne est inutilisable, la gestion physique est toujours à la rue (j’ai fait tomber un mannequin parfaitement stable en ramassant un crayon juste à côté…). L’interface du Pipboy est toujours aussi pénible (en plus, un gros connard s’est dit que ce serait cool de le placer en plein milieu de l’écran sans en augmenter la superficie, ce qui rend la plupart des textes affichées totalement illisibles) et les temps de chargement sont interminables, même pour entrer dans une petite structure.
Qu’est-ce que j’oublie ? Ah oui, le champ de vision par défaut est atroce (à 70°, on a l’impression de fermer un œil en permanence), les touches sont mal réassignées (le mode construction ne prend pas en compte vos changements…), et de temps en temps, les modèles des armes disparaissent ! Ah ah ah ah !


« Mais les bugs, les problèmes d’optimisation, c’est normal, c’est un jeu Bethesda ! » Non. Arrêtez un peu vos conneries. Ce n’est pas parce que l’éditeur livre à chaque fois ses jeux dans un état pitoyable qu’il faut trouver ça normal. Lorsqu’un autre studio fait la même chose (qui a dit Arkham Knight ?), c’est le tollé général.


Mais y’a rien à développer, c’est d’la merde, c’est tout.


Fallout 3 était un premier pas auquel on pouvait pardonner les erreurs de jeunesse. Son successeur s’enfonce davantage, avec une écriture particulièrement médiocre, des quêtes fédex qui vous obligent à retourner trois fois les mêmes donjons. Fallout 4 est un open world tout juste passable, qui se fera un plaisir de vous ramener à votre situation de joueur avec son stupide « ka-ching » en guise d’alerte de gain de points d’expérience.


Ma note n’est probablement pas représentative du ressenti général, mais même en écartant ses défauts, je ne vois aucune qualité qui me permettrait de préférer ce jeu à un autre. Ce n’est pas un bon Fallout, mais ce n’est pas un bon jeu non plus. Il n’a pas d’âme. C’est juste un open world interchangeable, et plutôt dans la moyenne basse. Et ce qui est sidérant dans tout ça, c’est qu’ils semblent avoir mené leur campagne à la perfection : leur promo dantesque a excité les joueurs (au point que certains croyaient que le dernier live action était tiré du jeu…) et leur embargo sur la presse (quand elle ne faisait pas dans le publi-rédactionnel) leur a permis d’engranger un maximum de précommandes sur les premières semaines de sortie.


Enfin, Bethesda a tout de même amélioré un ou deux aspects. Par exemple, la fouille est devenue beaucoup plus agréable et fluide, parce qu’ouvrir un conteneur ne déclenche plus une animation suivie d’une ouverture de fenêtre d’échange. C’est une petite bouffée d’oxygène. L’interface spécifique de l’armure assistée est sympathique, et en plus de ça, les combats sont un peu plus plaisants : on peut se passer du VATS, il y a de l’iron sight… bref, l’amateur de Call of Duty (ou le consommateur de fast food[1]) y trouvera peut-être son bonheur.


Pour moi, ses défauts sont beaucoup trop rédhibitoires pour que je puisse en faire abstraction, au contraire de Skyrim qui avait au moins su me captiver pendant une trentaine d’heures avant ma « première pause » (c’est-à-dire avant d’installer le combo gagnant Skyrim Redone/Deadly Dragons/Alternate Start qui l’ont rendu bon quelques mois/années plus tard).
Je souhaite bon courage aux moddeurs pour essayer de rattraper les défauts de ce volet-là, à savoir (principalement) une intrigue de merde.
Allez, un petit avant-goût ?


https://youtu.be/DKiLgA-XIL8


Hé oui les enfants ! Écrire et doubler un personnage, c’est autre chose que d’ajuster un ENB ! Et c’est l’un des mods les plus soutenus sur le Nexus pour Skyrim. Ce n’est pas une blague.


Faites de beaux rêves.


Et rendez-vous dans quatre ans pour un nouvel épisode de Dinette Post-Apocalyptique, dans une autre ville sans cachet et chiante de la Côte Est, en compagnie de Lydia, la mule followeuse muette.


[1] : https://youtu.be/yndokVbzJM8?t=5s

Makks
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le 17 nov. 2015

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Makks

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