Un paradis presque parfait
Moi enfant des îles.
Moi avoir passé ma jeunesse dans les lagons Tahitiens – à nager entre les coraux, les scalaires et les tortues vertes –, dans la Jungle ni-Vanuatu – à manger des sandwichs au thon et des bananes à chaque repas, et à dormir à même le sol –, sur les pentes des volcans – Réunionnais ou ni-Vanuatu encore –, dans les rivière Calédoniennes – à me doucher sous les cascades –, sur les plages des Seychelles – à me dorer la pilule comme un touriste lambda –, ou encore dans le Désert Australien – où tu ne peux pas te baigner sans être avalé aussi sec par un Crocodylus porosus…
Toi Jack Carver. Toi te retrouver à nager dans les eaux magnifiques d’un archipel tropical, avec un gun, une chemise et de l’humour douteux, afin de secourir fille aux avantages certains.
Toi et moi, peut-on être amis ?
Car oui Jack, le début de ton aventure m’a vendu du rêve. Et pas qu’un peu. Avec ta petite chemisette rouge, ta VF caricaturale à en pleurer de rire, et Marc Alfos en guise d’Atlas, tu étais relativement bien parti. Mais cette sortie en extérieur, cette végétation, ce sables, cette eau… Bordel, j’ai bien du passer une heure à simplement me balader d’atoll en atoll, à explorer les fonds marins avec toi, à répertorier les différentes espèces de poissons vivant en ces eaux claires et limpides… Si on rajoute les effets visuels et la pate graphique extraordinaires pour l’époque, c’est un véritable bénitier de Proust que je me suis alors mangé dans la gueule.
Bon, c’est après que sont arrivées les complications, n’est-ce pas Jacky ? On a choisi de se la jouer hardcore warriors nous, on n’est pas des tapettes à deux francs cinquante cinq, alors on est en mode difficile. Mais sacrefesses, qu’est-ce qu’ils visent bien les ennemis ! Et qu’est-ce qu’ils font mal. Et qu’est-ce que les chekpoints sont éloignés ! En cette année 2012, on se rend plus que jamais compte du décalage intersidéral qui est apparu en 8 ans dans le domaine du FPS !
N’empêche que voila, atteindre un bateau échoué en nageant sous l’eau, en se cachant derrière les récifs de pierre pour échapper aux patrouilles alors que le soleil rayonne à la surface de l’eau au-dessus de nos têtes… IT’S FUCKING PARADISE guys. Moi, enfant des îles, répand ma semence dans l’océan au fur et à mesure que les corps tombent autour de moi. Moi, enfant des îles, a envie d’aller mettre un 10 sur SensCritique. Mais moi, enfant des îles, je ferais bien de m’abstenir. Hein Jacky ?
« Jack, vous voyez l’antenne là »
« Celle en haut de la montagne sur l’île à l’autre bout du lagon au-delà de la forêt ? » « Oui. »
« Eh bien ? »
« Allez la détruire, je vous prie »
« Je fais comment ? »
« Démerdez-vous, vous n’avez plus 5 ans »
« Mais… donc je suis libre de faire ce que je veux ? »
« Bah oui »
« zomg omg omg je suis liiiiiiiiibre. Dans un fpsssssss. J’avais oublié que c’était possiiiiiiiiiiiiiiiiiiiible. Go bateau, tuer les gens, sauter dans autre bateau, faire tomber le requin qui pendouille, foncer sur un atoll perdu en bateau, me balader, remettre mon bateau à l’eau, foncer sur l’île, passer par le bunker, monter, redescendre, galérer 3h sur l’assaut des bateaux-mortiers, et faire exploser cette putain d’anteeeeeeeenne. I’m freeeeeeeeeeeeeeeeeee. Malheureusement, je n’ai pas encore tout compris.
Lance-roquette + deltaplane + hélicoptère = Jackounet <3
Malheureusement, une fois ce magnifique champ de banane traversé (bien que les bananiers soient un peu petits réalistiquement parlant), les ennuis commencent. Tu t’en rappelles, hein Jacky ? Allongé dans les fourrés en haut de la colline, si bien camouflé qu’on ne se voyait même plus nous-mêmes. Et le petit monsieur, sur sa tour de garde, qui nous tourne le dos, bien dans le viseur… quand tout d’un coup, il se retourne et te headshot ! Tu t’en souviens bien, hein Jacky ? Immédiatement, tous ses amis débarquent, par la terre et par les airs… et c’est la piquette pire qu’à Super Monkey Ball.
Et juste ensuite, ces tentes perméables aux balles, c’est génial ! Mais comment un type allongé sur sa couchette dans une tente à 500m peut-il te headshoter à travers sans même te voir ? Frustrant, frustrant… Cette mission terminée, Jacky et moi sommes repartis sur de nouvelles bases. En mode normal, cette fois-ci.
Peu après, l’ambiance devient lourde, pesante. Beaucoup n’ont pas aimé, mais j’ai personnellement trouvé ça génial. Vraiment, notre aventure se renouvelle ainsi de manière parfaitement cohérente et ludiquement incroyable. Les emprunts sont nombreux et réussis.
Le problème, c’est que ces séquences durent, durent, durent… Et malgré un excellent level design, un couloir reste un couloir, hein mon Jacky ? Et quand on en peut plus, et qu’on émerge enfin à la surface pour de bon… la satisfaction n’est que de courte durée, car on se retrouve de nouveau à faire sauter des antennes, mais entre des lance-roquettes cachés tellement loin qu’on ne peut même pas les voir au sniper. Mais eux, ils vous dégomment sans l’ombre d’un problème !
Rappel : LES ROQUETTES METTENT DEUX MINUTES A ARRIVER PUTAIN. Alors comment ces putains de fils de filles de péripatéticienne peuvent prévoir mes mouvements DEUX MINUTES à l’avance hein ????????§§§§§§§§§§§
Heureusement, dans Far Cry, il y a toujours (ou presque) 50 manières d’atteindre son but. Donc on finit par revoir sa technique à zéro, afin d’arriver à cheater ce jeu surcheaté.
Heureusement également, après quelques niveaux vraiment lassants, le jeu se reprend et nous offre de nouvelles situations variées et exceptionnelles.
Un chemin escarpé descend droit sur un village ennemi où on doit voler un bateau ? Tout droit, un gunfight dur et chiant, à gauche la falaise, à droite le vide. Prenez à droite. En étant pas trop mauvais, vous descendrez sans trop trop de dégâts. Continuez alors à travers une mangrove des plus réalistes, puis approchez du bateau sous l’eau… montez, et enfuyez-vous avec. THIS IS FAR CRY GUYS. Le jeu où les développeurs nous préparent un truc presque parfait, et où on les encule en rigolant car on a finalement fait autre chose. Quand ce n’est pas l’inverse du moins.
La fin, tellement hardcore que j’avais l’impression d’être au Boss final de Killzone 2 en Elite (ou presque), nous a fait pleurer, hein mon Jacky ? Des cris de douleurs, de rage et de désespoir. D’où le titre de notre aventure sûrement. Et encore, ça c’est joué à un pixel prêt, n’est-ce pas mon trésor ?
Alors au final, que penser de cette aventure ?
Elle tue, elle déboite, elle arrache les fesses à coups de dents. Cette liberté dans les missions, et cette possibilité d’aborder chaque instant ou presque de manière différente selon le joueur qu’on est. Ces dialogues VF juste cultissimes tellement ils sont caricaturaux. La douche de Val sous la cascade. Ce trip surflippant dans les arbres, où des prigènes pouvaient surgir n’importe quand. Ces batailles monstrueuses entre humains et trigènes. Marc Alfos, ce fils de pute qui nous manque. Et cette beauté visuelle de tous les instants.
Que peut-on opposer à cela ? Un jeu surcheaté et bien trop difficile en mode « normal », à cause de ces cheats justement. Une grosse baisse de rythme au milieu de l’aventure (sur 20-30h de jeu quand même). Une infiltration inexistante à cause des ennemis surcheatés alors que plein de missions sont prévues pour (plus gros défaut du jeu…). Des mods assez peu convaincants. Un multi dont on n’a rien à foutre.
Mais bordel, moi, enfant des îles, j’ai tellement pris mon pied. Franchement, tellement peu de jeux vendent une telle expérience, et de nos jours encore moins. Mais Far Cry ne plaira pas à tout le monde. Et vous qui me lisez, vous n’aimerez peut-être pas. Vous retournerez peut-être jouer à Call of, ou à Doom, ou à Halo selon la personne que vous êtes (un de ces jeux tue tout, trouverez-vous lequel ?). Mais vous passerez alors à côté d’une expérience de fou furieux, pas forcément accessible, mais qui mérite amplement toute votre attention.
Alors jouez-y, je vous prie.